Northern Ireland Fish Producers' Organisation Ltd (NIFPO) y Northern Ireland Fishermen's Federation contra Department of Agriculture for Northern Ireland.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1997:444
Date30 September 1997
Celex Number61996CC0004
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-4/96
EUR-Lex - 61996C0004 - FR 61996C0004

Conclusions de l'avocat général La Pergola présentées le 30 septembre 1997. - Northern Ireland Fish Producers' Organisation Ltd (NIFPO) et Northern Ireland Fishermen's Federation contre Department of Agriculture for Northern Ireland. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice in Northern Ireland, Queen's Bench Division - Royaume-Uni. - Pêche - Préférences de La Haye - TAC - Cabillaud et merlan - Pouvoir discrétionnaire du législateur communautaire - Stabilité relative - Principes de proportionnalité et de non-discrimination. - Affaire C-4/96.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-00681


Conclusions de l'avocat général

I - Les présentes questions préjudicielles et leur contexte normatif et factuel

1 Les cinq questions préjudicielles aujourd'hui posées ont été soulevées par la High Court of Justice in Northern Ireland, Queen's Bench Division (ci-après la «High Court») dans le cadre d'un litige pendant devant elle, opposant, d'une part, deux organisations de producteurs d'Irlande du Nord - la Northern Ireland Fish Producers' Organisation (et les pêcheurs qui en sont membres) et la Northern Ireland Fishermens' Federation - et le Department of Agriculture for Northern Ireland, de l'autre.

Par ces questions, la High Court vous interroge sur l'interprétation de l'article 5 du traité CE (ci-après le «traité») et sur la validité de deux actes adoptés par le Conseil en matière d'exploitation des ressources halieutiques.

Plus précisément, les questions du juge de renvoi concernent, sous les aspects que nous décrirons ci-après, i) la validité de l'annexe VII à la résolution du Conseil du 3 novembre 1976 (ci-après la «résolution de La Haye»), ii) la validité du règlement (CE) n_ 3362/94 du Conseil, du 20 décembre 1994, fixant, pour certains stocks et groupes de stocks de poissons, les totaux admissibles des captures pour 1995 et certaines conditions dans lesquelles ils peuvent être pêchés (1) (ci-après le «règlement n_ 3362/94») et iii) l'interprétation du principe de la responsabilité des États membres pour les dommages éventuels causés aux particuliers par des violations du droit communautaire:

«1) La validité de l'attribution au Royaume-Uni de ses quotas de cabillaud et de merlan dans la zone VII a en application de l'article 3 du règlement (CE) n_ 3362/94 est-elle subordonnée à la régularité de l'adoption de l'annexe VII à la résolution du Conseil du 3 novembre 1976?

2) En cas de réponse affirmative à la première question, l'annexe VII a-t-elle été régulièrement adoptée?

3) Les réponses aux deux premières questions sont-elles influencées par le caractère secret de l'annexe VII, laquelle n'a pas été publiée ou autrement mise à la disposition des parties?

4) En tenant compte de toutes les autres circonstances, la fixation desdits quotas par le Conseil était-elle compatible avec:

i) la politique commune de la pêche, et notamment avec le règlement (CEE) n_ 3760/92 du Conseil,

ii) le principe de proportionnalité?

5) Si la fixation desdits quotas par le règlement (CE) n_ 3362/94 du Conseil n'est pas valide, les demandeurs sont-ils en droit de réclamer des dommages-intérêts au défendeur, et, en ce cas, quelles sont les conditions auxquelles est soumise la responsabilité?»

2 Avant d'examiner les questions posées par la High Court, il est utile de rappeler la réglementation communautaire concernant l'exploitation des ressources de la pêche et les faits qui sont à l'origine de l'affaire au principal.

3 Dans le système du traité, la pêche relève de la politique agricole commune (2). Comme on le sait, l'élaboration et la mise en oeuvre de l'organisation commune des marchés pour les produits de ce secteur ont été, dans un certain sens, «laissées en suspens» jusqu'à la fin de la période de transition. Cela s'explique par la spécificité de certains aspects pratiques importants de l'activité de pêche, en relation avec lesquels existaient des traditions et des intérêts très forts et disparates dans les divers États membres - que l'on pense aux droits historiques de pêche dans les eaux territoriales et aux autres pouvoirs des États côtiers réglés par le droit maritime international - susceptibles de soulever des problèmes complexes au niveau tant communautaire qu'international.

4 En ce qui concerne spécifiquement l'activité dominante de la pêche maritime, l'organisation commune des marchés (ci-après l'«OCM») a, en fait, été pour la première fois mise en oeuvre à un moment historique caractérisé par une grave crise économique sectorielle: non seulement la compétitivité technique de l'industrie de la pêche européenne avait diminué, face à une concurrence accrue au niveau mondial, mais aussi les captures avaient décru en conséquence de l'exploitation intensive des ressources halieutiques, rendue possible par les investissements massifs effectués, dans un climat économique favorable, au cours de la décennie 1958-1968.

Il s'agissait de redéfinir les conditions d'une gestion rationnelle et d'assurer une transition socialement acceptable des organisations nationales des marchés à l'organisation communautaire de ceux-ci. Cet objectif a été poursuivi - comme cela avait déjà été fait pour d'autres produits «agricoles» au sens strict (c'est-à-dire pour des produits du sol ou de l'élevage) - grâce à une double initiative normative.

5 On a institué un régime de commercialisation apte à concilier la stabilité des prix des produits essentiels pour les populations côtières dépendantes de la pêche avec la libéralisation des échanges requise par les structures industrielles et commerciales modernes du secteur (OCM des produits de la pêche) (3).

Parallèlement a été adoptée une réglementation de l'activité de capture et de l'accès aux ressources halieutiques, incluant les conditions de conservation et de gestion, visant à garantir le caractère durable de l'exploitation de ces ressources (politique structurelle commune pour l'industrie de la pêche) (4).

6 D'ailleurs, précisément lorsque la Communauté était sur le point de définir le régime interne de la pêche maritime, le contexte juridique international a été intégralement remis en question lorsque l'Islande (en 1975) et d'autres pays tiers ayant d'importantes zones de pêche dans la mer du Nord et l'Atlantique Nord (comme la Norvège et le Canada en 1977) ont étendu à 200 milles marins des côtes leurs zones économiques exclusives respectives.

Cette extension mettait subitement en péril le droit pour les opérateurs communautaires d'accéder aux zones de pêche et aux ressources naturelles faisant traditionnellement l'objet des libertés prévues par le régime de la haute mer, ce qui a été la source de sérieuses appréhensions pour les gouvernements des États membres intéressés (5).

7 Par la résolution de La Haye (précitée), le Conseil a défini, en novembre 1976, une série d'orientations de principe pour le développement futur de la politique commune de la pêche. Cette résolution n'a pas été publiée au Journal officiel des Communautés européennes. Le Conseil a expliqué cette situation en disant que, au moment où la résolution a été adoptée, la publication de certaines de ses annexes avait paru inappropriée, parce qu'elles contenaient des éléments confidentiels relatifs aux directives adressées par le Conseil à la Commission en vue des futures négociations entreprises par la Communauté avec des pays tiers et des organisations internationales (6).

8 En réponse à l'extension des zones de pêche exclusive à 200 milles marins de la côte par certains pays tiers, la résolution de La Haye prévoyait que, à partir du 1er janvier 1977, les États membres - par une action concertée et unanime - étendraient eux aussi à 200 milles marins leurs zones de pêche respectives (dont la limite extérieure était alors à 12 milles de la côte) au large de leurs côtes bordant la mer du Nord et l'Atlantique Nord (7).

9 La résolution de La Haye était complétée par huit annexes. Seule la première a été publiée au Journal officiel, d'ailleurs plus de quatre ans après son adoption (alors qu'elle avait déjà été publiée dans la livraison 1976 des International Legal Materials) (8).

Aux fins des présentes conclusions, l'annexe VII - qui est intégralement reproduite dans l'ordonnance de renvoi et qui fait, à juste titre, l'objet des trois premières questions préjudicielles déférées par la High Court -, intitulée «Projet de résolution du Conseil concernant certains aspects du régime interne en matière de pêche», revêt une importance particulière, surtout les troisième et quatrième paragraphes.

En considération de l'importance des activités de pêche pour l'ensemble de l'économie irlandaise, l'annexe VII à la résolution de La Haye (ci-après l'«annexe VII») consacrait, notamment, l'intention du Conseil d'appliquer les dispositions de la politique commune de la pêche - adaptées en considération de l'extension des eaux territoriales des États membres à 200 milles marins de la côte - de manière à assurer, sur la base du programme de développement de la pêche côtière 1976-1979 (Fisheries Development Programme for Coastal Fisheries 1976-1979) du gouvernement irlandais, le développement continu et progressif de l'industrie de la pêche en Irlande.

En outre, dans l'annexe VII, le Conseil reconnaissait la nécessité de tenir aussi compte, lors de l'application de la politique commune de la pêche, des besoins vitaux spécifiques d'autres régions côtières économiquement défavorisées, dont les communautés locales sont particulièrement dépendantes de la pêche et des industries annexes, c'est-à-dire «les régions septentrionales du Royaume-Uni» (9) et le Groenland (auquel le traité a, toutefois, cessé de s'appliquer à partir du 1er février 1985). Le traitement de faveur accordé à ces régions, pour les motifs que nous venons d'indiquer, est désigné, de manière synthétique, par l'expression «préférences de La Haye» (10).

10...

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