Arrêts nº T-100/18 of Tribunal General de la Unión Europea, December 19, 2019

Resolution DateDecember 19, 2019
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-100/18

Fonction publique - Personnel de la BCE - Rémunération - Indemnité de dépaysement - Suppression - Responsabilité - Préjudices matériel et moral - Faute de service

Dans l’affaire T-100/18,

Christine Wehrheim, demeurant à Offenbach (Allemagne), représentée par Me N. de Montigny, avocate,

partie requérante,

contre

Banque centrale européenne (BCE), représentée par M. F. von Lindeiner et Mme A. Andrzejewska, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et sur l’article 50 bis du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et tendant à obtenir réparation des préjudices matériel et moral que la requérante aurait prétendument subis du fait de l’erreur commise par la BCE lors de la fixation de ses droits pécuniaires au moment de son engagement ayant entraîné l’octroi d’une indemnité de dépaysement qui a ensuite été supprimée,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. E. Buttigieg, faisant fonction de président, B. Berke (rapporteur) et Mme M. J. Costeira, juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 14 mai 2019,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1 Le 1er juillet 2014, la requérante, Mme Christine Wehrheim, de nationalité allemande et finlandaise, a commencé à travailler à la Banque centrale européenne (BCE) à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), après avoir pu bénéficier d’un congé de convenance personnelle accordé par la Commission européenne dont elle était une fonctionnaire affectée à Bruxelles (Belgique). Elle a été engagée sur la base d’un contrat d’une durée de trois années avec un classement au dernier échelon de la bande de salaire C. À la suite d’un congé pour maladie pris par la requérante du 27 mars au 17 juillet 2015, la fin de son contrat à durée déterminée a été reportée au 22 octobre 2017 au lieu du 30 juin 2017. À partir du 23 octobre 2017, la requérante a poursuivi son activité à la BCE dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, avec maintien de son salaire.

2 Avant de décider de quitter son poste à Bruxelles pour travailler à la BCE, la requérante avait échangé plusieurs courriels avec le service des ressources humaines de la BCE concernant les conditions de son recrutement. Elle avait ainsi été informée, après examen de sa situation, qu’elle aurait le droit à une indemnité de dépaysement qui lui a effectivement été versée à partir du 1er juillet 2014.

3 Le 7 juillet 2016, l’administration de la BCE a informé la requérante que l’indemnité de dépaysement lui avait été accordée par erreur et qu’il pourrait lui être demandé de rembourser cette indemnité indûment perçue depuis son entrée en service à la BCE.

4 Par une lettre du 13 mars 2017 (ci-après la « décision du 13 mars 2017 »), l’administration de la BCE a indiqué à la requérante qu’elle arrêterait le versement de l’indemnité de dépaysement à partir du mois d’avril 2017 dans la mesure où les conditions prévues à l’article 17 des conditions d’emploi du personnel de la BCE adoptées par la décision 1999/330/CE de la BCE, du 9 juin 1998, relative à l’adoption des conditions d’emploi du personnel de la BCE, modifiée le 31 mars 1999 (JO 1999, L 125, p. 32, ci-après les « conditions d’emploi »), et à l’article 3.7.2 des règles applicables au personnel de la BCE (ci-après les « règles du personnel ») n’étaient pas remplies.

5 La BCE a finalement renoncé à demander le remboursement de l’indemnité de dépaysement versée entre juillet 2014 et mars 2017.

6 Par un courrier du 29 mars 2017, la requérante a écrit à la directrice générale des ressources humaines de la BCE dans le but de trouver une solution amiable afin de réparer cette perte pécuniaire qu’elle estimait injuste. À cette fin, elle a proposé à la BCE de la reclasser au premier échelon de la bande de salaire supérieure, à savoir la bande D, ce qui devait augmenter son salaire d’environ 500 euros et a ajouté qu’elle était disposée à accepter toute autre solution lui permettant de maintenir le niveau de son salaire initial.

7 Par un courriel du 12 avril 2017, la directrice générale adjointe de la BCE a accusé réception de la lettre datée du 29 mars 2017. Tout en présentant ses excuses pour l’erreur commise, elle a expliqué que, après avoir analysé soigneusement la situation, il était impossible de donner une suite favorable au courrier de la requérante.

8 Par un courrier du 10 mai 2017, la requérante a introduit une demande d’examen précontentieux auprès de la directrice générale des ressources humaines de la BCE en application de l’article 41 des conditions d’emploi du personnel. Premièrement, elle a, à titre principal, demandé l’annulation de la décision du 13 mars 2017, réceptionnée le 15 mars suivant, en invoquant la violation d’une condition essentielle de son contrat de travail et, à titre subsidiaire, au cas où la décision contestée serait maintenue, a demandé son reclassement à un échelon supérieur de la bande salariale D. Deuxièmement, elle a réclamé, au titre de son préjudice matériel, la prise en charge des frais de déménagement et de déplacement résultant de sa recherche d’un nouvel appartement à concurrence de la somme de 1 079,10 euros. Troisièmement, elle a indiqué qu’elle se réservait le droit de réclamer le remboursement des frais médicaux, estimés à 1 238,87 euros à la date de ce courrier, qui correspondaient aux frais engagés depuis juillet 2016, soit à partir du moment où l’administration de la BCE l’avait informée de l’erreur qu’elle avait commise en ce qui concernait le paiement de l’indemnité de dépaysement.

9 Par une lettre du 3 juillet 2017 (ci-après la « décision du 3 juillet 2017 »), la BCE, tout en s’excusant de son erreur, a rejeté la demande d’examen précontentieux relative à la décision du 13 mars 2017 et a indiqué qu’elle ne voyait pas de possibilité de promouvoir la requérante à un poste dans la bande salariale D. Par ailleurs, la BCE a accepté de rembourser les frais liés au déménagement de la requérante à condition qu’elle fournisse la preuve de ces frais. En ce qui concerne les frais médicaux et les frais de déplacement pour la recherche d’un appartement, la BCE a relevé que les motifs pour de telles demandes n’étaient pas clairs en raison du fait que la requérante bénéficiait de l’assurance médicale de la BCE et qu’elle avait récemment opté pour un titre de transport public accordant des réductions (ECB Job Ticket).

10 Par un courrier du 3 septembre 2017, la requérante a adressé une réclamation au président de la BCE par laquelle elle réitérait son avis quant à la violation d’un des éléments essentiels du contrat qu’elle avait signé avec la BCE et alléguait également une violation de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dans la mesure où elle n’aurait pas été entendue avant l’adoption de la décision du 13 mars 2017. Elle a ainsi demandé l’annulation des décisions du 13 mars 2017 et du 3 juillet 2017 et, dans l’hypothèse où la décision du 13 mars 2017 serait maintenue, elle a demandé une promotion à un poste de la bande de salaire D lui permettant d’augmenter son salaire de 500 euros environ.

11 Dans cette même réclamation, la requérante a réitéré sa demande de paiement, au titre du préjudice matériel, des frais de déménagement et de déplacement liés à la recherche d’un appartement en précisant qu’elle réclamait le paiement d’une somme forfaitaire de 1 000 euros s’ajoutant au montant de 1 079,10 euros déjà demandé parce qu’elle devait, une nouvelle fois, changer d’appartement. En outre, la requérante a indiqué qu’elle réclamait le remboursement du montant des frais médicaux non pris en charge par l’assurance médicale de la BCE, à savoir 20 % de ces frais. Enfin, la requérante a demandé au président de la BCE de lui accorder une compensation financière adéquate en cas de rejet de sa réclamation pour le préjudice moral qu’elle estimait avoir subi à cause du stress et de l’incertitude de sa situation, soulignant également qu’elle subirait une perte financière significative pour les années futures.

12 Par un courrier du 24 octobre 2017 adressé au président de la BCE, la requérante a indiqué qu’elle renonçait à sa demande d’annulation de la décision du 13 mars 2017 tout en déclarant maintenir sa demande de compensation financière basée sur la faute que la BCE avait, à son avis, commise en l’informant, lors de l’échange de courriels en février 2014, avant qu’elle ne rentre au service de la BCE, qu’elle avait le droit à l’indemnité de dépaysement. À cet égard, la requérante a évalué son préjudice matériel en calculant la différence entre sa rémunération avec et sans l’indemnité de dépaysement à partir d’avril 2017 et jusqu’à la fin de sa carrière au sein de la BCE. En outre, la requérante a réclamé la réparation d’autres dommages comprenant des frais de déménagement ainsi qu’un préjudice psychologique résultant du stress et de la médication complémentaire. Elle a estimé cette partie du préjudice à 2 000 euros.

13 Par un courriel du 6 novembre 2017, le service juridique de la BCE a demandé à la requérante de lui confirmer la compréhension de son courrier du 24 octobre 2017. De même, la requérante a été informée que, dans ces conditions, le délai initialement prévu pour donner une réponse à la réclamation, soit le 2 novembre 2017, ne serait pas maintenu. Aucune réponse n’a été donnée à ce courriel.

14 Par décision du 21 décembre 2017, le président de la BCE a rejeté tant les demandes formulées par la requérante dans la lettre du 3 septembre 2017 que celles formulées dans la lettre du 24 octobre 2017.

Procédure et conclusions des parties

15 Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 20 février 2018, la requérante a introduit le présent recours.

16 Le 2 mai 2018, la BCE a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense.

17 Le 10 juillet 2018, la requérante a déposé au greffe du Tribunal la réplique.

18 Le 12 septembre...

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