DP y SG contra Trapeza Peiraios AE.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2021:1045
Docket NumberC-243/20
Date21 December 2021
Celex Number62020CJ0243
CourtCourt of Justice (European Union)
62020CJ0243

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

21 décembre 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives – Article 1er, paragraphe 2 – Clauses contractuelles reflétant des dispositions législatives ou réglementaires impératives – Exclusion du champ d’application de cette directive – Prêt remboursable en devise étrangère – Clause reflétant une disposition nationale de nature supplétive – Incidence de l’absence de transposition de cet article 1er, paragraphe 2 – Article 3, paragraphe 1, et article 4, paragraphe 1 – Contrôle du caractère abusif d’une clause – Article 8 – Adoption ou maintien de dispositions nationales assurant un niveau de protection plus élevé au consommateur – Interaction entre ces diverses dispositions de la directive 93/13 »

Dans l’affaire C‑243/20,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Polymeles Protodikeio Athinon (tribunal de grande instance d’Athènes, Grèce), par décision du 5 mai 2020, parvenue à la Cour le 5 juin 2020, dans la procédure

DP,

SG

contre

Trapeza Peiraios AE,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, faisant fonction de président de la sixième chambre, MM. N. Jääskinen (rapporteur) et M. Safjan, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour DP et SG, par Me V. Kontogiannis, dikigoros,

pour Trapeza Peiraios AE, par Me S. Spyropoulos, dikigoros,

pour le gouvernement hellénique, par Mmes V. Karra, S. Charitaki et A. Magrippi, en qualité d’agents,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil ainsi que par Mme S. Šindelková, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. N. Ruiz García et Mme A. Katsimerou, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, de l’article 3, paragraphe 1, de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 8 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant DP et SG à Trapeza Peiraios AE au sujet du caractère prétendument abusif de clauses figurant dans des avenants à un contrat de prêt libellé en euros, par lesquels le franc suisse a été substitué à l’euro.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les douzième et treizième considérants de la directive 93/13 sont libellés comme suit :

« considérant, toutefois, qu’en l’état actuel des législations nationales, seule une harmonisation partielle est envisageable ; que, notamment, seules les clauses contractuelles n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle font l’objet de la présente directive ; qu’il importe de laisser la possibilité aux États membres, dans le respect du traité, d’assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur au moyen de dispositions nationales plus strictes que celles de la présente directive ;

considérant que les dispositions législatives ou réglementaires des États membres qui fixent, directement ou indirectement, les clauses de contrats avec les consommateurs sont censées ne pas contenir de clauses abusives ; que, par conséquent, il ne s’avère pas nécessaire de soumettre aux dispositions de la présente directive les clauses qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des principes ou des dispositions de conventions internationales dont les États membres ou la Communauté sont parti[e]s ; que, à cet égard, l’expression “dispositions législatives ou réglementaires impératives” figurant à l’article 1er paragraphe 2 couvre également les règles qui, selon la loi, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu ».

4

L’article 1er, paragraphe 2, de cette directive prévoit :

« Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des dispositions ou principes des conventions internationales, dont les États membres ou la Communauté sont parti[e]s, notamment dans le domaine des transports, ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

5

La version en langue grecque de l’article 1er, paragraphe 2, de ladite directive comporte un second alinéa, qui est libellé comme suit :

« L’expression “dispositions législatives ou réglementaires impératives” figurant à l’article 1er paragraphe 2 couvre également les règles qui, selon la loi, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu. »

6

L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 dispose :

« Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. »

7

L’article 4 de cette directive énonce :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

8

Aux termes de l’article 8 de ladite directive :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

Le droit grec

9

L’article 291 de l’Astikos Kodikas (code civil) prévoit :

« S’agissant d’une dette pécuniaire libellée en devise étrangère et qui doit être acquittée en Grèce, le débiteur a, sauf convention contraire, le droit de payer en monnaie nationale au cours de change de la devise étrangère qui est en vigueur au lieu et à la date du paiement. »

10

L’article 2, paragraphe 6, de la loi 2251/1994, du 16 novembre 1994, relative à la protection des consommateurs (FΕΚ Α’ 191), qui a transposé la directive 93/13 en droit grec, dispose, dans sa version applicable au litige au principal (ci‑après la « loi 2251/1994 ») :

« Les conditions générales contractuelles qui ont pour effet de perturber significativement l’équilibre des droits et des obligations des parties contractantes au détriment du consommateur sont prohibées et nulles. Le caractère abusif d’une condition générale incorporée à un contrat est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat, de la finalité du contrat, de l’ensemble des circonstances spécifiques entourant sa conclusion, ainsi que de toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

11

Les requérants au principal sont deux consommateurs résidant en Grèce où ils perçoivent des revenus en euros. Le 3 septembre 2004, ils ont conclu avec Trapeza Peiraios, une banque établie dans cet État membre, un contrat de prêt immobilier d’une durée de 30 ans. Ce contrat de prêt était libellé en euros et soumis à un taux variable défini par rapport au taux Euribor à 360 jours.

12

Les 26 mars 2007 et 25 juin 2007, les parties ont signé deux avenants, afin de convertir en francs suisses ce contrat de prêt initialement libellé en euros. Ces avenants stipulent, d’une part, que le remboursement du solde restant dû sera effectué en francs suisses et, d’autre part, que les intérêts seront calculés selon un taux fixe durant les trois premières années, puis selon un taux variable sur la base du taux LIBOR en franc suisse à 360 jours.

13

Il ressort du dossier dont dispose la Cour que, selon la clause 4.5 de ce dernier avenant, « [l]e remboursement du prêt par le débiteur se fera soit dans la même devise, soit dans l’équivalent en euros du montant en francs suisses, cet équivalent étant calculé au jour du paiement de la mensualité sur la base du cours de la devise concernée tel qu’il ressort du marché interbancaire des changes. Ce cours sera supérieur au cours effectif auquel la Banque vend le franc suisse et qui figure au Bulletin quotidien des cours de change de la Banque ».

14

Aux termes de la clause 8.1, paragraphe 3, figurant dans ledit avenant, « en cas de résiliation du contrat de prêt, en plus des conséquences prévues par ailleurs dans la présente, la Banque se réserve le droit (sans y être obligée) de convertir la totalité du solde restant dû en euros, au cours effectif auquel la Banque vend le franc suisse et qui figure au Bulletin quotidien des cours de change de la Banque au jour de la conversion, et d’assortir le solde restant dû d’intérêts de retard composés du taux de base de la Banque en vigueur pour les prêts immobiliers, de la marge et du prélèvement au titre de la loi 128/75 et majorés de 2,5 points de...

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