Banco Primus SA v Jesús Gutiérrez García.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date26 January 2017
62014CJ0421

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

26 janvier 2017 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Directive 93/13/CEE — Contrats conclus entre professionnels et consommateurs — Clauses abusives — Contrats de prêt hypothécaire — Procédure de saisie d’un bien hypothéqué — Délai de forclusion — Office des juridictions nationales — Autorité de la chose jugée»

Dans l’affaire C‑421/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de Primera Instancia no 2 de Santander (tribunal de première instance no 2 de Santander, Espagne), par décision du 10 septembre 2014, parvenue à la Cour le 10 septembre 2014, dans la procédure

Banco Primus SA

contre

Jesús Gutiérrez García,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, vice-président de la Cour, faisant fonction de président de la première chambre, Mme M. Berger, MM. A. Borg Barthet, S. Rodin (rapporteur) et F. Biltgen, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 septembre 2015,

considérant les observations présentées :

pour Banco Primus SA, par M. E. Vázquez Martín, abogado,

pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. García-Valdecasas Dorrego, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par MM. J. Baquero Cruz et M. van Beek, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 2 février 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Banco Primus SA à M. Jesús Gutiérrez García au sujet de la saisie du bien immobilier de ce dernier, hypothéqué en garantie d’un prêt octroyé par Banco Primus.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les seizième et vingt-quatrième considérants de la directive 93/13 énoncent :

« considérant [...] que l’exigence de bonne foi peut être satisfaite par le professionnel en traitant de façon loyale et équitable avec l’autre partie dont il doit prendre en compte les intérêts légitimes ;

[...]

considérant que les autorités judiciaires et organes administratifs des États membres doivent disposer de moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’application de clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ».

4

L’article 1er, paragraphe 1, de cette directive dispose :

« La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur. »

5

L’article 3 de ladite directive est ainsi libellé :

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2. Une clause est toujours considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n’a, de ce fait, pas pu avoir d’influence sur son contenu, notamment dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

[...] »

6

Aux termes de l’article 4 de la directive 93/13 :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

7

L’article 6, paragraphe 1, de cette directive prévoit :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

8

Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de ladite directive :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

Le droit espagnol

9

La Ley 1/2000, de Enjuiciamiento Civil (loi 1/2000, relative au code de procédure civile), du 7 janvier 2000 (BOE no 7, du 8 janvier 2000, p. 575), a été modifiée par la Ley 1/2013, de medidas para reforzar la protección a los deudores hipotecarios, reestructuración de deuda y alquiler social (loi 1/2013, relative aux mesures visant à renforcer la protection des débiteurs hypothécaires, la restructuration de la dette et le loyer social), du 14 mai 2013 (BOE no 116, du 15 mai 2013, p. 36373), puis par le Real Decreto-Ley 7/2013, de medidas urgentes de naturaleza tributaria, presupuestaria y de fomento de la investigación, el desarrollo y la innovación (décret-loi 7/2013, portant mesures urgentes de nature fiscale et budgétaire et promouvant la recherche, le développement et l’innovation), du 28 juin 2013 (BOE no 155, du 29 juin 2013, p. 48767), puis par le Real Decreto-ley 11/2014, de medidas urgentes en materia concursal (décret-loi 11/2014, portant mesures urgentes en matière de faillite), du 5 septembre 2014 (BOE no 217, du 6 septembre 2014, p. 69767) (ci-après la « LEC »).

10

L’article 695 de la LEC, relatif à la procédure d’opposition à la saisie d’immeubles grevés d’une hypothèque, est libellé comme suit :

« 1. Dans les procédures visées au présent chapitre, l’opposition à l’exécution formée par le défendeur n’est accueillie que lorsqu’elle est fondée sur les motifs suivants :

[...]

4)

le caractère abusif d’une clause contractuelle constituant le fondement de l’exécution ou ayant permis de déterminer le montant exigible.

[...]

4. La décision ordonnant le [...] rejet de l’opposition pour le motif prévu au paragraphe 1, point 4, du présent article est susceptible d’un recours en appel.

En dehors de cette hypothèse, les décisions statuant sur l’opposition visée au présent article ne sont susceptibles d’aucun recours et leurs effets sont exclusivement limités à la procédure d’exécution dans le cadre de laquelle elles sont rendues. »

11

En vertu de l’article 556, paragraphe 1, de la LEC, l’opposition pour un des motifs visés à l’article 695 de la LEC doit être formée dans un délai de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance d’exécution.

12

Aux termes de l’article 557, paragraphe 1, de la LEC, relatif à la procédure d’opposition à l’exécution fondée sur des titres non judiciaires ou arbitraux :

« Lorsque l’exécution est ordonnée pour les titres visés à l’article 517, paragraphe 2, points 4, 5, 6 et 7, ainsi que pour d’autres documents ayant force exécutoire visés à l’article 517, paragraphe 2, point 9, le défendeur à l’exécution ne peut s’y opposer, dans les délais et formes prévus à l’article précédent, que s’il invoque l’un des motifs suivants :

[...]

7)

Le titre contient des clauses abusives. »

13

Aux termes de l’article 693, paragraphe 2, de la LEC, relatif à l’exigibilité anticipée des dettes à paiement fractionné :

« Si le contrat prévoit qu’en cas de défaut de paiement d’au moins trois mensualités ou d’absence d’un nombre de versements tel qu’il implique que le débiteur a manqué à son obligation pour une période de trois mois au moins, et pour autant que cet accord figure dans l’acte constitutif du prêt, le bailleur pourra réclamer l’ensemble de la dette au titre du capital et des intérêts. »

14

La première disposition transitoire de la loi 1/2013 énonce :

« La présente loi s’appliquera aux procédures judiciaires ou extra judiciaires d’exécution portant sur un bien grevé d’une hypothèque, en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi, pourvu que la décision d’expulsion n’ait pas été mise à exécution. »

15

Aux termes de la quatrième disposition transitoire de ladite loi :

« 1.

Les modifications de la [loi 1/2000, du 7 janvier 2000, relative au code de procédure civile] introduites par la présente loi s’appliquent aux procédures d’exécution en cours à la date de son entrée en vigueur, uniquement en ce qui concerne les mesures d’exécution restant à prendre.

2.

En tout état de cause, dans les procédures d’exécution en cours à la date d’entrée en vigueur de la présente loi dans lesquelles le délai d’opposition de dix jours prévu à l’article 556, paragraphe 1, de la [loi 1/2000, du 7 janvier 2000, relative au code de procédure civile] a expiré, les parties défenderesses à l’exécution disposent d’un délai de forclusion d’un mois pour former opposition par voie incidente extraordinaire en se fondant sur les nouveaux motifs d’opposition prévus aux articles 557, paragraphe 1, point 7, et...

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