Opinion of Advocate General Szpunar delivered on 27 October 2022.
Jurisdiction | European Union |
Celex Number | 62021CC0470 |
ECLI | ECLI:EU:C:2022:838 |
Date | 27 October 2022 |
Court | Court of Justice (European Union) |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MACIEJ SZPUNAR
présentées le 27 octobre 2022 (1)
Affaire C‑470/21
La Quadrature du Net,
Fédération des fournisseurs d’accès à Internet associatifs,
Franciliens.net,
French Data Network
contre
Premier ministre,
Ministère de la Culture
[demande de décision préjudicielle formée par le Conseil d’État (France)]
« Renvoi préjudiciel – Traitement des données à caractère personnel et protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques – Directive 2002/58/CE – Article 15, paragraphe 1 – Faculté pour les États membres de limiter la portée de certains droits et obligations – Obligation de contrôle préalable par une juridiction ou une entité administrative indépendante dotée d’un pouvoir contraignant – Données d’identité civile correspondant à une adresse IP »
I. Introduction
1. La question de la conservation et de l’accès à certaines données des utilisateurs de l’internet est une question d’une actualité permanente et fait l’objet d’une jurisprudence récente mais déjà abondante de la Cour.
2. La présente affaire offre à la Cour l’occasion de traiter une nouvelle fois cette question, dans le contexte renouvelé de la lutte contre les infractions aux droits de propriété intellectuelle commises exclusivement en ligne.
II. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
3. Les considérants 2, 6, 7, 11, 22, 26 et 30 de la directive 2002/58/CE (2) énoncent :
« (2) La présente directive vise à respecter les droits fondamentaux et observe les principes reconnus notamment par la [charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »)]. En particulier, elle vise à garantir le plein respect des droits exposés aux articles 7 et 8 de cette charte.
[...]
(6) L’internet bouleverse les structures commerciales traditionnelles en offrant une infrastructure mondiale commune pour la fourniture de toute une série de services de communications électroniques. Les services de communications électroniques accessibles au public sur l’internet ouvrent de nouvelles possibilités aux utilisateurs, mais présentent aussi de nouveaux dangers pour leurs données à caractère personnel et leur vie privée.
(7) Dans le cas des réseaux publics de communications, il convient d’adopter des dispositions législatives, réglementaires et techniques spécifiques afin de protéger les droits et les libertés fondamentaux des personnes physiques et les intérêts légitimes des personnes morales, notamment eu égard à la capacité accrue de stockage et de traitement automatisés de données relatives aux abonnés et aux utilisateurs.
[...]
(11) À l’instar de la directive [95/46/CE (3)], la présente directive ne traite pas des questions de protection des droits et libertés fondamentaux liées à des activités qui ne sont pas régies par le droit communautaire. Elle ne modifie donc pas l’équilibre existant entre le droit des personnes à une vie privée et la possibilité dont disposent les États membres de prendre des mesures telles que celles visées à l’article 15, paragraphe 1, de la présente directive, nécessaires pour la protection de la sécurité publique, de la défense, de la sûreté de l’État (y compris la prospérité économique de l’État lorsqu’il s’agit d’activités liées à la sûreté de l’État) et de l’application du droit pénal. Par conséquent, la présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres de procéder aux interceptions légales des communications électroniques ou d’arrêter d’autres mesures si cela s’avère nécessaire pour atteindre l’un quelconque des buts précités, dans le respect de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales [, signée à Rome le 4 novembre 1950], telle qu’interprétée par la Cour européenne des droits de l’homme dans ses arrêts. Lesdites mesures doivent être appropriées, rigoureusement proportionnées au but poursuivi et nécessaires dans une société démocratique. Elles devraient également être subordonnées à des garanties appropriées, dans le respect de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
[...]
(22) L’interdiction du stockage des communications et des données relatives au trafic y afférentes par des personnes autres que les utilisateurs ou sans le consentement de ceux-ci ne vise pas à interdire tout stockage automatique, intermédiaire et transitoire de ces informations si ce stockage a lieu dans le seul but d’effectuer la transmission dans le réseau de communications électroniques, pour autant que les informations ne soient pas stockées pour une durée plus longue que le temps nécessaire à la transmission et à la gestion du trafic et qu’au cours de la période de stockage la confidentialité des informations reste garantie. [...]
[...]
(26) Les données relatives aux abonnés qui sont traitées dans des réseaux de communications électroniques pour établir des connexions et transmettre des informations contiennent des informations sur la vie privée des personnes physiques et touchent au droit au secret de leur correspondance ainsi qu’aux intérêts légitimes des personnes morales. Ces données ne peuvent être stockées que dans la mesure où cela est nécessaire à la fourniture du service, aux fins de la facturation et des paiements pour interconnexion, et ce, pour une durée limitée. Tout autre traitement de ces données [...] ne peut être autorisé que si l’abonné a donné son accord sur la base d’informations précises et complètes fournies par le fournisseur du service de communications électroniques accessible au public sur la nature des autres traitements qu’il envisage d’effectuer, ainsi que sur le droit de l’abonné de ne pas donner son consentement à ces traitements ou de retirer son consentement. [...]
[...]
(30) Les systèmes mis au point pour la fourniture de réseaux et de services de communications électroniques devraient être conçus de manière à limiter au strict minimum la quantité de données personnelles nécessaires. [...] »
4. Aux termes de l’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions » :
« [...]
Les définitions suivantes sont aussi applicables :
a) “utilisateur” : toute personne physique utilisant un service de communications électroniques accessible au public à des fins privées ou professionnelles sans être nécessairement abonnée à ce service ;
b) “données relatives au trafic” : toutes les données traitées en vue de l’acheminement d’une communication par un réseau de communications électroniques ou de sa facturation ;
c) “données de localisation” : toutes les données traitées dans un réseau de communications électroniques ou par un service de communications électroniques indiquant la position géographique de l’équipement terminal d’un utilisateur d’un service de communications électroniques accessible au public ;
d) “communication” : toute information échangée ou acheminée entre un nombre fini de parties au moyen d’un service de communications électroniques accessible au public. Cela ne comprend pas les informations qui sont acheminées dans le cadre d’un service de radiodiffusion au public par l’intermédiaire d’un réseau de communications électroniques, sauf dans la mesure où un lien peut être établi entre l’information et l’abonné ou utilisateur identifiable qui la reçoit ;
[...] »
5. L’article 3 de ladite directive, intitulé « Services concernés », dispose :
« La présente directive s’applique au traitement des données à caractère personnel dans le cadre de la fourniture de services de communications électroniques accessibles au public sur les réseaux de communications publics dans la Communauté, y compris les réseaux de communications publics qui prennent en charge les dispositifs de collecte de données et d’identification. »
6. L’article 5 de la même directive, intitulé « Confidentialité des communications », prévoit :
« 1. Les États membres garantissent, par la législation nationale, la confidentialité des communications effectuées au moyen d’un réseau public de communications et de services de communications électroniques accessibles au public, ainsi que la confidentialité des données relatives au trafic y afférentes. En particulier, ils interdisent à toute autre personne que les utilisateurs d’écouter, d’intercepter, de stocker les communications et les données relatives au trafic y afférentes, ou de les soumettre à tout autre moyen d’interception ou de surveillance, sans le consentement des utilisateurs concernés sauf lorsque cette personne y est légalement autorisée, conformément à l’article 15, paragraphe 1. Le présent paragraphe n’empêche pas le stockage technique nécessaire à l’acheminement d’une communication, sans préjudice du principe de confidentialité.
[...]
3. Les États membres garantissent que le stockage d’informations, ou l’obtention de l’accès à des informations déjà stockées, dans l’équipement terminal d’un abonné ou d’un utilisateur n’est permis qu’à condition que l’abonné ou l’utilisateur ait donné son accord, après avoir reçu, dans le respect de la directive [95/46], une information claire et complète, entre autres sur les finalités du traitement. Cette disposition ne fait pas obstacle à un stockage ou à un accès techniques visant exclusivement à effectuer la transmission d’une communication par la voie d’un réseau de communications électroniques, ou strictement nécessaires au fournisseur pour la fourniture d’un service de la société de l’information expressément demandé par l’abonné ou l’utilisateur. »
7. Aux termes de l’article 6 de la directive 2002/58, intitulé « Données relatives au trafic » :
« 1. Les données relatives au trafic concernant les abonnés et les utilisateurs traitées et stockées par le fournisseur d’un réseau public de communications ou d’un service de communications électroniques accessibles au public doivent être effacées ou rendues anonymes lorsqu’elles ne sont plus nécessaires à la transmission d’une communication sans préjudice des paragraphes 2, 3 et 5, du présent...
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