Brian Andrew Kerr contra Pavlo Postnov y Natalia Postnova.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:376
Date08 May 2019
Celex Number62018CJ0025
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-25/18
62018CJ0025

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

8 mai 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions en matière civile et commerciale – Règlement (UE) no 1215/2012 – Article 7, point 1, sous a) – Compétence spéciale en matière contractuelle – Notion de “matière contractuelle” – Décision de l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble – Obligation incombant aux copropriétaires d’acquitter les contributions financières annuelles au budget de la copropriété fixées par cette décision – Action judiciaire tendant à obtenir l’exécution de cette obligation – Loi applicable aux obligations contractuelles – Règlement (CE) no 593/2008 – Article 4, paragraphe 1, sous b) et c) – Notions de “contrat de prestation de services” et de “contrat ayant pour objet un droit réel immobilier” – Décision de l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble relative aux frais d’entretien des parties communes de celui-ci »

Dans l’affaire C‑25/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Okrazhen sad – Blagoevgrad (tribunal régional de Blagoevgrad, Bulgarie), par décision du 19 décembre 2017, parvenue à la Cour le 16 janvier 2018, dans la procédure

Brian Andrew Kerr

contre

Pavlo Postnov,

Natalia Postnova,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteure), vice‑présidente de la Cour, Mme C. Toader, MM. L. Bay Larsen et M. Safjan, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement letton, par Mmes I. Kucina et V. Soņeca, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. M. Wilderspin ainsi que par Mmes M. Heller et Y. Marinova, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 31 janvier 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 7, point 1, sous a), du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1), ainsi que de l’article 4, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) no 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) (JO 2008, L 177, p. 6).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Brian Andrew Kerr à M. Pavlo Postnov et à Mme Natalia Postnova au sujet du non-paiement, par ces derniers, de contributions financières annuelles au budget de la copropriété relatives à un immeuble à appartements, dont M. Kerr, en sa qualité de syndic, assure la gérance.

Le cadre juridique

Le règlement no 1215/2012

3

Les considérants 4, 15 et 16 du règlement no 1215/2012 énoncent :

« (4)

Certaines différences entre les règles nationales en matière de compétence judiciaire et de reconnaissance des décisions rendent plus difficile le bon fonctionnement du marché intérieur. Des dispositions permettant d’unifier les règles de conflit de juridictions en matière civile et commerciale ainsi que de garantir la reconnaissance et l’exécution rapides et simples des décisions rendues dans un État membre sont indispensables.

[...]

(15)

Les règles de compétence devraient présenter un haut degré de prévisibilité et s’articuler autour de la compétence de principe du domicile du défendeur. Cette compétence devrait toujours être disponible, sauf dans quelques cas bien déterminés où la matière en litige ou l’autonomie des parties justifie un autre critère de rattachement. S’agissant des personnes morales, le domicile doit être défini de façon autonome de manière à accroître la transparence des règles communes et à éviter les conflits de compétence.

(16)

Le for du domicile du défendeur devrait être complété par d’autres fors autorisés en raison du lien étroit entre la juridiction et le litige ou en vue de faciliter la bonne administration de la justice. L’existence d’un lien étroit devrait garantir la sécurité juridique et éviter la possibilité que le défendeur soit attrait devant une juridiction d’un État membre qu’il ne pouvait pas raisonnablement prévoir. Cet aspect est important, en particulier dans les litiges concernant les obligations non contractuelles résultant d’atteintes à la vie privée et aux droits de la personnalité, notamment la diffamation. »

4

L’article 4, paragraphe 1, de ce règlement dispose :

« Sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre. »

5

L’article 7 dudit règlement prévoit :

« Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite dans un autre État membre :

1)

a)

en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande ;

[...] ».

6

L’article 24 du même règlement est libellé comme suit :

« Sont seules compétentes les juridictions ci-après d’un État membre, sans considération de domicile des parties :

1)

en matière de droits réels immobiliers et de baux d’immeubles, les juridictions de l’État membre où l’immeuble est situé.

[...] »

Le règlement no 593/2008

7

Les considérants 7 et 17 du règlement no 593/2008 énoncent :

« (7)

Le champ d’application matériel et les dispositions du présent règlement devraient être cohérents par rapport au règlement (CE) no 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale [(JO 2001, L 12, p. 1)] (Bruxelles I) et au règlement (CE) no 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles [(« Rome II ») (JO 2007, L 199, p. 40)].

[...]

(17)

S’agissant de la loi applicable à défaut de choix, les notions de “prestation de services” et de “vente de biens” devraient recevoir la même interprétation que celle retenue pour l’application de l’article 5 du règlement [no 44/2001], dans la mesure où ce dernier couvre la vente de biens et la fourniture de services. Les contrats de franchise ou de distribution, bien qu’ils soient des contrats de services, font l’objet de règles particulières. »

8

L’article 1er du règlement no 593/2008 dispose :

« 1. Le présent règlement s’applique, dans des situations comportant un conflit de lois, aux obligations contractuelles relevant de la matière civile et commerciale.

[...]

2. Sont exclus du champ d’application du présent règlement :

[...]

f)

les questions relevant du droit des sociétés, associations et personnes morales, telles que la constitution, par enregistrement ou autrement, la capacité juridique, le fonctionnement interne et la dissolution des sociétés, associations et personnes morales, ainsi que la responsabilité personnelle légale des associés et des agents pour les dettes de la société, association ou personne morale ;

[...] »

9

Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement :

« À défaut de choix exercé conformément à l’article 3 et sans préjudice des articles 5 à 8, la loi applicable au contrat suivant est déterminée comme suit :

a)

le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle ;

b)

le contrat de prestation de services est régi par la loi du pays dans lequel le prestataire de services a sa résidence habituelle ;

c)

le contrat ayant pour objet un droit réel immobilier ou un bail d’immeuble est régi par la loi du pays dans lequel est situé l’immeuble ;

[...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

M. Postnov et Mme Postnova, domiciliés à Dublin (Irlande), sont propriétaires d’un appartement faisant partie d’un immeuble en copropriété situé à Bansko (Bulgarie), qu’ils ont acquis en vertu d’un contrat de vente conclu le 30 mai 2008.

11

Lors des assemblées générales annuelles des copropriétaires de cet immeuble, tenues au cours des mois de janvier 2013, janvier 2014, février 2015, mars 2016 et mars 2017, des décisions relatives aux contributions financières annuelles au budget de la copropriété, au titre de l’entretien des parties communes, ont été adoptées.

12

Soutenant que M. Postnov et Mme Postnova ne s’étaient pas entièrement acquittés de leur obligation de payer ces contributions annuelles, M. Kerr a, en sa qualité de syndic dudit immeuble, introduit une requête devant le Rayonen sad Razlog (tribunal d’arrondissement de Razlog, Bulgarie), tendant à ce que ceux-ci soient condamnés au paiement du montant desdites contributions, augmenté d’une indemnité de retard.

13

Par une ordonnance statuant sur cette requête, le Rayonen sad Razlog (tribunal d’arrondissement de Razlog) a considéré que, en vertu de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012, il n’était pas compétent pour connaître du litige opposant M. Kerr à M. Postnov et à Mme Postnova, au motif que ceux-ci étaient domiciliés à Dublin (Irlande) et que les conditions d’application des exceptions à la règle de compétence générale énoncée à cette disposition n’étaient pas...

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