Spetsializirana prokuratura v ZX.

JurisdictionEuropean Union
Date21 October 2021
CourtCourt of Justice (European Union)
62020CJ0282

ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

21 octobre 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Directive 2012/13/UE – Droit à l’information dans le cadre des procédures pénales – Article 6, paragraphe 3 – Droits des suspects ou des personnes poursuivies d’être informés de leurs droits – Articles 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Législation nationale ne prévoyant pas de voie procédurale pour remédier après une audience préliminaire aux imprécisions et aux lacunes entachant le contenu de l’acte d’accusation »

Dans l’affaire C‑282/20,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie), par décision du 22 juin 2020, parvenue à la Cour le 26 juin 2020, dans la procédure pénale engagée contre

ZX,

en présence de

Spetsializirana prokuratura,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. C. Lycourgos (rapporteur), président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la dixième chambre, MM. I. Jarukaitis et M. Ilešič, juges,

avocat général : M. A. Rantos,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil ainsi que par Mme T. Machovičová, en qualité d’agents,

pour le gouvernement hongrois, par M. M. Fehér et Mme M. Tátrai, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. P. Van Nuffel, M. Wasmeier et I. Zaloguin, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales (JO 2012, L 142, p. 1), et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre ZX pour détention de fausse monnaie.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 14 et 41 de la directive 2012/13 énoncent :

« (14)

[...] [La présente directive] fixe des normes minimales communes à appliquer en matière d’information des personnes soupçonnées d’une infraction pénale ou poursuivies à ce titre, sur leurs droits et sur l’accusation portée contre elles, en vue de renforcer la confiance mutuelle entre les États membres. Elle s’appuie sur les droits énoncés dans la [C]harte, et notamment ses articles 6, 47 et 48, en développant les articles 5 et 6 de la [convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (CEDH)] tels qu’ils sont interprétés par la Cour européenne des droits de l’homme. [...]

[...]

(41)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus par la [C]harte. Elle tend notamment à promouvoir le droit à la liberté, le droit à un procès équitable et les droits de la défense. Elle devrait être mise en œuvre en conséquence. »

4

L’article 6 de cette directive, intitulé « Droit d’être informé de l’accusation portée contre soi », dispose, à ses paragraphes 3 et 4 :

« 3. Les États membres veillent à ce que des informations détaillées sur l’accusation, y compris sur la nature et la qualification juridique de l’infraction pénale, ainsi que sur la nature de la participation de la personne poursuivie, soient communiquées au plus tard au moment où la juridiction est appelée à se prononcer sur le bien-fondé de l’accusation.

4. Les États membres veillent à ce que les suspects ou les personnes poursuivies soient rapidement informés de tout changement dans les informations fournies en vertu du présent article, lorsque cela est nécessaire pour garantir le caractère équitable de la procédure. »

Le droit bulgare

5

L’article 246, paragraphes 2 et 3, du Nakazatelno-protsesualen kodeks (code de procédure pénale) prévoit :

« 2. Dans la partie circonstancielle du réquisitoire, sont indiqués : l’infraction commise par l’accusé ; le temps, le lieu et la manière dont elle a été commise ; la victime et le montant du préjudice ; [...]

3. dans le dispositif du réquisitoire, sont indiqués : [...] la qualification juridique de l’acte commis [...] »

6

L’article 248, paragraphes 1 et 3, du code de procédure pénale est ainsi libellé :

« (1) Les questions suivantes sont évoquées lors de l’audience préliminaire :

[...]

3. au cours de la procédure préliminaire, une violation des formes substantielles régularisable et ayant entraîné une restriction des droits procéduraux de la personne poursuivie, de la victime ou de leurs ayants droit a-t-elle été commise ?

[...]

(3) Lors de l’audience de jugement devant les juridictions de première instance, d’appel et de cassation, il n’est pas permis de contester des violations des droits procéduraux visés au paragraphe 1, point 3, qui n’ont pas fait l’objet des débats lors de l’audience préliminaire, y compris à l’initiative du juge rapporteur, ou qui sont considérées comme insignifiantes. »

7

Aux termes de l’article 249, paragraphe 2, de ce code :

« Lorsque l’instance est suspendue sur la base de l’article 248, paragraphe 1, point 3, du [code de procédure pénale], la juridiction signifie l’affaire au procureur moyennant une ordonnance indiquant les violations commises. »

8

Conformément à l’article 287, paragraphe 1, dudit code, « [l]e procureur établit une nouvelle accusation lorsqu’il constate, au cours de l’enquête judiciaire, qu’il y a des raisons d’apporter une modification substantielle à la partie factuelle de l’accusation ou d’appliquer une loi sanctionnant des infractions pénales plus graves ». Aux termes du paragraphe 3 de cet article, la modification de l’accusation s’accompagne de garanties de la défense, à savoir que l’affaire est reportée à la demande de la défense afin qu’elle puisse se préparer eu égard à l’accusation modifiée.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9

ZX est pénalement poursuivi en Bulgarie pour avoir détenu, le 19 juillet 2015, de la fausse monnaie ayant cours dans le pays et à l’étranger, à savoir 88 billets de banque de 200 euros dont il savait qu’ils étaient contrefaits, en violation de l’article 244, paragraphe 2, du code pénal, lu en combinaison avec le paragraphe 1 de cet article.

10

Lors de l’audience préliminaire, la régularité du réquisitoire a spécialement fait l’objet des débats. ZX ne l’a pas contestée et la juridiction compétente a décidé que ce réquisitoire était régulier du point de vue formel.

11

Cependant, après avoir recueilli tous les éléments de preuve, lors de l’appréciation de la question de savoir si les conditions pour pouvoir entendre les parties et rendre un jugement étaient remplies, cette juridiction a constaté certaines imprécisions et lacunes dans le réquisitoire qui n’avaient pas été décelées lors de l’audience préliminaire. En effet, tout d’abord, la durée pendant laquelle la personne poursuivie a détenu les 88 billets de banque contrefaits n’aurait pas été indiquée avec précision, ensuite, le réquisitoire aurait décrit de manière incomplète les caractéristiques juridiques de l’acte incriminé et, enfin, il y aurait eu une erreur dans l’indication des dispositions de droit pénal bulgare dont la violation est alléguée.

12

Lors de l’audience de jugement du 12 juin 2020, la juridiction de renvoi a attiré l’attention sur ces vices entachant le réquisitoire. Le Spetsializirana prokuratura (parquet spécialisé, Bulgarie) (ci-après le « procureur ») aurait alors exprimé le désir qu’il y soit remédié immédiatement en modifiant l’accusation. ZX aurait observé que, malgré les vices entachant la qualification juridique des faits, il n’y avait pas de fondement pour procéder à une modification de l’accusation au titre de l’article 287 du code de procédure pénale. ZX aurait proposé à la juridiction de renvoi de corriger ces erreurs dans son jugement afin d’y préciser la bonne qualification juridique de l’infraction.

13

La juridiction de renvoi indique que, dans le cadre de l’affaire au principal, elle est tenue d’apprécier s’il est possible de remédier, compte tenu de la déclaration du procureur lors de l’audience au principal, à ces vices procéduraux du réquisitoire, qu’elle considère comme étant substantiels et comme entravant le bon déroulement du procès pénal.

14

Elle estime, à cet égard, qu’il y aurait eu lieu de constater lesdits vices lors de l’audience préliminaire, de suspendre la procédure juridictionnelle et de renvoyer l’affaire devant le procureur avec instruction d’y remédier et d’établir un nouveau réquisitoire. Or, cela n’a pas été fait. Elle relève encore que, à la suite d’une réforme législative adoptée au cours de l’année 2017 (ci-après la « réforme de 2017 »), il découle de l’article 248, paragraphe 3, du code de procédure pénale qu’une telle possibilité ne peut être exercée qu’au cours de l’audience préliminaire, la loi bulgare ne prévoyant pas de mécanisme pour remédier, après cette audience, à de tels vices entachant le réquisitoire, notamment en renvoyant l’affaire devant le procureur.

15

Dès lors, la juridiction de renvoi expose que la première question préjudicielle porte sur le point de savoir si, après l’audience préliminaire, l’interdiction prévue par la législation nationale de discuter...

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