Kamil Dziubak y Justyna Dziubak contra Raiffeisen Bank International AG, prowadzący działalność w Polsce w formie oddziału pod nazwą Raiffeisen Bank International AG Oddział w Polsce, anciennement Raiffeisen Bank Polska SA.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date14 May 2019

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GIOVANNI PITRUZZELLA

présentées le 14 mai 2019 (1)

Affaire C‑260/18

Kamil Dziubak,

Justyna Dziubak

contre

Raiffeisen Bank International AG z siedziba w Wiedniu, prowadzacy działalność w Polsce w formie oddziału pod nazwą Raiffeisen Bank International AG Oddział w Polsce, anciennement Raiffeisen Bank Polska SA z siedzibą w Warszawie

[demande de décision préjudicielle présentée par le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrats libellés dans une devise étrangère – Clause concernant la détermination du taux de change entre les devises – Effets de la constatation du caractère abusif de cette clause – Possibilité pour le juge de compléter le contrat en recourant à des dispositions nationales de caractère général – Appréciation de l’intérêt du consommateur – Maintien de la validité du contrat sans les clauses abusives »






I. Cadre juridique

A. Droit de l’Union

1. L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE (2) dispose :

« Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat ».

2. Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 93/13 :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ».

3. L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 dispose :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives ».

4. L’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 dispose :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel ».

B. Droit polonais

5. L’article 56 de l’Ustawa z 23 kwietnia 1964 r. Kodeks cywilny [loi du 23 avril 1964 – Code civil polonais] (Journal officiel polonais, 2007, position 459, tel que modifié, ci-après le « CC »), dispose :

« L’acte juridique produit non seulement les effets qui y sont exprimés mais également ceux qui découlent des lois, des règles de vie en société et des usages ».

6. Aux termes de l’article 3531 du code civil :

« Les parties au contrat sont libres de déterminer leur rapport juridique pourvu que son contenu et son objectif n’aillent pas à l’encontre de la spécificité (nature) du rapport, des lois ni des règles de vie en société. »

7. L’article 354 du code civil dispose :

« 1. Le débiteur est tenu d’exécuter son obligation conformément à son contenu et d’une manière correspondant à son objectif socio‑économique et aux règles de vie de société ainsi que, s’il existe des usages établis en la matière, d’une manière conforme à ces usages.

2. Le créancier est tenu de coopérer de la même manière à l’exécution de l’obligation ».

II. Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

8. Le 14 novembre 2008, les parties requérantes à la procédure au principal, en qualité de consommateurs, ont conclu un contrat de prêt hypothécaire remboursable en 480 mensualités. Aux termes du contrat, la banque a accordé aux emprunteurs un prêt libellé en zlotys polonais (PLN), mais indexé sur une devise étrangère, en l’espèce le franc suisse (CHF).

9. Les règles d’indexation du prêt sur la devise étrangère étaient définies par le règlement de prêt hypothécaire utilisé par la banque et intégré au contrat.

10. Le paragraphe 7, point 4, du règlement de prêt hypothécaire prévoyait, en substance, que le prêt serait mis à disposition en PLN, sur la base d’un cours au moins égal au cours d’achat de la devise étrangère (CHF) figurant au tableau applicable au moment du prélèvement des fonds. Le solde restant dû au titre du prêt, exprimé en devise étrangère (CHF), serait calculé d’après le cours appliqué au moment de l’octroi du prêt.

11. En outre, en vertu du paragraphe 9, point 2, du règlement de prêt hypothécaire, les mensualités de remboursement du prêt seraient exprimées en CHF et prélevées sur le compte bancaire, libellé en PLN, à la date d’exigibilité, sur la base du cours de vente figurant au tableau de change applicable dans la banque à la clôture du jour ouvrable précédant cette date d’exigibilité.

12. Le taux d’intérêt du prêt était un taux d’intérêt variable, défini comme la somme du taux de référence LIBOR 3M (CHF) et de la marge habituelle de la banque.

13. Les emprunteurs ont saisi le juge de renvoi d’un recours visant, à titre principal, à faire constater la nullité du contrat de prêt, au motif du caractère prétendument abusif des clauses concernant le mécanisme d’indexation décrit aux points 11 et 12. Plus précisément, ils ont fait valoir que ces clauses étaient illicites en ce qu’elles permettraient à la banque de déterminer unilatéralement et librement le taux de change. La banque déterminerait par conséquent de manière unilatérale le montant du solde du prêt libellé en devise étrangère ainsi que le résultat de la conversion de la mensualité exprimée en devise étrangère en un montant en monnaie polonaise.

14. Une fois constaté le caractère abusif de ces clauses, il serait impossible de déterminer le taux de change applicable et, en conséquence, le contrat devrait être intégralement annulé.

15. À titre subsidiaire, les emprunteurs ont conclu à l’exécution du contrat sans les clauses abusives, sur la base du montant du prêt libellé en monnaie polonaise et du taux d’intérêt prévu dans le contrat, fondé sur le taux variable LIBOR et sur la marge habituelle de la banque.

16. La banque a contesté le caractère abusif des clauses en question et a soutenu à titre subsidiaire que, même si ces clauses étaient éliminées du contrat, les parties seraient liées par les autres dispositions de celui-ci.

17. Selon la banque, en l’absence de règles supplétives déterminant les modalités de fixation du taux de change, pour interpréter le contrat expurgé des clauses abusives, il y aurait lieu de prendre en considération les principes généraux prévus aux articles 56, 65 et 354 du code civil polonais et, en particulier, les principes d’interprétation de la volonté des parties et les usages.

18. Le juge de renvoi estime que les clauses prévues par le contrat, en ce qu’elles sont abusives, ne lient pas les emprunteurs. Il relève en outre que, une fois ces clauses éliminées, il est impossible de déterminer le taux de change et, partant, d’exécuter le contrat.

19. Dans ce contexte, le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne) a sursis à statuer et a saisi la Cour des questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’article 1er, paragraphe 2, et l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29) permettent-ils de considérer que, pour le cas où l’annulation d’un contrat dans son ensemble en raison du caractère abusif des dispositions contractuelles définissant les modalités d’exécution de l’obligation (son montant) par une partie serait défavorable au consommateur, il peut être remédié aux lacunes du contrat sur la base, non pas d’une disposition supplétive se substituant clairement à la clause abusive, mais de dispositions nationales prévoyant que les effets exprimés dans un acte juridique sont complétés notamment par des effets découlant des principes d’équité (principes de vie en société) ou des usages ?

2) L’appréciation éventuelle des effets de l’annulation du contrat dans son ensemble à l’égard du consommateur doit‑elle s’effectuer au regard des circonstances existantes au moment de la conclusion du contrat ou au moment de la naissance du différend opposant les parties sur l’effectivité de la clause (lorsque le consommateur invoque son caractère abusif) et quelle est l’incidence de la position exprimée par le consommateur au cours du litige ?

3) Est-il possible de maintenir des clauses qui, en vertu des dispositions de la directive 93/13/CEE, constituent des clauses contractuelles abusives lorsqu’il apparaît, au moment de l’examen du litige, que cette solution est objectivement favorable au consommateur ?

4) Le fait de considérer comme abusives les clauses qui définissent le montant et les modalités d’exécution des obligations des parties peut-il, sur la base de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, conduire à une situation où la forme des rapports juridiques prévue dans le contrat – lorsque les effets des clauses abusives sont écartés – diffère de l’intention des parties en ce qui concerne leur obligation principale, et en particulier, est-il possible, lorsqu’une clause est considérée comme abusive, de maintenir d’autres clauses, dont il n’est pas invoqué qu’elles sont abusives, qui définissent l’obligation principale...

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