Emmentaler Switzerland v European Union Intellectual Property Office.

JurisdictionEuropean Union
Date24 May 2023
CourtGeneral Court (European Union)

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

24 mai 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque verbale EMMENTALER – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 – Marque collective – Article 74, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 – Obligation de motivation – Article 94 du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑2/21,

Emmentaler Switzerland, établie à Berne (Suisse), représentée par Mes S. Völker et M. Pemsel, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Graul et M. D. Hanf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. J. Möller, M. Hellmann, U. Bartl et J. Heitz, en qualité d’agents,

par

République française, représentée par Mme A.-L. Desjonquères et M. G. Bain, en qualité d’agents,

et par

Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (CNIEL), établi à Paris (France), représenté par Mes E. Baud et P. Marchiset, avocats,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé, lors des délibérations, de M. A. Kornezov, président, Mme K. Kowalik‑Bańczyk et M. D. Petrlík (rapporteur), juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 14 septembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Emmentaler Switzerland, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 28 octobre 2020 (affaire R 2402/2019-2) (ci-après la « décision attaquée »).

Antécédents du litige

2 Le 4 octobre 2017, la requérante a obtenu auprès du bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle l’enregistrement international portant le numéro 1378524 du signe verbal EMMENTALER. Le 7 décembre 2017, cet enregistrement international a été notifié à l’EUIPO, en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Fromages d’appellation d’origine protégée “emmentaler” ».

4 Par décision du 9 septembre 2019, l’examinatrice a rejeté la demande d’enregistrement, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, de ce règlement.

5 Le 25 octobre 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de l’examinatrice.

6 Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, au motif que la marque demandée était descriptive.

Conclusions des parties

7 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler la décision attaquée ;

– condamner l’EUIPO aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours.

8 L’EUIPO, la République fédérale d’Allemagne, la République française et le Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (CNIEL) concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens.

En droit

9 À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 74, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement.

10 L’article 74, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 prévoit que, par dérogation à l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement, peuvent constituer des marques collectives de l’Union européenne des signes ou indications pouvant servir, dans le commerce, à désigner la provenance géographique des produits ou des services en cause.

11 Toutefois, cette disposition, prévoyant une dérogation au motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, doit être soumise à une interprétation stricte, de sorte que sa portée ne saurait couvrir les signes qui seront considérés comme une indication de l’espèce, de la qualité, de la quantité, de la destination, de la valeur, de l’époque de la production ou d’une autre caractéristique des produits en cause, mais uniquement les signes qui seront considérés comme une indication de la provenance géographique desdits produits [voir, en ce sens, arrêt du 17 mai 2011, Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Álava e.a./OHMI (TXAKOLI), T‑341/09, EU:T:2011:220, points 33 et 35 et jurisprudence citée].

12 Au regard de ces principes, il convient d’examiner tout d’abord le second moyen, par lequel la requérante soutient, notamment, que le signe en cause ne désigne pas une caractéristique des produits en cause, à savoir un type de fromage.

Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001

13 Par son second moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a enfreint l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001. Ce moyen s’articule en deux branches. La première est tirée du fait que la décision attaquée viole l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, puisque cette décision se fonde exclusivement sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement. La seconde est tirée, d’une part, de ce que la chambre de recours aurait procédé à une appréciation erronée des éléments de preuve et aurait ainsi conclu à tort que la marque demandée était descriptive des produits en cause et, d’autre part, de ce qu’elle aurait violé son obligation de motivation.

Sur la première branche, tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

14 Selon l’EUIPO et la République française, la première branche du second moyen est irrecevable, dans la mesure où la requérante soutient que la décision attaquée a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 alors même que cette décision se fonde exclusivement sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement.

15 La requérante estime que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 constitue une lex specialis par rapport à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement, de sorte que le fait que la décision attaquée se fonde exclusivement sur la première de ces dispositions ne revêt aucune importance en l’espèce. Selon la requérante, la décision attaquée ne saurait être fondée uniquement sur une analyse au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, mais devrait également tenir compte de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

16 Selon une jurisprudence constante, chacun des motifs de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 est indépendant des autres et exige un examen séparé [voir arrêts du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 45 et jurisprudence citée, et du 31 janvier 2018, Novartis/EUIPO – SK Chemicals (Représentation d’un timbre transdermique), T‑44/16, non publié, EU:T:2018:48, point 20 et jurisprudence citée].

17 En outre, il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus qui y sont énumérés s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne [voir arrêts du 8 juillet 2008, Lancôme/OHMI – CMS Hasche Sigle (COLOR EDITION), T‑160/07, EU:T:2008:261, point 51 et jurisprudence citée, et du 17 avril 2013, Continental Bulldog Club Deutschland/OHMI (CONTINENTAL), T‑383/10, EU:T:2013:193, point 71 et jurisprudence citée].

18 Au demeurant, selon une jurisprudence constante, une marque qui est descriptive des caractéristiques de produits ou de services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, est, de ce fait, nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement (voir arrêt du 17 avril 2013, CONTINENTAL, T‑383/10, EU:T:2013:193, point 72 et jurisprudence citée).

19 Il s’ensuit que la chambre de recours pouvait se limiter à examiner si la marque demandée était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sans se prononcer sur l’application d’autres motifs absolus de refus, tel que celui prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

20 Par conséquent, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur sa recevabilité, la première branche du second moyen doit être écartée comme non fondée.

Sur la seconde branche, tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 ainsi que de l’obligation de motivation

21 Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci.

22 Ces signes ou indications sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle qui consiste à identifier l’origine commerciale du produit ou du service [arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30 ; du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 37, et...

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