European Commission v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date11 December 2014

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

11 décembre 2014 (*)

«Manquement d’État – Article 49 TFUE – Liberté d’établissement – Entreprises portuaires – Gestion des travailleurs pour la prestation du service de manutention de marchandises – Interdiction de recourir au marché du travail»

Dans l’affaire C‑576/13,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 14 novembre 2013, dans la procédure

Commission européenne, représentée par Mmes L. Nicolae et S. Pardo Quintillán, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume d’Espagne, représenté par M. A. Rubio González, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. A. Borg Barthet, faisant fonction de président de la sixième chambre, Mme M. Berger et M. F. Biltgen (rapporteur), juges,

avocat général: M. M. Szpunar,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en obligeant, de manière générale, les entreprises de manutention de marchandises opérant dans les ports espagnols d’intérêt général à s’inscrire auprès d’une société anonyme de gestion des dockers («Sociedad Anónima de Gestion de Estibadores Portuarios», ci-après la «SAGEP») et, en tout état de cause, en ne les autorisant pas à recourir au marché du travail pour recruter leur propre personnel, à titre permanent ou temporaire, à moins que les travailleurs proposés par cette société ne conviennent pas ou que leur nombre soit insuffisant, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE.

Le cadre juridique espagnol

2 En droit espagnol, les prestations de services dans les ports d’État relèvent de la compétence de l’administration générale de l’État, qui est exercée par le ministère de l’Équipement et des Transports au moyen d’un système portuaire public composé des ports d’État et des autorités portuaires.

3 Les prestations de services dans les ports d’État sont réglementées par le texte codifié de la loi relative aux ports d’État et à la marine marchande, tel qu’approuvé par le décret royal législatif 2/2011, du 5 septembre 2011 (BOE n° 253, du 20 octobre 2011, p. 109456, ci-après la «loi sur les ports d’État»). Cette loi opère une codification des différentes dispositions légales relatives aux matières portuaires et à la marine marchande, au nombre desquelles figurent la loi 48/2003, du 26 novembre 2003, relative au régime économique et à la prestation de services dans les ports d’intérêt général (BOE n° 284, du 27 novembre 2003, p. 42126, ci-après la «loi 48/2003»), ainsi que la loi 33/2010, du 5 août 2010 (BOE n° 191, du 7 août 2010, p. 68986, ci-après la «loi 33/2010»), modifiant ladite loi 48/2003 et abrogeant le décret-loi royal 2/1986, du 23 mai 1986, relatif au service public d’arrimage et de désarrimage des navires (BOE n° 126, du 27 mai 1986, p. 18800).

4 L’article 108 de la loi sur les ports d’État prévoit:

«1. Constituent des services portuaires les activités de prestation des services nécessaires à l’exploitation des ports et visant à permettre la réalisation des opérations associées au trafic maritime, dans des conditions de sécurité, d’efficacité, de régularité, de continuité et de non-discrimination, et qui sont exercées dans le domaine territorial des autorités portuaires.

2. Les services suivants sont considérés comme services portuaires:

[...]

d) service de manutention de marchandises, à savoir le chargement, l’arrimage, le déchargement, le désarrimage, le transit maritime et le transbordement de marchandises.»

5 L’article 109 de ladite loi est libellé comme suit:

«1. La prestation des services portuaires est mise en œuvre sur la base d’une initiative privée et sera régie par le principe de la libre concurrence, sous réserve des exceptions prévues par la présente loi.

2. La prestation des services portuaires est subordonnée à l’obtention de la licence correspondante délivrée par l’autorité portuaire, qui ne peut être délivrée qu’après approbation du cahier des prescriptions particulières du service correspondant.

La licence ne confère pas le droit de fournir le service en exclusivité.

[...]»

6 L’article 110 de la loi sur les ports d’État définit les obligations de service public portuaire comme des obligations de service public dont doivent impérativement s’acquitter tous les prestataires de services dans les conditions prévues dans leurs titres respectifs les habilitant à exercer leurs activités, notamment, selon le second alinéa du même article, sous b), la continuité et la régularité des services en fonction des caractéristiques de la demande, sauf cas de force majeure. Il est également précisé à cette disposition que, pour garantir la continuité dans la prestation du service, les autorités portuaires peuvent organiser des services minimaux à caractère obligatoire.

7 L’article 115 de la loi sur les ports d’État régit la procédure d’octroi de la licence de prestation du service portuaire. Conformément à l’article 117, paragraphe 1, sous n), de cette même loi, les licences du service portuaire de manutention des marchandises doivent indiquer le pourcentage minimal de travailleurs devant être recrutés sous le statut de droit commun.

8 L’article 142, paragraphe 1, de ladite loi prévoit que, dans les ports d’intérêt général, pourra être constituée, sans préjudice de la conversion des sociétés publiques d’arrimage et de désarrimage et des groupements portuaires d’intérêt économique existant à la date de l’entrée en vigueur de la loi 33/2010, une société commerciale anonyme de droit privé dont l’objet social est de gérer la mise à disposition de ses actionnaires des travailleurs recrutés par elle et auxquels ces actionnaires font appel pour exercer les activités et les tâches du service portuaire de manutention de marchandises qui ne peuvent être exécutées par leur propre personnel, en raison de l’irrégularité de la main-d’œuvre nécessaire à l’exercice des activités comprises dans ledit service portuaire. Les sociétés concernées pourront ainsi mettre à la disposition de leurs actionnaires des travailleurs destinés à l’exercice d’activités commerciales soumises à autorisation dans la zone de service portuaire. De même, elles devront aussi veiller à la formation continue des travailleurs, de manière à permettre de garantir la professionnalisation voulue dans l’exercice des activités constituant le service de manutention des marchandises.

9 L’article 142, paragraphe 3, de la même loi précise que ces sociétés sont dénommées SAGEP, ce sigle étant réservé à cette catégorie de sociétés.

10 Aux termes de l’article 143, paragraphe 1, de la loi sur les ports d’État:

«Toutes les entreprises souhaitant fournir le service portuaire de manutention de marchandises et ayant obtenu la licence correspondante doivent, le cas échéant, s’inscrire auprès d’une [SAGEP] et participer à son capital. Sont exemptées de cette exigence les entreprises possédant une licence permettant d’exercer en régime d’autoprestation.

Le titulaire d’une licence pour le service portuaire de manutention de marchandises qui n’est pas tenu de participer à une SAGEP en tant qu’actionnaire conformément à l’alinéa précédent doit:

recruter sous le statut de droit commun un nombre de travailleurs de la SAGEP correspondant au nombre de journées de travail effectuées pour ce titulaire l’année précédente dans le secteur du service portuaire de manutention de marchandises [...]

Lorsque le candidat à une licence d’autoprestation ne fait pas partie de la SAGEP ou, le cas échéant, du [groupement portuaire d’intérêt économique constitué conformément à l’article 85, paragraphe 6, de la loi 48/2003], ou de la [société publique d’arrimage et de désarrimage correspondante, constituée conformément à l’article 7, paragraphe 1, du décret royal 2/1986], il doit, préalablement à sa demande de licence, proposer en premier lieu de recruter sous le statut de droit commun les travailleurs nécessaires à l’exercice des activités et tâches de ce service au moyen d’offres, nominatives ou non, adressées aux travailleurs de ladite société. [...]

[...]»

11 Le paragraphe 5 dudit article 143 prévoit qu’aucun titulaire d’une licence de prestation du service portuaire de manutention de marchandises ne peut quitter la SAGEP, sauf dans les cas d’exemption prévus au paragraphe 1 du même article.

12 Les articles 149 et 150 de la loi sur les ports d’État précisent de manière détaillée les types de statuts applicables aux travailleurs du service portuaire de manutention de marchandises.

13 Ledit article 149 dispose que le régime contractuel desdits travailleurs peut être négocié avec la SAGEP, ceux-ci bénéficiant d’un statut spécial. Dans ce cas, les...

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