Norbrook Laboratories Ltd contra Ministry of Agriculture, Fisheries and Food.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1997:199
Docket NumberC-127/95
Celex Number61995CC0127
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date17 April 1997
EUR-Lex - 61995C0127 - FR 61995C0127

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 17 avril 1997. - Norbrook Laboratories Ltd contre Ministry of Agriculture, Fisheries and Food. - Demande de décision préjudicielle: Court of Appeal (Northern Ireland) - Royaume-Uni. - Directives 81/851/CEE et 81/852/CEE - Médicaments vétérinaires - Autorisation de mise sur le marché. - Affaire C-127/95.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-01531


Conclusions de l'avocat général

1 La Court of Appeal in Northern Ireland (ci-après la «Court of Appeal») vous interroge en interprétation et en appréciation de validité de certaines dispositions des directives du Conseil 81/851/CEE (1) et 81/852/CEE (2). Il s'agit plus précisément de celles relatives aux renseignements sur le fabricant, sur le processus de fabrication et sur les opérations de contrôle de la composition d'un principe non actif (ou encore une «substance») entrant dans la composition d'un des principes actifs nécessaire à la fabrication d'un médicament vétérinaire pour lequel une autorisation de mise sur le marché (ci-après l'«AMM») est sollicitée, que peut valablement exiger l'autorité nationale compétente en matière d'octroi, de suspension et de retrait d'AMM de médicament vétérinaire (ci-après l'«autorité compétente»). Vous êtes en outre invités à vous prononcer sur les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité d'un État membre pour violation du droit communautaire.

Le cadre factuel et procédural

2 Norbrook Laboratories Ltd (ci-après «Norbrook» ou la «requérante au principal»), une société anglaise à responsabilité limitée, fabrique et distribue dans quarante-cinq pays un produit injectable connu sous la dénomination «Pen & Strep», à partir de son établissement de production situé à Newry, en Irlande du Nord.

3 Ce médicament vétérinaire est un antibiotique fréquemment utilisé pour le traitement d'infections bactériennes chez les bovins, les porcins et les ovidés. Il contient principalement deux principes actifs, la pénicilline de procaïne (ci-après la «PP») et le sulfate de dihydrostreptomycine (ci-après le «DHS»).

4 Le DHS est lui-même fabriqué à partir du sulfate de streptomycine (ci-après le «SS» ou encore le «produit litigieux» ou la «substance litigieuse») qui n'est pas un principe actif. Ces deux substances ont été très largement utilisées dans des produits destinés au traitement des animaux et sont généralement considérées comme efficaces et n'engendrant que peu d'effets secondaires.

5 Le Pen & Strep a été mis sur le marché pour la première fois en Irlande et au Royaume-Uni en 1968, aux Pays-Bas en 1970, en Belgique et en France en 1981, et au Danemark en 1989.

6 A la suite de l'entrée en vigueur des directives communautaires concernant l'AMM des médicaments vétérinaires (3), Norbrook a déposé, le 28 août 1987, une demande d'AMM «révisée» (4) pour le Pen & Strep auprès du Ministry of Agriculture, Fisheries and Food (ci-après le «MAFF» ou le «défendeur au principal»), l'autorité compétente, qui délègue certains pouvoirs d'exécution au Veterinary Medicines Directorate (ci-après le «VMD»). Elle spécifiait dans sa demande que ce médicament serait fabriqué à partir du DHS fourni par la société Rhône-Poulenc Industrie en France.

7 Le 9 mars 1990, la requérante au principal a demandé à être autorisée à commercialiser le Pen & Strep fabriqué à partir du DHS, produit depuis de longues années par elle-même, et du SS, acheté auprès d'une vingtaine de fournisseurs.

8 A la suite de ces nouvelles données, le VMD a prié Norbrook de lui transmettre un certain nombre d'informations sur l'identité et la localisation desdits fournisseurs de SS, ainsi que sur les méthodes de fabrication et de contrôle dudit produit. Devant son mutisme, le VMD lui a notifié, le 13 mai 1991, que l'autorisation préalablement accordée pour le produit Pen & Strep expirait avec effet au 12 mars 1991 et que l'autorisation «révisée» qui la remplaçait lui permettait seulement d'utiliser le DHS de la source indiquée par elle dans sa demande du 28 août 1987.

9 Sur les raisons pour lesquelles elle ne peut déférer à ces demandes, Norbrook explique: «Ces renseignements, il est fréquent que Norbrook elle-même ne soit pas en état de les obtenir lorsqu'elle achète à des intermédiaires sur le marché au comptant. Même dans les cas où Norbrook pourrait obtenir l'identité du fabricant de SS, de nombreux fabricants, spécialement hors d'Europe, ne seraient pas disposés à révéler à des agences gouvernementales d'un pays `étranger' des renseignements confidentiels sur leurs procédés de fabrication et de contrôle» (5).

10 Cette demande de renseignements supplémentaires réclamés par le VMD se trouve à l'origine du contentieux qui a conduit Norbrook devant la High Court of Justice in Northern Ireland, Queen's Bench Division, dont le jugement a été frappé d'appel devant la Court of Appeal. Estimant que la solution du litige dépend de l'interprétation et de l'appréciation en validité des dispositions communautaires en la matière, cette juridiction vous soumet les sept questions suivantes:

«1) Les directives du Conseil 81/851/CEE et 81/852/CEE (et, en particulier, les articles 5, 8, 9, 11, 29 à 31, 35, 40 et 41 de la directive 81/851/CEE ainsi que la première partie de l'annexe de la directive 81/852/CEE, dans leur version originelle) doivent-elles être interprétées comme permettant à l'autorité compétente d'un État membre, dans des circonstances telles que celles décrites dans l'ordonnance de renvoi,

a) d'exiger de celui qui sollicite une autorisation de mise sur le marché pour un médicament vétérinaire (`le médicament') qu'il identifie - ou fasse en sorte que soient identifiés vis-à-vis de l'autorité compétente - les noms et adresses du ou des fabricants d'une substance particulière (`la substance') dont il entend se procurer certaines quantités, en tant que celle-ci entre dans la fabrication, par le demandeur, de l'un des principes actifs (`le principe actif') du produit, et qu'il fournisse - ou fasse en sorte que soient fournis - à l'autorité compétente les détails du site ou des sites de fabrication de la substance, ainsi que les procédés de fabrication et les méthodes de contrôle utilisées par le fabricant de la substance;

b) d'exiger de celui qui sollicite une autorisation de mise sur le marché qu'il fournisse à l'autorité compétente, en vue de leur homologation, les résultats des expérimentations devant être effectuées sur chaque lot de la substance achetée par le demandeur et s'abstienne de mettre en vente un lot quelconque du produit jusqu'à ce qu'une telle homologation ait été donnée pour le lot considéré de la substance dont il s'agit;

c) d'exiger du demandeur (que ce soit par des conditions d'autorisation spécifiques ou en réservant l'octroi d'une autorisation de mise sur le marché, ou par tout autre moyen) soit qu'il se conforme à l'une des deux exigences précitées (ou aux deux) ou qu'il ne commercialise le produit que si celui-ci a été préparé en utilisant les quantités de principe actif achetées auprès d'un tiers déterminé au lieu du principe actif fabriqué par le fabricant lui-même;

d) de suspendre le délai d'octroi de l'autorisation de mise sur le marché prévu à l'article 8 de la directive 81/851/CEE jusqu'à ce que le demandeur ait accepté de fournir l'information visée au point a) ci-dessus?

2) La circonstance que le processus de fabrication du produit soit continu ou discontinu est-elle pertinente aux fins des réponses aux questions 1) a) à 1) d) et quelle serait, dans ce cas, l'incidence sur les réponses à ces questions?

3) La circonstance qu'il soit raisonnablement impossible à un demandeur d'obtenir tout ou partie des informations visées dans la question 1) a) serait-elle, le cas échéant, pertinente aux fins des réponses aux questions 1) a) à 1) d) et, dans l'affirmative, quelle serait l'incidence sur les réponses à ces questions?

4) a) Si les demandes d'information supplémentaire et les autres exigences décrites dans la question 1 ci-dessus, ou l'une ou l'autre d'entre elles, sont prima facie admissibles en vertu des directives du Conseil 81/851/CEE et 81/852/CEE, de telles demandes et de telles exigences doivent-elles satisfaire au principe de proportionnalité édicté par le droit communautaire?

b) En cas de réponse affirmative à la question sous a), ces principes doivent-ils être appliqués en l'espèce par la juridiction nationale ou par la Cour de justice?

c) i) Si ces principes doivent être appliqués par la Cour, les demandes et exigences précitées, ou l'une ou l'autre d'entre elles, enfreignent-elles les principes de proportionnalité?

ii) Si ces principes doivent être appliqués par la juridiction nationale, suivant quels critères et quelles considérations la proportionnalité des demandes et exigences doit-elle être appréciée?

5) Convient-il d'interpréter les articles 30 à 36 du traité CE en ce sens qu'ils interdisent tout ou partie des demandes et exigences décrites ci-dessus?

6) a) L'article 40 de la directive du Conseil 81/851/CEE doit-il être interprété comme s'appliquant aux demandes et exigences décrites ci-dessus?

b) Dans l'affirmative, dans quelles circonstances et par rapport à quels critères les motifs invoqués à l'appui de telles demandes et exigences doivent-ils être considérés comme inadéquats aux fins de l'article 40 et ces demandes et exigences sont-elles en l'espèce suffisamment motivées en droit?

7) a) La responsabilité d'un État membre peut-elle être engagée, en droit communautaire, aux fins de l'indemnisation d'une entreprise pour le préjudice qu'elle a subi du fait qu'elle s'est vu imposer les demandes et conditions décrites ci-dessus, dès lors qu'elles sont

i) incompatibles avec les dispositions des directives du Conseil 81/851 et/ou 81/852;

ii) contraires aux principes de proportionnalité;

iii) interdites par les articles 30 à 36 du traité CE;

iv) insuffisamment motivées...

To continue reading

Request your trial
1 practice notes
  • Norbrook Laboratories Ltd contra Ministry of Agriculture, Fisheries and Food.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 2 April 1998
    ...Ireland) - Royaume-Uni. - Directives 81/851/CEE et 81/852/CEE - Médicaments vétérinaires - Autorisation de mise sur le marché. - Affaire C-127/95. Recueil de jurisprudence 1998 page I-01531 Sommaire Parties Motifs de l'arrêt Décisions sur les dépenses Dispositif Mots clés 1 Rapprochement de......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT