AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE v Commission of the European Communities.
Jurisdiction | European Union |
Date | 23 April 2009 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Affaire C-425/07 P
AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE
contre
Commission des Communautés européennes
«Pourvoi — Concurrence — Rejet d'une plainte par la Commission — Dysfonctionnements importants du marché commun — Défaut d'intérêt communautaire»
Sommaire de l'arrêt
1. Concurrence — Procédure administrative — Examen des plaintes — Appréciation de l'intérêt communautaire attaché à l'instruction d'une affaire
2. Concurrence — Ententes — Affectation du commerce entre États membres — Notion
3. Pourvoi — Moyens — Motifs d'un arrêt entachés d'une confusion entre deux notions juridiques — Dispositif fondé pour d'autres motifs de droit — Rejet
1. La Commission est appelée à définir et à mettre en oeuvre la politique communautaire de la concurrence et dispose à cet effet d'un pouvoir discrétionnaire dans le traitement des plaintes déposées auprès d'elle. Lorsque la Commission établit l'ordre de priorité de traitement des plaintes dont elle est saisie, elle peut légitimement se référer à l'intérêt communautaire. Dans ce cadre, elle est tenue d'apprécier dans chaque espèce la gravité des atteintes alléguées à la concurrence et la persistance de leurs effets. Cette obligation implique notamment qu'elle tienne compte de la durée et de l'importance des infractions dénoncées ainsi que de leur incidence sur la situation de la concurrence dans la Communauté européenne.
Par conséquent, dans l'hypothèse où il est conclu à l'existence d'une affectation du commerce intracommunautaire, une plainte portant sur la violation des articles 81 CE et 82 CE sera instruite par la Commission plutôt que par les autorités nationales de la concurrence, s'il existe un intérêt communautaire suffisant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque l'infraction dénoncée est susceptible de provoquer des dysfonctionnements importants dans le marché commun.
(cf. points 31, 53-54)
2. Les notions d'affectation du commerce intracommunautaire, d'une part, et de dysfonctionnements importants dans le marché commun, d'autre part, sont deux notions distinctes.
L'affectation du commerce entre États membres sert de critère de délimitation entre le champ d'application du droit communautaire de la concurrence, en particulier les articles 81 CE et 82 CE, et celui du droit national de la concurrence. S'il s'avère que l'infraction alléguée n'est pas susceptible d'affecter le commerce intracommunautaire, ou de ne l'affecter autrement que d'une manière insignifiante, le droit communautaire de la concurrence et, plus particulièrement, les articles 81 CE et 82 CE ne seront pas d'application. Par ailleurs, pour être susceptible d'affecter le commerce entre États membres, un accord entre entreprises doit être tel que, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, il y a lieu d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'il exerce une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique entre États membres.
Quant à la notion de dysfonctionnements importants dans le marché commun, elle peut constituer l'un des critères d'évaluation de l'existence d'un intérêt communautaire suffisant à l'instruction d'une plainte par la Commission.
Or, une affectation du commerce intracommunautaire n'entraîne pas en soi des dysfonctionnements importants dans le marché commun.
(cf. points 48-52)
3. Une confusion de notions par le Tribunal dans un arrêt attaqué n'est pas de nature à entraîner l'annulation dudit arrêt si son dispositif apparaît fondé pour d'autres motifs de droit.
(cf. point 55)
ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)
23 avril 2009 (*)
«Pourvoi – Concurrence – Rejet d’une plainte par la Commission – Dysfonctionnements importants du marché commun – Défaut d’intérêt communautaire»
Dans l’affaire C‑425/07 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 14 septembre 2007,
AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE, établie à Maroussi (Grèce), représentée par Me T. Asprogerakas Grivas, dikigoros,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant:
Commission des Communautés européennes, représentée par MM. F. Castillo de la Torre et T. Christoforou, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (troisième chambre),
composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh, J. Klučka, U. Lõhmus et A. Arabadjiev (rapporteur), juges,
avocat général: M. P. Mengozzi,
greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 octobre 2008,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 novembre 2008,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE (ci-après «AEPI») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 12 juillet 2007, AEPI/Commission (T-229/05, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté comme non fondé le recours introduit par AEPI visant à l’annulation de la décision de la Commission SG‑Greffe (2005) D/201832, du 18 avril 2005, portant rejet de la plainte déposée par la requérante concernant une infraction alléguée aux articles 81 CE et/ou 82 CE commise par les organismes grecs de gestion collective de droits voisins des droits d’auteur dans le domaine de la musique Erato, Apollon et Grammo (ci-après la «décision litigieuse»).
Les antécédents du litige
2 Il ressort des points 1 à 12 de l’arrêt attaqué que les faits à l’origine du litige peuvent être résumés comme suit.
3 La requérante est une société anonyme de droit grec exerçant ses activités dans le secteur de la protection des droits de propriété intellectuelle dans le domaine de la musique en Grèce.
4 Le 3 mars 1993, la République hellénique a adopté la loi 2121/1993 relative aux droits d’auteur, aux droits voisins et aux questions culturelles (FEK A’ 25/4.3.1993, ci-après la «loi 2121/1993»). En vertu de l’article 54 de cette loi, les auteurs peuvent confier la gestion ou la protection de leurs droits intellectuels à des organismes de gestion collective, dont l’activité est subordonnée à un agrément délivré par le ministère de la Culture grec. L’article 58 de la même loi énonce que les dispositions dudit article 54 sont applicables par analogie à la gestion et à la protection des droits voisins.
5 La requérante a sollicité un agrément pour l’ensemble des droits d’auteur et des droits voisins dans le domaine de la musique. Le ministère de la Culture grec lui a cependant accordé un agrément limité à la gestion collective des droits d’auteur sur les œuvres musicales.
6 Trois organismes grecs de gestion collective des droits voisins, à savoir Erato, Apollon et Grammo (ci-après les «trois organismes»), ont obtenu un agrément pour la gestion collective des droits voisins, respectivement, des chanteurs interprètes, des musiciens exécutants et des producteurs de supports matériels de sons et/ou d’images.
7 Le 22 mars 2001, la requérante a adressé une plainte à la Commission des Communautés européennes visant la République hellénique ainsi que les trois organismes. Elle a, d’une part, soutenu que ces derniers enfreignaient les articles 81 CE et 82 CE dans la mesure où ils commettaient un abus de position dominante et créaient des ententes ainsi que des pratiques concertées (ci-après, ensemble, les «pratiques dénoncées»), et a, d’autre part, demandé le renvoi de la République hellénique devant la Cour pour infraction à l’article 81 CE, au motif que la loi 2121/1993 permettrait auxdits organismes de se livrer aux pratiques dénoncées.
8 Dans sa plainte, la requérante soulignait que la rémunération des droits voisins avait été fixée à un niveau excessif, qui allait jusqu’à 5 % des recettes brutes des stations de radiodiffusion et des chaînes de télévision grecques. Ce comportement constituerait une violation des articles 81 CE et 82 CE, qui lui causerait un préjudice grave et irréparable, dans la mesure où les entreprises concernées ne seraient pas en mesure de payer ces montants excessifs, privant ainsi la requérante de la perception des redevances qu’elle demande pour les droits d’auteur.
9 Par lettre du 7 décembre 2004, la Commission a scindé la plainte en deux volets pour des motifs juridiques et procéduraux, l’un concernant la République hellénique et l’autre les trois organismes.
10 Le 18 avril 2005, après avoir pris en compte les arguments de la requérante, la Commission a rejeté la plainte concernant les trois organismes par la décision litigieuse, pour défaut d’intérêt communautaire.
11 Les considérations pertinentes sur lesquelles se fonde la décision litigieuse sont libellées comme suit:
«Dans le cas d’espèce, l’infraction alléguée n’est pas de nature à provoquer des dysfonctionnements importants du marché commun étant donné que toutes les parties impliquées ont leur siège en Grèce et n’exercent leurs activités qu’en Grèce. Il n’est pas prévisible que cette situation change, c’est-à-dire que les trois organismes [...] commencent à brève échéance à exercer leurs activités dans d’autres pays, vu la structure des [marchés de] services pour la protection des droits voisins et les difficultés pratiques d’une telle entreprise. En outre, les effets des pratiques allégué[e]s ne se produisent que dans le contexte du marché grec. Les contrats [d’]utilisation de musique ne se font qu’avec des stations [de] radio et [de] télévision et d’autres utilisateurs qui se trouvent en Grèce. Les trois organismes [...] ne sont compétents que pour la protection des droits voisins en Grèce et n’ont pas la possibilité pratique d’exercer cette compétence [en] dehors [de] ce pays.
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