Bogdan Matei and Ioana Ofelia Matei v SC Volksbank România SA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:127
Date26 February 2015
Celex Number62013CJ0143
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-143/13
62013CJ0143

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

26 février 2015 ( *1 )

«Directive 93/13/CEE — Clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur — Article 4, paragraphe 2 — Appréciation du caractère abusif des clauses contractuelles — Exclusion des clauses relatives à l’objet principal du contrat ou à l’adéquation du prix ou de la rémunération pour autant qu’elles sont rédigées de manière claire et compréhensible — Clauses comportant une ‘commission de risque’ perçue par le prêteur et autorisant celui-ci, sous certaines conditions, à modifier unilatéralement le taux d’intérêt»

Dans l’affaire C‑143/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunalul Specializat Cluj (Roumanie), par décision du 26 novembre 2012, parvenue à la Cour le 20 mars 2013, dans la procédure

Bogdan Matei,

Ioana Ofelia Matei

contre

SC Volksbank România SA,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe, président de chambre, M. M. Safjan et Mme A. Prechal (rapporteur), juges,

avocat général: M. N. Wahl,

greffier: Mme L. Carrasco Marco, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 novembre 2014,

considérant les observations présentées:

pour SC Volksbank România SA, par Mmes D. Ciubotariu, G. Murgulescu et G. Vintilă, ainsi que par M. M. Clough, QC, et Me B. Papandopol, avocat,

pour le gouvernement roumain, par M. R.‑H. Radu et Mme I.‑R. Haţieganu, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes C. Gheorghiu et M. Owsiany-Hornung, ainsi que par M. M. van Beek, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. et Mme Matei (ci-après, ensemble, les «emprunteurs») à SC Volksbank România SA (ci-après «Volksbank») au sujet du caractère prétendument abusif de clauses incluses dans des contrats de crédit à la consommation prévoyant, d’une part, une «commission de risque» perçue par Volksbank et autorisant, d’autre part, cette dernière, sous certaines conditions, à modifier unilatéralement le taux d’intérêt.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 93/13

3

Les douzième, dix-neuvième et vingtième considérants de la directive 93/13 énoncent:

«considérant [...] qu’en l’état actuel des législations nationales, seule une harmonisation partielle est envisageable; que, notamment, seules les clauses contractuelles n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle font l’objet de la présente directive; qu’il importe de laisser la possibilité aux États membres, dans le respect du traité [CEE], d’assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur au moyen de dispositions nationales plus strictes que celles de la présente directive;

[...]

considérant que, pour les besoins de la présente directive, l’appréciation du caractère abusif ne doit pas porter sur des clauses décrivant l’objet principal du contrat ou le rapport qualité/prix de la fourniture ou de la prestation; que l’objet principal du contrat et le rapport qualité/prix peuvent, néanmoins, être pris en compte dans l’appréciation du caractère abusif d’autres clauses; [...]

considérant que les contrats doivent être rédigés en termes clairs et compréhensibles; que le consommateur doit avoir effectivement l’occasion de prendre connaissance de toutes les clauses [...]».

4

L’article 1er, paragraphe 1, de cette directive prévoit:

«La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur.»

5

Aux termes de l’article 3 de ladite directive:

«1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

[...]

3. L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives.»

6

L’article 4 de la directive 93/13 est rédigé comme suit:

«1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.»

7

L’article 5 de cette directive dispose:

«Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. [...]»

8

L’article 8 de ladite directive prévoit:

«Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la [...] directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur.»

9

L’annexe de la même directive, relative aux clauses visées à l’article 3, paragraphe 3, de celle-ci, contient, à son point 1, une liste non limitative des clauses qui peuvent être considérées comme étant abusives. À ce point 1, sous j), figurent les clauses ayant pour objet ou pour effet «d’autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat». Audit point 1, sous l), figurent celles qui ont pour objet ou pour effet «d’accorder [...] au fournisseur de services le droit d’augmenter [ses] prix, sans que [...] le consommateur ait de droit correspondant lui permettant de rompre le contrat au cas où le prix final est trop élevé par rapport au prix convenu lors de la conclusion du contrat».

10

Le point 2 de cette annexe est relatif à la portée du point 1, sous g), j), et l), de celle-ci. Ce point 2, sous b), indique notamment que le point 1, sous j), de ladite annexe «ne fait pas obstacle à des clauses selon lesquelles le fournisseur de services financiers se réserve le droit de modifier le taux d’intérêt dû par le consommateur ou dû à celui-ci, ou le montant de toutes autres charges afférentes à des services financiers, sans aucun préavis en cas de raison valable, pourvu que soit mise à la charge du professionnel l’obligation d’en informer la ou les autres parties contractantes dans les meilleurs délais et que celles-ci soient libres de résilier immédiatement le contrat». Le point 2, sous d), de la même annexe énonce que le point 1, sous l), de cette dernière «ne fait pas obstacle aux clauses d’indexation de prix pour autant qu’elles soient licites et que le mode de variation du prix y soit explicitement décrit».

La directive 2008/48/CE

11

La directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO L 133, p. 66, et rectificatifs JO 2009, L 207, p. 14, JO 2010, L 199, p. 40, et JO 2011, L 234, p. 46), prévoit une obligation générale pour le prêteur d’indiquer au consommateur, au stade précontractuel ainsi que dans le contrat de prêt, certaines données, dont le taux annuel effectif global (ci-après le «TAEG»). L’annexe I de cette directive prévoit une méthode de calcul harmonisée du TAEG.

12

Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, de la directive 2008/48:

«La présente directive ne s’applique pas:

a)

aux contrats de crédit garantis par une hypothèque, par une autre sûreté comparable communément utilisée dans un État membre sur un immeuble, ou par un droit lié à un bien immobilier;

[...]»

13

L’article 3 de cette directive dispose:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[...]

g)

‘coût total du crédit pour le consommateur’: tous les coûts, y compris les intérêts, les commissions, les taxes, et tous les autres types de frais que le consommateur est tenu de payer pour le contrat de crédit et qui sont connus par le prêteur, à l’exception des frais de notaire; ces coûts comprennent également les coûts relatifs aux services accessoires liés au contrat de crédit, notamment les primes d’assurance, si, en outre, la conclusion du contrat de service est obligatoire pour l’obtention même du crédit ou en application des clauses et conditions commerciales;

[...]

i)

‘[TAEG]’: le coût total du crédit pour le consommateur, exprimé en pourcentage annuel du montant total du crédit [...]

[...]»

Le droit roumain

La loi no 193/2000

14

La loi no 193/2000 sur les clauses abusives dans les contrats conclus entre commerçants et consommateurs, dans sa version republiée (Monitorul Oficial al României, partie I, no 305, du 18 avril 2008, ci-après la «loi no 193/2000»), vise à transposer la directive 93/13 dans le droit interne.

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