European Commission v Federal Republic of Germany.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date08 February 2018


ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

8 février 2018 (*)

« Manquement d’État – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 73 – Base d’imposition – Articles 306 à 310 – Régime particulier des agences de voyages – Exclusion de ce régime des ventes aux entreprises assujetties – Détermination globale de la base d’imposition pour une période donnée – Incompatibilité »

Dans l’affaire C‑380/16,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 8 juillet 2016,

Commission européenne, représentée par Mme M. Owsiany-Hornung et par M. M. Wasmeier, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. T. Henze et R. Kanitz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par :

Royaume des Pays-Bas, représenté par Mmes M. K. Bulterman, C. S. Schillemans et B. Koopman, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. C. G. Fernlund (rapporteur), président de chambre, MM. A. Arabadjiev et E. Regan, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 73 et des articles 306 à 310 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »), en excluant les services de voyage fournis à des assujettis, qui les utilisent pour le compte de leur entreprise, du régime particulier de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux agences de voyages et en autorisant celles-ci, dans la mesure où elles sont soumises audit régime, à déterminer la base d’imposition de la TVA de manière globale pour des groupes de services ou pour l’ensemble des services fournis au cours d’une période d’imposition.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

2 L’article 73 de la directive TVA dispose :

« Pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées aux articles 74 à 77, la base d’imposition comprend tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations. »

3 Le chapitre 3 de cette directive, intitulé « Régime particulier des agences de voyages », comprend les articles 306 à 310 de ladite directive. Ledit article 306 énonce :

« 1. Les États membres appliquent un régime particulier de la TVA aux opérations des agences de voyages conformément au présent chapitre, dans la mesure où ces agences agissent en leur propre nom à l’égard du voyageur et lorsqu’elles utilisent, pour la réalisation du voyage, des livraisons de biens et des prestations de services d’autres assujettis.

Le présent régime particulier n’est pas applicable aux agences de voyages qui agissent uniquement en qualité d’intermédiaire et auxquelles s’applique, pour calculer la base d’imposition, l’article 79, premier alinéa, point c).

2. Aux fins du présent chapitre, les organisateurs de circuits touristiques sont considérés comme agences de voyages. »

4 L’article 307 de la directive TVA prévoit :

« Les opérations effectuées, dans les conditions prévues à l’article 306, par l’agence de voyages pour la réalisation du voyage sont considérées comme une prestation de services unique de l’agence de voyages au voyageur.

La prestation unique est imposée dans l’État membre dans lequel l’agence de voyages a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel elle a fourni la prestation de services. »

5 L’article 308 de cette directive dispose :

« Pour la prestation de services unique fournie par l’agence de voyages, est considérée comme base d’imposition et comme prix hors TVA, au sens de l’article 226, point 8), la marge de l’agence de voyages, c’est-à-dire la différence entre le montant total, hors TVA, à payer par le voyageur et le coût effectif supporté par l’agence de voyages pour les livraisons de biens et les prestations de services d’autres assujettis, dans la mesure où ces opérations profitent directement au voyageur. »

6 L’article 309 de ladite directive énonce :

« Si les opérations pour lesquelles l’agence de voyages a recours à d’autres assujettis sont effectuées par ces derniers en dehors de la Communauté, la prestation de services de l’agence est assimilée à une activité d’intermédiaire exonérée en vertu de l’article 153.

Si les opérations visées au premier alinéa sont effectuées tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Communauté, seule doit être considérée comme exonérée la partie de la prestation de services de l’agence de voyages qui concerne les opérations effectuées en dehors de la Communauté. »

7 L’article 310 de la même directive dispose :

« Les montants de la TVA qui sont portés en compte à l’agence de voyages par d’autres assujettis pour les opérations qui sont visées à l’article 307 et qui profitent directement au voyageur ne sont ni déductibles, ni remboursables dans aucun État membre. »

Le droit allemand

8 L’article 25 de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires, ci-après l’« UStG »), intitulé « Taxation des services de voyages », dispose :

« (1) Les dispositions suivantes sont applicables aux services de voyage d’un entrepreneur qui ne sont pas destinés à l’entreprise du preneur, dans la mesure où l’entrepreneur agit, ce faisant, en son propre nom à l’égard du preneur et qu’il utilise des services de voyage intermédiaires. Le service de l’entrepreneur doit être considéré comme un autre service. [...]

(2) L’autre service est exonéré, dans la mesure où les services de voyage intermédiaires qui y sont relatifs sont exécutés sur le territoire d’un État tiers. La condition de l’exonération doit être prouvée par l’entrepreneur. Le ministère fédéral des finances peut déterminer, avec l’accord du Bundesrat et par voie réglementaire, la manière dont l’entrepreneur doit apporter cette preuve.

(3) La valeur d’un autre service correspond à la différence entre le montant payé par le preneur en vue de l’obtention du service et le montant que l’entrepreneur paie pour les services de voyage intermédiaires. La taxe sur la valeur ajoutée ne fait pas partie de la base d’imposition. L’entrepreneur peut, au lieu de calculer la base d’imposition pour chaque service, le faire soit pour des groupes de services soit pour l’ensemble des services fournis au cours de la période d’imposition.

(4) Par dérogation à l’article 15, paragraphe 1, l’entrepreneur n’est pas autorisé à déduire, comme TVA collectée en amont, les montants de la taxe qui ont été portés à son compte, de manière séparée, pour les services de voyage intermédiaires, ainsi que les montants de taxe qui sont dus en vertu de l’article 13 b. Par ailleurs, l’article 15 n’est pas affecté.

(5) Pour les autres services, l’article 22 s’applique, étant entendu que la comptabilité de l’entrepreneur doit faire apparaître :

1. le montant que le preneur paie pour le service,

2. les montants que l’entrepreneur paie pour les services de voyage intermédiaires,

3. la base d’imposition établie au paragraphe 3 et

4. la manière dont les montants visés aux points 1 et 2 et la base d’imposition établie au paragraphe 3 se répartissent entre services imposables et services exonérés. »

9 En 2010, le Bundesministerium der Finanzen (ministère fédéral des finances, Allemagne) a adopté l’Umsatzsteuer-Anwendungserlass (instruction relative à l’application de la taxe sur le chiffre d’affaires) (BStBl I p. 846), qui prévoit, à sa section 25.1, paragraphe 2, en ce qui concerne cet article 25 de l’UStG :

« Étant donné que l’article 25 de l’UStG ne s’applique pas si les services de voyage d’un entrepreneur sont destinés à l’entreprise du preneur, les transactions en chaîne [...] et les voyages de gratification […], en particulier, ne sont pas soumis en amont à la taxation prévue à l’article 25 de l’UStG […]. Dans ces cas, la taxation est régie par les dispositions générales de l’UStG. [...] »

10 La section 25.3, paragraphe 7, de cette instruction énonce :

« Les facilités en ce qui concerne le calcul de la base d’imposition conformément à l’article 25, paragraphe 3, de l’UStG ne portent pas atteinte à l’obligation de transmettre des déclarations provisoires. Dans la mesure où, dans ces cas, le montant de la marge pour les opérations effectuées au cours de la période de la déclaration provisoire n’est pas encore établi, rien ne s’oppose à ce que l’entrepreneur s’appuie, dans la déclaration provisoire, sur des estimations de la base d’imposition qui se fondent sur le calcul ou sur des règles d’expérience des années précédentes. Il en va de même dans les cas où, bien que l’entrepreneur détermine la marge pour chaque service, à la fin de la période de déclaration provisoire, le montant du service de voyage intermédiaire n’est pas encore connu pour les services fournis au cours de cette période. Il convient de garantir qu’une fois la base d’imposition établie de manière définitive, il n’y ait pas régulièrement de paiements finaux plus élevés. »

La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

11 Le 28 février 2012, la Commission a adressé une lettre de mise en demeure à la République fédérale d’Allemagne, informant cette dernière que l’exclusion des services de voyages fournis à des entreprises clientes, qui les utilisent pour leur propre compte, du régime particulier de la TVA applicable aux agences de voyages, tel que visé par le chapitre 3 de la directive TVA (ci-après le « régime particulier »), contrevient à cette directive. La République fédérale d’Allemagne y...

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