Arrêts nº T-52/16 of Tribunal General de la Unión Europea, December 13, 2017

Resolution DateDecember 13, 2017
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-52/16

Dans l’affaire T-52/16,

Crédit mutuel Arkéa, établi au Relecq Kerhuon (France), représenté par Mes H. Savoie et P. Mele, avocats,

partie requérante,

contre

Banque centrale européenne (BCE), représentée par MM. K. Lackhoff, R. Bax et Mme C. Olivier, en qualité d’agents, assistés de Me M. Pittie, avocat,

partie défenderesse,

soutenue par

Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci et K.-P. Wojcik, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision ECB/SSM/2015 - 9695000CG 7B84NLR5984/40 de la BCE, du 4 décembre 2015, fixant les exigences prudentielles, qui sont applicables au groupe Crédit Mutuel,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie),

composé de MM. M. Prek (rapporteur), président, E. Buttigieg, F. Schalin, B. Berke et Mme M. J. Costeira, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 6 juin 2017,

rend le présent

Arrêt

  1. Antécédents du litige

    1 Le Crédit mutuel est un groupe bancaire non centralisé, constitué d’un réseau de caisses locales ayant le statut de sociétés coopératives. Chaque caisse locale de Crédit mutuel doit adhérer à une fédération régionale et chaque fédération doit adhérer à la Confédération nationale du Crédit mutuel (CNCM), organe central du réseau au sens des articles L.511-30 et L.511-31 du code monétaire et financier français (ci-après le « CMF »). À l’échelle nationale, le Crédit mutuel comprend, en outre, la Caisse centrale du Crédit mutuel (CCCM), qui est une société anonyme coopérative de crédit à capital variable, agréée en tant qu’établissement de crédit, détenue par les membres du réseau.

    2 Le requérant, le Crédit mutuel Arkéa, est une société anonyme coopérative de crédit à capital variable, agréée en tant qu’établissement de crédit. Il a été créé en 2002 par le rapprochement de plusieurs fédérations régionales de crédits mutuels. D’autres fédérations se sont regroupées pour créer le CM11-CIC, d’autres encore sont restées autonomes.

    3 Par un courrier du 19 septembre 2014, le requérant a fait part à la Banque centrale européenne (BCE) de son analyse de l’impossibilité d’être soumis à la surveillance prudentielle de la BCE par l’intermédiaire de la CNCM. Par un courrier du 10 novembre 2014, la BCE a indiqué saisir les autorités compétentes françaises de cette question.

    4 Le 19 décembre 2014, la BCE a communiqué à la CNCM un projet de décision fixant des exigences prudentielles applicables au groupe Crédit mutuel, lui a demandé de veiller à ce que ce projet soit communiqué aux différentes entités qui le composent et lui a imparti un délai pour que celles-ci présentent leurs observations. Le 16 janvier 2015, le requérant a communiqué ses observations à la BCE. Le 30 janvier 2015, la CNCM s’est exprimée sur les observations présentées par le requérant.

    5 Le 19 février 2015, la BCE a communiqué à la CNCM un projet de décision révisé fixant des exigences prudentielles applicables au groupe Crédit mutuel ainsi qu’aux entités qui le composent, lui a demandé de veiller à ce que ce projet révisé soit communiqué à ces dernières et lui a imparti un délai pour qu’elles présentent leurs observations. Le 27 mars 2015, le requérant a présenté ses observations.

    6 Le 17 juin 2015, la BCE a adopté une décision fixant des exigences prudentielles applicables au groupe Crédit mutuel, dans laquelle elle soulignait être l’autorité de surveillance prudentielle sur une base consolidée de la CNCM et l’autorité compétente chargée de la surveillance des entités énumérées dans cette décision, au nombre desquelles figurait le requérant (considérant 1). À l’article 2, paragraphe 1, de cette décision, il était spécifié que la CNCM veillait à ce que le groupe Crédit mutuel satisfît en permanence aux exigences précisées à l’annexe I. Il découlait de l’article 2, paragraphe 3, de ladite décision que le requérant devait satisfaire en permanence aux exigences précisées à l’annexe II-2, au titre desquelles était imposé un ratio de fonds propres de catégorie 1 (ci-après les « fonds propres “CET 1” ») de 11 %.

    7 Le 17 juillet 2015, le requérant a demandé le réexamen de cette décision au titre de l’article 24 du règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil, du 15 octobre 2013, confiant à la BCE des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO 2013, L 287, p. 63, ci-après le « règlement de base »), lu conjointement avec l’article 7 de la décision 2014/360/UE de la BCE, du 14 avril 2014, concernant la mise en place d’une commission administrative de réexamen et ses règles de fonctionnement (JO 2014, L 175, p. 47). Une audition s’est déroulée le 31 août 2015 devant la commission administrative de réexamen (ci-après la « commission de réexamen »).

    8 Le 14 septembre 2015, la commission de réexamen a rendu un avis concluant à la légalité de la décision de la BCE. Elle y a souligné, en substance, que les critiques diligentées par le requérant à l’encontre de la décision du 17 juin 2015 pouvaient être regroupées en trois catégories selon qu’il contestait le recours à une surveillance prudentielle consolidée du Groupe Crédit mutuel par l’intermédiaire de la CNCM au motif que celle-ci ne serait pas un établissement de crédit (premier grief), qu’il alléguait l’inexistence d’un « Groupe Crédit mutuel » (deuxième grief) ou qu’il contestait la décision de la BCE de relever ses exigences de ratio de fonds propres « CET 1 » de 8 à 11 % (troisième grief).

    9 S’agissant du premier grief, en premier lieu, la commission de réexamen a rappelé que la BCE, par une décision du 1er septembre 2014, avait considéré que le groupe Crédit mutuel constituait un groupe important soumis à la surveillance prudentielle et, à cette occasion, elle a relevé que le requérant était une entité membre de ce groupe et que la CNCM en constituait le niveau de consolidation le plus élevé. En deuxième lieu, elle a relevé que la notion d’organisme central figurant à l’article 2, paragraphe 21, sous c), du règlement (UE) n° 468/2014 de la BCE, du 16 avril 2014, établissant le cadre de la coopération au sein du mécanisme de surveillance unique entre la BCE, les autorités compétentes nationales et les autorités désignées nationales (le « règlement-cadre MSU ») (JO 2014, L 141, p. 1, ci-après le « règlement-cadre MSU »), et à l’article 10 du règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1, rectificatifs JO 2013, L 208, p. 68 et JO 2013, L 321, p. 6), n’était pas définie par le droit de l’Union européenne et qu’il n’était pas imposé que ledit organisme central soit un établissement de crédit, en se référant, au soutien de cette interprétation, à l’orientation du comité européen des contrôleurs bancaires (CECB) du 18 novembre 2010 (ci-après l’« orientation du CECB ») ainsi qu’à l’article 4, paragraphe 1, sous g), du règlement de base. En troisième lieu, la commission de réexamen a relevé qu’il n’était pas nécessaire que la BCE disposât de l’arsenal complet des pouvoirs de surveillance ou de sanction à l’égard de l’entité mère d’un groupe pour exercer une surveillance prudentielle sur une base consolidée. En quatrième lieu, elle a rappelé que, antérieurement au transfert de cette compétence à la BCE, le groupe Crédit mutuel faisait l’objet d’une surveillance prudentielle sur une base consolidée de l’autorité compétente française, à savoir l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), par l’intermédiaire de la CNCM.

    10 S’agissant du deuxième grief, la commission de réexamen a conclu que le groupe Crédit mutuel répondait aux conditions énoncées à l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 575/2013, auquel l’article 2, paragraphe 21, sous c), du règlement-cadre MSU renvoie. En premier lieu, la commission de réexamen a considéré que la qualité d’association de la CNCM n’empêchait pas l’existence d’une solidarité avec les établissements affiliés. En deuxième lieu, elle a retenu que les comptes du groupe Crédit mutuel dans son ensemble étaient établis sur une base consolidée. En troisième lieu, elle a considéré que c’était à bon droit que la BCE avait retenu que la CNCM avait le pouvoir d’adresser des instructions à la direction des établissements affiliés.

    11 S’agissant du troisième grief, la commission de réexamen a estimé que les appréciations de la BCE quant au niveau des exigences de fonds propres « CET 1 » du requérant n’étaient entachées d’aucune erreur manifeste d’appréciation et ne présentaient pas un caractère disproportionné. Elle a, à cet égard, souligné les désaccords persistants opposant le requérant et la CNCM en ce qu’ils seraient révélateurs de problèmes de gouvernance susceptibles d’occasionner des risques supplémentaires.

    12 Le 5 octobre 2015, la BCE a adopté la décision ECB/SSM/2015 - 9695000CG 7B84NLR5984/28, fixant les exigences prudentielles applicables au groupe Crédit mutuel, laquelle a, en application de l’article 24, paragraphe 7, du règlement de base, abrogé et remplacé la décision du 17 juin 2015, tout en conservant un contenu identique.

    13 Le 9 octobre 2015, la BCE a adopté un projet de décision, à l’égard duquel le requérant a disposé de la possibilité de présenter ses observations.

    14 Le 4 décembre 2015, la BCE a adopté la décision ECB/SSM/2015 - 9695000CG 7B84NLR5984/40 (ci-après la « décision attaquée »), fixant de nouvelles exigences prudentielles applicables au groupe Crédit mutuel ainsi qu’aux entités qui le composent. Le point 1 de la décision attaquée concerne les exigences prudentielles applicables au groupe Crédit mutuel sur une base consolidée et son point 3 les exigences applicables au requérant. Dans ce dernier point, la BCE a fixé les exigences de fonds...

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