Arrêts nº T-284/15 of Tribunal General de la Unión Europea, December 13, 2018

Resolution DateDecember 13, 2018
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-284/15

Aides d’État - Industrie chimique - Décision de poursuivre l’exploitation d’une entreprise durant la procédure de faillite - Décision constatant l’absence d’aide d’État - Recours en annulation - Affectation individuelle - Recevabilité - Notion d’aide d’État - Avantage - Critère du créancier privé - Imputabilité à l’État - Obligation de motivation

Dans l’affaire T-284/15,

AlzChem AG, établie à Trostberg (Allemagne), représentée initialement par M. P. Alexiadis, solicitor, Mes A. Borsos et I. Georgiopoulos, avocats, puis par M. Alexiadis, Mes Borsos, E. Kazili, P. Oravec et K. Csach, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. G. Conte et Mme L. Armati, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

République slovaque, représentée par Mme B. Ricziová, en qualité d’agent,

et par

Fortischem a.s., établie à Nováky (Slovaquie), représentée par Mes C. Arhold, P. Hodál et M. Staroň, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de l’article 2 de la décision (UE) 2015/1826 de la Commission, du 15 octobre 2014, concernant l’aide d’État SA.33797 (2013/C) (ex 2013/NN) (ex 2011/CP) mise à exécution par la Slovaquie en faveur de l’entreprise NCHZ (JO 2015, L 269, p. 71),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, S. Papasavvas et Mme O. Spineanu-Matei (rapporteur), juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 11 avril 2018,

rend le présent

Arrêt

  1. Antécédents du litige

    1 La requérante, AlzChem AG, est une société ayant son siège social en Allemagne et exerçant son activité sur plusieurs marchés de produits de chimie fine dans un certain nombre d’États membres de l’Union européenne, parmi lesquels la République slovaque.

    2 Novácké chemické závody, a.s. v konkurze (ci-après « NCHZ ») était un producteur chimique détenu par des capitaux privés et doté de trois divisions. Cette société exploitait une usine chimique installée dans la région de Trenčín (Slovaquie). Elle avait pour cœur d’activité la production de carbure de calcium et de gaz techniques, de polychlorure de vinyle et de ses sous-produits ainsi que d’une part croissante de produits de chimie lourde et de chimie fine de faible tonnage.

    3 Le 8 octobre 2009, NCHZ, ayant déclaré son incapacité à poursuivre ses activités et déposé son bilan, a fait l’objet d’une procédure de faillite.

    4 Le 5 novembre 2009, la République slovaque a adopté la zákon č. 493/2009 Z.z. o niektorých opatreniach týkajúcich sa strategických spoločností a o zmene a doplnení niektorých zákonov (loi no 493/2009 sur certaines mesures concernant les sociétés stratégiques et sur la modification de certaines lois, ci-après la « loi sur les sociétés stratégiques »). Cette loi, entrée en vigueur le 1er décembre 2009, conférait à l’État un droit de préemption l’autorisant à acheter les sociétés stratégiques faisant l’objet d’une procédure de faillite et exigeait la présence d’un administrateur de faillite (ci-après l’« administrateur ») afin d’assurer la poursuite de l’exploitation de la société stratégique durant cette procédure. Le 2 décembre 2009, NCHZ a été qualifiée par les autorités slovaques, en vertu de ladite loi, de société stratégique et a bénéficié de ce statut jusqu’à l’expiration de celle-ci, le 31 décembre 2010. NCHZ a été la seule société à faire l’objet d’une application de ladite loi (ci-après la « première période de la faillite »).

    5 Après le 31 décembre 2010, NCHZ a été soumise à l’application de la zákon č. 7/2005 Z.z. o konkurze a reštrukturalizácii a o zmene a doplnení niektorých zákonov (loi no 7/2005 sur la faillite et la restructuration et sur les modifications de certaines lois, ci-après la « loi sur la faillite ») (ci-après la « seconde période de la faillite »). Lors de la réunion commune du 26 janvier 2011 entre les créanciers chirographaires, réunis au sein du comité des créanciers (ci-après le « comité des créanciers »), et les créanciers privilégiés concernés (ci-après la « réunion du 26 janvier 2011 »), l’administrateur alors en fonction a informé ceux-ci du fait que les charges d’exploitation générées par l’activité de NCHZ étaient supérieures aux produits d’exploitation. Il a, en outre, communiqué aux créanciers son analyse économique du 23 décembre 2010 (ci-après l’« analyse économique »), laquelle a été complétée par une présentation des dirigeants. Les créanciers susmentionnés ont alors décidé la poursuite de l’exploitation de NCHZ (ci-après la « décision du 26 janvier 2011 »). Cette décision ayant été approuvée par une décision du súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín, Slovaquie) le 17 février 2011 [ci-après la « décision du súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) » ou la « décision du 17 février 2011 »], l’administrateur a poursuivi cette exploitation. En l’espèce, conformément à la loi sur la faillite, le comité des créanciers, les créanciers privilégiés et le súd v Trenčíne (tribunal de Trenčín) composaient le comité compétent (ci-après le « comité compétent »).

    6 Le 13 octobre 2011, la Commission européenne a reçu une plainte concernant une aide illégale que la République slovaque aurait accordée à NCHZ. Cette plainte a été complétée le 14 juin 2012.

    7 Le 17 octobre 2011, la Commission a transmis aux autorités slovaques la plainte reçue, accompagnée d’une demande de renseignements. Les 22 mars et 21 juin 2012, la Commission leur a adressé de nouvelles demandes d’information. Les autorités slovaques ont répondu à l’ensemble de ces demandes.

    8 Le 31 juillet 2012, NCHZ a été achetée par Via Chem Slovakia a.s., qui, le 1er août 2012, a revendu la division chimique de NCHZ, à l’exception des biens immeubles, à Fortischem a.s.

    9 Le 24 janvier 2013, une réunion s’est tenue entre la Commission et le plaignant, à la demande de ce dernier, lequel a transmis des informations complémentaires par courriels des 8 et 22 mars 2013.

    10 Par lettre du 2 juillet 2013, la Commission a notifié aux autorités slovaques sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, en vertu de l’article 108, paragraphe 2, TFUE (JO 2013, C 297, p. 85), s’agissant, d’une part, de l’autorisation de l’État, du fait de la loi sur les sociétés stratégiques, de poursuivre l’exploitation de NCHZ de décembre 2009 à décembre 2010 et, d’autre part, de la décision des créanciers de janvier 2011 de poursuivre l’exploitation de NCHZ, après l’expiration de la loi sur les sociétés stratégiques. La Commission a en outre émis des doutes sur le caractère inconditionnel de l’appel d’offres ayant permis la vente de NCHZ et a estimé que des indices sérieux laissaient penser que la continuité économique entre NCHZ et la nouvelle entité n’avait pas été interrompue.

    11 À la suite de la décision du 2 juillet 2013, la Commission a reçu des observations des autorités slovaques ainsi que du plaignant et d’une autre partie intéressée. Les observations de ces parties intéressées, accompagnées de nouvelles questions, ont été envoyées aux autorités slovaques, qui ont présenté leurs observations le 14 janvier 2014.

    12 Le 7 octobre 2013 et le 17 février 2014, des réunions ont eu lieu entre les services de la Commission et les autorités slovaques, à la demande de ces dernières. Le 20 mars 2014, la Commission a envoyé une demande d’explications complémentaire à l’une des parties tierces intéressées, qui y a répondu le 6 mai 2014. Le 2 mai 2014, la Commission a adressé aux autorités slovaques de nouvelles questions, auxquelles elles ont répondu les 14 et 30 mai 2014.

  2. Décision attaquée

    13 Le 15 octobre 2014, la Commission a adopté la décision (UE) 2015/1826, concernant l’aide d’État SA.33797 (2013/C) (ex 2013/NN) (ex 2011/CP) mise à exécution par la Slovaquie en faveur de l’entreprise NCHZ (JO 2015, L 269, p. 71, ci-après la « décision attaquée »).

    14 La Commission a considéré que l’attribution du statut de société stratégique à NCHZ (ci-après la « première mesure ») constituait un avantage sélectif au profit de celle-ci, était imputable à l’État, avait conduit à l’utilisation de ressources d’État et avait faussé la concurrence sur un marché ouvert aux échanges entre les États membres. La Commission en a conclu que cette mesure constituait une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et que cette aide était illégale et incompatible avec le marché intérieur (considérants 110 et 114 à 124 de la décision attaquée). Après avoir estimé que le montant de l’aide d’État s’élevait à 4 783 424,10 euros, elle a considéré que l’aide devait être récupérée auprès de NCHZ et que l’ordre de récupération devrait être étendu à Fortischem, celle-ci étant liée à NCHZ dans le cadre d’une continuité économique (considérants 101 et 174 de la décision attaquée).

    15 En revanche, la Commission a estimé que la poursuite de l’exploitation de NCHZ en vertu de la décision du 26 janvier 2011 (ci-après la « seconde mesure ») ne constituait pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, étant donné qu’au moins deux conditions cumulatives conditionnant l’existence d’une aide d’État, à savoir l’imputabilité de la mesure en cause à l’État et l’existence d’un avantage économique, n’étaient pas remplies (considérant 113 de la décision attaquée).

    16 Le dispositif de la décision attaquée est libellé comme suit :

    Article 2

    La décision qui a permis la poursuite des activités de NCHZ après l’expiration de la loi, en vertu de la décision du comité des créanciers, ne constituait pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, [TFUE].

    […]

    Article 6

    La [République slovaque] est destinataire de la présente décision.

  3. Procédure

    17 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er juin 2015, la requérante a introduit le présent recours.

    18 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 6 octobre 2015, la République slovaque a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la...

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