X GmbH contra Finanzamt Stuttgart - Körperschaften.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:389
Docket NumberC-135/17
Celex Number62017CC0135
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date05 June 2018
62017CC0135

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 5 juin 2018 ( 1 )

Affaire C‑135/17

X-GmbH

contre

Finanzamt Stuttgart - Körperschaften

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Libre circulation des capitaux – Articles 56 et 57 CE – Mouvements des capitaux entre les États membres et les pays tiers – Restrictions – Clause de “standstill” – Investissements directs – Réglementation d’un État membre prévoyant l’imposition des revenus provenant des sociétés ayant leur siège à l’étranger – Justification – Lutte contre les montages purement artificiels – Répartition équilibrée du pouvoir d’imposition – Préservation de l’efficacité des contrôles fiscaux »

I. Introduction

1.

Par sa demande de décision préjudicielle, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne) interroge la Cour sur l’interprétation des articles 56 et 57 CE (devenus, respectivement, articles 63 et 64 TFUE), afin de savoir, en substance, si le régime allemand applicable aux « participations à des sociétés intermédiaires étrangères» ( 2 ) emporte une restriction à la libre circulation des capitaux à l’égard des pays tiers, restriction qui, si elle n’est pas couverte par la clause de « standstill », prévue à l’article 57, paragraphe 1, CE, serait susceptible d’être justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général, en particulier la lutte contre les montages purement artificiels.

2.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige qui oppose la société de droit allemand, X, et le Finanzamt Stuttgart-Körperschaften (centre des finances publiques de Stuttgart – service des personnes morales, Allemagne) au sujet de la réintégration des revenus réalisés durant les années 2005 et 2006 par Y, une société de droit suisse détenue à 30 % par X, dans l’assiette imposable de cette dernière, en application des dispositions du Gesetz über die Besteuerung bei Auslandsbeziehungen (Aussensteuergesetz) (loi fiscale concernant les relations avec l’étranger), du 8 septembre 1972 ( 3 ), dans sa version issue du Missbrauchsbekämpfungs- und Steuerbereinigungsgesetz (loi relative à 1’harmonisation fiscale et à la lutte contre la fraude), du 21 décembre 1993 ( 4 ), et du Gesetz zur Fortentwicklung des Unternehmenssteuerrechts (loi relative à l’évolution de la fiscalité des entreprises), du 20 décembre 2001 ( 5 ) (ci-après l’ « UntStFG 2001 ») (ci-après l’« AStG »).

3.

Il ressort de la demande de décision préjudicielle qu’en vertu de l’article 7, paragraphes 6, et 6a, ainsi que de l’article 8 de l’AStG, les revenus d’une société étrangère dans le capital de laquelle un assujetti résident allemand détient une participation au moins égale à 1 % sont imposables dans le chef de cet assujetti s’il s’agit de « revenus intermédiaires ayant la nature de capitaux placés », c’est‑à‑dire s’ils sont soumis, à l’étranger, à une imposition des bénéfices inférieure à 25 % et ne proviennent pas d’activités économiques dites « actives ».

4.

Dans l’affaire au principal, il est constant que la société Y a été qualifiée par l’administration fiscale allemande de société intermédiaire étrangère pour des « revenus intermédiaires ayant la nature de capitaux placés », au sens de l’article 7, paragraphes 6 et 6a, de l’AStG. En effet, pour les exercices fiscaux en cause, l’administration fiscale allemande a considéré que les créances qu’avait acquises Y, auprès d’une société allemande et grâce, en partie, à un prêt consenti par X, donnaient droit à une participation aux résultats sportifs de quatre clubs sportifs allemands, notamment par des bénéfices tirés par ces derniers de droits médiatiques. Les revenus perçus par Y devaient donc être qualifiés de revenus intermédiaires ayant la nature de capitaux placés et incorporés dans l’assiette imposable de X pour les deux exercices fiscaux litigieux au principal.

5.

Ayant contesté sans succès les décisions de l’administration fiscale allemande, X a porté l’affaire devant le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances).

6.

Le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) relève que les règles visant la réintégration des revenus intermédiaires ayant la nature de capitaux placés dans l’assiette imposable d’un actionnaire, assujetti illimité en Allemagne, prévues à l’article 7, paragraphes 6 et 6a, de l’AStG, ciblent exclusivement les participations dans des sociétés étrangères. À cet égard, il estime que la législation allemande en cause pourrait, en principe, constituer une restriction prohibée à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 56, paragraphe 1, CE.

7.

Toutefois, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) se demande si cette législation nationale est autorisée par le droit de l’Union, compte tenu de la clause de « standstill », prévue à l’article 57, paragraphe 1, CE, aux termes de laquelle l’article 56 CE ne porte pas atteinte à l’application, aux pays tiers, des restrictions existant le 31 décembre 1993 en vertu du droit national en ce qui concerne les mouvements de capitaux à destination ou en provenance de pays tiers lorsqu’ils impliquent, notamment, des investissements directs. Tout en rappelant la jurisprudence de la Cour selon laquelle il appartient, en principe, au juge national de déterminer, à cet égard, le contenu de la législation « existant » au 31 décembre 1993, cette juridiction considère qu’une clarification par la Cour s’impose à l’égard de la législation allemande en cause, notamment en ce qui concerne deux aspects.

8.

En premier lieu, selon les explications fournies par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances), les règles visant la réintégration des « revenus intermédiaires ayant la nature de capitaux placés » dans l’assiette imposable d’un actionnaire, assujetti illimité en Allemagne, en vigueur au 31 décembre 1993, auraient été modifiées par le Gesetz zur Senkung der Steuersätze und zur Reform der Unternehmensbesteuerung (Steuersenkungsgesetz) (loi portant baisse de l’impôt et réforme de la fiscalité des entreprises), du 23 octobre 2000 (ci‑après le « StSenkG 2000 ») ( 6 ). Cette juridiction constate que si le StSenkG 2000 a certes profondément réaménagé lesdites règles applicables au 31 décembre 1993, les modifications que cette législation était censée apporter à l’AStG ont toutefois été elles-mêmes abrogées par l’UntStFG 2001, avant même qu’elles aient été susceptibles de s’appliquer, pour la première fois, à de tels revenus dans un cas concret.

9.

À cet égard, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) estime que n’est pas exempte d’incertitudes la question de savoir si, en vertu de l’article 57, paragraphe 1, CE, la garantie du maintien d’une restriction à la libre circulation des capitaux existant au 31 décembre 1993 peut devenir caduque exclusivement en raison de l’effet normatif formel de la réglementation modificative ou si la modification doit avoir également été effectivement mise en œuvre dans la pratique.

10.

En second lieu, l’UntStFG 2001 aurait rétabli, pour les règles visant la réintégration des revenus intermédiaires ayant la nature de capitaux placés dans l’assiette imposable d’un actionnaire, assujetti illimité en Allemagne, les conséquences juridiques existant au 31 décembre 1993, à l’exception d’un élément. L’UntStFG 2001 aurait notamment ramené le pourcentage minimum de la participation dans la société intermédiaire étrangère requis pour une telle réintégration, qui était précédemment de 10 %, à 1 %. En outre, dans certaines conditions, cette réintégration devrait intervenir même pour les participations inférieures à 1 %. Toutefois, si cette extension du champ d’application desdites règles aux participations de portefeuille inférieures à 10 % représente, selon le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances), une modification substantielle qui élargit la restriction aux mouvements transfrontaliers de capitaux de manière non négligeable, cette modification ne concerne pas les investissements directs, au sens de l’article 57, paragraphe 1, CE, mais uniquement les participations de portefeuille. Par conséquent, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) estime que la clause de « standstill » pourrait être applicable en l’occurrence, dans la mesure où les règles applicables à la situation particulière de X, dont la participation de 30 % dans Y constitue un investissement direct, n’ont pas été affectées par la modification introduite par l’UntStFG 2001 concernant les participations de portefeuille.

11.

Dans l’hypothèse où la législation nationale en cause ne relevait pas de la clause de « standstill » en raison de l’un de ces deux aspects, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) se demande si une telle législation ne constitue pas une restriction prohibée à la libre circulation des capitaux, qui, le cas échéant, peut être justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général. Le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) rappelle, à cet égard, que la Cour a analysé la question relative à l’imposition des revenus des sociétés intermédiaires dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas (C‑196/04, EU:C:2006:544). Toutefois, il note que cette affaire s’inscrivait dans le contexte de la liberté d’établissement applicable dans les relations entre les États membres et non dans celui de la libre circulation des capitaux, applicable également dans les relations entre les États membres et les pays tiers. Si cette jurisprudence devait être étendue à une situation telle que celle de l’affaire au principal, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) exprime ses doutes quant au caractère justifié de la législation...

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