Banco Santander SA v Mahamadou Demba and Mercedes Godoy Bonet and Rafael Ramón Escobedo Cortés v Banco de Sabadell SA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:643
Docket NumberC-94/17,C-96/16
Celex Number62016CJ0096
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeCuestión prejudicial - sobreseimiento
Date07 August 2018
62016CJ0096

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

7 août 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives – Champ d’application – Cession de créance – Contrat de prêt conclu avec un consommateur – Critères d’appréciation du caractère abusif d’une clause de ce contrat fixant le taux des intérêts moratoires – Conséquences de ce caractère »

Dans les affaires jointes C‑96/16 et C‑94/17,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites respectivement par le Juzgado de Primera Instancia no 38 de Barcelona (tribunal de première instance no 38 de Barcelone, Espagne), par décision du 2 février 2016, parvenue à la Cour le 17 février 2016, et par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), par décision du 22 février 2017, parvenue à la Cour le 23 février 2017, dans les procédures

Banco Santander SA

contre

Mahamadou Demba,

Mercedes Godoy Bonet (C‑96/16),

et

Rafael Ramón Escobedo Cortés

contre

Banco de Sabadell SA (C‑94/17),

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, M. A. Tizzano (rapporteur), vice‑président de la Cour, MM. E. Levits, A. Borg Barthet et F. Biltgen, juges,

avocat général : M. N. Wahl,

greffier : Mme L. Carrasco Marco, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 janvier 2018,

considérant les observations présentées :

pour Banco Santander SA, par Mes A. M. Rodríguez Conde et J. M. Rodríguez Cárcamo, abogados,

pour Banco de Sabadell SA, par Mes A. M. Rodríguez Conde et J. M. Rodríguez Cárcamo, abogados,

pour le gouvernement espagnol, par Mme V. Ester Casas, en qualité d’agent,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par MM. J. Baquero Cruz, N. Ruiz García et M. van Beek ainsi que par Mme A. Cleenewerck de Crayencour, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 22 mars 2018,

rend le présent

Arrêt

1

Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant, pour le premier, Banco Santander SA à Mme Mercedes Godoy Bonet et à M. Mahamadou Demba (C‑96/16), et, pour le second, M. Rafael Ramón Escobedo Cortés à Banco de Sabadell SA (C‑94/17), au sujet de l’exécution de contrats de prêt conclus entre ces parties.

I. Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Le treizième considérant de la directive 93/13 énonce :

« considérant que les dispositions législatives ou réglementaires des États membres qui fixent, directement ou indirectement, les clauses de contrats avec les consommateurs sont censées ne pas contenir de clauses abusives ; que, par conséquent, il ne s’avère pas nécessaire de soumettre aux dispositions de la présente directive les clauses qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives [...] ; que, à cet égard, l’expression “dispositions législatives ou réglementaires impératives” figurant à l’article 1er paragraphe 2 couvre également les règles qui, selon la loi, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu ».

4

L’article 1er de cette directive dispose :

« 1. La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur.

2. Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives [...] ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

5

L’article 3, paragraphes 1 et 3, de ladite directive prévoit :

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

[...]

3. L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives. »

6

L’article 4, paragraphe 1, de la même directive est libellé comme suit :

« Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend. »

7

Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

8

L’article 7, paragraphe 1, de cette directive prévoit :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

9

L’article 8 de ladite directive énonce :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

10

Le point 1, sous e), de l’annexe de la même directive inclut, au sein de la liste des clauses visées à l’article 3, paragraphe 3, de celle‑ci, celles ayant pour objet ou pour effet « d’imposer au consommateur qui n’exécute pas ses obligations une indemnité d’un montant disproportionnellement élevé ».

Le droit espagnol

Les dispositions relatives à la cession de créance

11

L’article 1535 du Código Civil (code civil), qui régit le droit du débiteur de racheter sa dette en cas de cession de créance, dispose :

« Lorsqu’une créance litigieuse est cédée, le débiteur a le droit de l’éteindre en remboursant au cessionnaire le prix que ce dernier a payé ainsi que les frais qu’il a exposés et les intérêts du prix à compter de la date de ce paiement.

Une créance est considérée comme litigieuse lorsque l’action en justice relative à celle-ci fait l’objet d’une contestation.

Le débiteur peut se prévaloir de son droit dans un délai de neuf jours à compter de la demande de paiement présentée par le cessionnaire. »

12

La substitution du cessionnaire d’une créance au cédant dans les procédures en cours est régie par les articles 17 et 540 de la Ley 1/2000 de Enjuiciamiento Civil (loi 1/2000 portant code de procédure civile), du 7 janvier 2000 (BOE no 7, du 8 janvier 2000, p. 575, ci-après le « code de procédure civile »), ledit article 17 s’appliquant dans le cadre des procédures au fond et ledit article 540 dans celui des procédures en exécution.

Les dispositions relatives aux clauses abusives

13

L’article 82 du texto refundido de la Ley General para la Defensa de los Consumidores y Usuarios y otras leyes complementarias (texte portant refonte de la loi générale pour la défense des consommateurs et des utilisateurs et d’autres lois complémentaires), approuvé par le Real Decreto Legislativo 1/2007 (décret royal législatif 1/2007), du 16 novembre 2007 (BOE no 287, du 30 novembre 2007, p. 49181, ci-après la « LGDCU »), dispose :

« Sont considérées comme des clauses abusives toutes les stipulations n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle et toutes les pratiques non consenties expressément qui, en dépit de l’exigence de bonne foi, créent au détriment du consommateur et de l’utilisateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. »

14

L’article 85, paragraphe 6, de la LGDCU prévoit que sont abusives « les clauses qui imposent au consommateur et usager qui n’exécute pas ses obligations une indemnité d’un montant disproportionnellement élevé ». Cette disposition transpose les dispositions combinées de l’article 3, paragraphes 1 et 3, ainsi que du point 1, sous e), de l’annexe de la directive 93/13, tout en précisant que, en droit espagnol, le type de clause visé audit point 1, sous e), est toujours considéré comme étant abusif.

La jurisprudence du Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne)

15

Il ressort de la décision de renvoi dans l’affaire C‑94/17 que, dans ses arrêts no 265/2015, du 22 avril 2015, no 470/2015, du 7 septembre 2015 et no 469/2015, du 8 septembre 2015 (ci-après les « arrêts des 22 avril, 7 et 8 septembre 2015 »), le Tribunal Supremo (Cour suprême) a constaté que, en l’absence de critères légaux dont découleraient des règles claires aux fins de l’appréciation du caractère abusif des clauses non négociées définissant le taux des intérêts moratoires dans les contrats de prêt personnel conclus avec les consommateurs, les juridictions espagnoles de première instance et d’appel appliquaient des critères différents. Il en résultait une grande insécurité juridique et une différence arbitraire de traitement entre les consommateurs en fonction de la juridiction saisie du litige. D’importantes divergences existaient aussi...

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