Arrêts nº T-431/18 of Tribunal General de la Unión Europea, November 07, 2019

Resolution DateNovember 07, 2019
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-431/18

Fonction publique - Assistants parlementaires accrédités - Résiliation anticipée du contrat - Rupture du lien de confiance - Droits de la défense - Procédure de conciliation - Erreur manifeste d’appréciation - Discrimination en raison du sexe - Congé de maternité - Devoir de sollicitude

Dans l’affaire T-431/18,

WN, représentée par Mes L. Levi et A. Champetier, avocates,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par Mmes Í. Ní Riagáin Düro et M. Windisch, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du Parlement du 28 septembre 2017 de résilier le contrat d’assistante parlementaire accréditée de la requérante et, d’autre part, à la réparation du préjudice moral qu’elle aurait prétendument subi du fait du comportement du Parlement,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni (rapporteur), président, L. Madise et R. da Silva Passos, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1 Le 16 mars 2015, la requérante, WN, a été recrutée par le Parlement européen en tant qu’assistante parlementaire accréditée pour assister un député européen (ci-après le « député concerné »). En vertu d’un contrat relevant du titre VII du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA ») devant expirer à la fin de la législature, la requérante a été classée au grade 5 dans le groupe de fonctions I.

2 Par un nouveau contrat, conclu le 19 janvier 2016 et mettant fin au précédent contrat, la requérante a été engagée pour exercer les mêmes fonctions, avec la même échéance, en étant classée au grade 6 dans le groupe de fonctions I.

3 Par courrier du 1er décembre 2016, le chef de l’unité « Recrutement des agents contractuels et des assistants parlementaires accrédités », agissant en qualité d’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC »), a informé la requérante que le député concerné lui avait adressé une demande de résiliation anticipée de son contrat pour rupture du lien de confiance (ci-après la « demande de résiliation »), lui a communiqué cette demande et l’a invitée à un entretien préalable (ci-après l’« entretien préalable »), tel que prévu par les dispositions de l’article 20, paragraphe 4, troisième alinéa, des mesures d’application du titre VII du RAA, prises en application de l’article 125, paragraphe 1, du RAA, adoptées par une décision du bureau du Parlement du 9 mars 2009 et modifiées, en dernier lieu, par une décision du bureau du Parlement du 14 avril 2014 (ci-après les « mesures d’application du titre VII du RAA »). Ladite demande, datée du 15 novembre 2016, mentionnait que la rupture du lien de confiance était liée aux motifs d’insuffisance professionnelle, de performance insatisfaisante et de manque de professionnalisme et d’attention dans le travail.

4 Le 3 décembre 2016, la requérante a répondu à l’AHCC qu’elle n’était pas en mesure de prendre part à l’entretien préalable pour des raisons médicales.

5 Par courrier du 6 décembre 2016, l’AHCC a invité la requérante à lui communiquer d’éventuelles observations sur le motif de la demande de résiliation et l’a informée qu’elle avait la possibilité de demander que soit engagée la procédure de conciliation prévue par les mesures d’application du titre VII du RAA (ci-après la « procédure de conciliation »).

6 Le même jour, la requérante a informé l’AHCC qu’elle était enceinte.

7 Le 12 janvier 2017, la requérante a été reçue par l’AHCC dans le cadre de l’entretien préalable. Lors de cet entretien, elle a sollicité la mise en œuvre de la procédure de conciliation.

8 Par courriel du 26 janvier 2017, la requérante a communiqué à l’AHCC des observations sur les éléments qui lui avaient été présentés lors de l’entretien préalable (ci-après les « observations du 26 janvier 2017 »).

9 Le 7 février 2017, une réunion de conciliation a eu lieu entre la requérante et le député concerné.

10 Le 17 février 2017, le député concerné a communiqué à l’AHCC ses commentaires sur les observations du 26 janvier 2017 (ci-après « les commentaires du 17 février 2017 du député concerné »).

11 Par courrier du 17 mars 2017 (ci-après les « conclusions de la réunion de conciliation »), la conciliatrice a informé le directeur général de la direction générale du personnel qu’il n’était pas possible pour la requérante et le député concerné de continuer leur collaboration et qu’il était mis fin à la procédure de conciliation.

12 Par courrier du 19 avril 2017, l’AHCC a notifié à la requérante son intention de résilier son contrat sur le fondement de l’article 139, paragraphe 1, sous d), du RAA, compte tenu de la rupture du lien de confiance avec le député concerné, et a invité la requérante à lui présenter d’éventuelles observations, ce que celle-ci a fait par un courriel du 26 avril 2017.

13 Par courrier du 26 juin 2017, l’AHCC a indiqué à la requérante que, compte tenu de sa maladie attestée par plusieurs certificats médicaux et du certificat de grossesse reçu le 9 janvier 2017, la procédure était suspendue en ce qui concerne la demande de résiliation jusqu’à la fin de son congé de maternité.

14 Par décision du 28 septembre 2017, l’AHCC a décidé de résilier le contrat de la requérante (ci-après la « décision attaquée »). Cette décision indiquait notamment : « Dans la mesure où la confiance est la base de la relation entre le Membre et son assistant parlementaire accrédité, j’ai décidé de résilier votre contrat conformément à l’article 139, paragraphe 1, sous d), du RAA, pour les motifs de rupture du lien de confiance en raison d’une performance insatisfaisante dans l’exercice des fonctions, principalement en raison de difficultés de communication avec les collègues et du non-respect de l’autorité de la représentante du député [concerné] dans le cabinet : gestion déficiente des comptes de messagerie électronique du [député concerné] (activation du message automatique d’absence du bureau, courriel effacé avec des enregistrements radio), gestion déficiente de l’agenda du [député concerné] (en ce qui concerne certaines réunions - réunion extraordinaire des coordinateurs, réunion informelle, confirmation d’une invitation à un dîner d’ambassade). » Ladite décision précisait que le contrat prendrait fin à l’expiration de la période de préavis, laquelle commencerait après la fin du congé de maternité de la requérante.

15 Par courrier du 8 novembre 2017, la requérante a introduit une réclamation préalable à l’encontre de la décision attaquée au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), applicable par analogie aux assistants parlementaires accrédités en vertu du renvoi au titre VII du statut figurant à l’article 138 du RAA.

16 Par décision du 4 avril 2018 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »), le secrétaire général du Parlement a rejeté la réclamation préalable. Les commentaires du 17 février 2017 du député concerné étaient annexés à cette décision.

Procédure et conclusions des parties

17 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 juillet 2018, la requérante a introduit le présent recours.

18 Les parties n’ayant pas demandé la tenue d’une audience de plaidoiries au titre de l’article 106, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal (neuvième chambre), s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier de l’affaire, a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

19 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

- annuler la décision attaquée et, le cas échéant, la décision de rejet de la réclamation ;

- condamner le Parlement à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;

- condamner le Parlement aux dépens.

20 Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours comme étant non fondé ;

- condamner la requérante aux dépens.

En droit

Sur les conclusions en annulation

21 À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir, en ce sens, arrêts du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8, et du 6 avril 2006, Camós Grau/Commission, T-309/03, EU:T:2006:110, point 43).

22 En l’espèce, étant donné que la décision de rejet de la réclamation ne fait que confirmer la décision attaquée, il convient de constater que les conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation sont dépourvues de contenu autonome et qu’il n’y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur celles-ci. Toutefois, dans l’examen de la légalité de la décision attaquée, il est nécessaire de prendre en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation, cette motivation étant censée coïncider avec celle de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T-377/08 P, EU:T:2009:485, points 58 et 59 et jurisprudence citée).

23 La requérante soulève cinq moyens au soutien de ses conclusions en annulation : le premier, tiré de la violation des droits de la défense, notamment du droit d’être entendu, et de la violation de l’obligation de motivation ; le deuxième, tiré de la violation des dispositions relatives à la procédure de conciliation, notamment des articles 23 et 25 des mesures d’application du titre VII du RAA ; le troisième, tiré de la violation de l’article 1er quinquies du statut, des articles 21 et 23 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du...

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