X (C-155/08) and E. H. A. Passenheim-van Schoot (C-157/08) v Staatssecretaris van Financiën.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:368
Docket NumberC-157/08,C-155/08
Celex Number62008CJ0155
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date11 June 2009

Affaires jointes C-155/08 et C-157/08

X
et
E. H. A. Passenheim-van Schoot

contre

Staatssecretaris van Financiën

(demandes de décision préjudicielle, introduites par

le Hoge Raad der Nederlanden)

«Libre prestation des services — Libre circulation des capitaux — Impôt sur la fortune — Impôt sur les revenus — Avoirs provenant de l'épargne placés dans un État membre autre que celui de la résidence — Absence de déclaration — Délai de redressement — Prolongation du délai de redressement en cas d'avoirs détenus en dehors de l'État membre de résidence — Directive 77/799/CEE — Assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et indirects — Secret bancaire»

Sommaire de l'arrêt

1. Libre prestation des services — Libre circulation des capitaux — Restrictions — Législation fiscale

(Art. 49 CE et 56 CE; directive du Conseil 77/799)

2. Libre prestation des services — Libre circulation des capitaux — Restrictions — Législation fiscale

(Art. 49 CE et 56 CE)

1. Les articles 49 CE et 56 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à l’application par un État membre, lorsque des avoirs issus de l’épargne et des revenus tirés de ces avoirs sont dissimulés aux autorités fiscales de cet État membre et que celles-ci ne disposent d’aucun indice quant à leur existence permettant de déclencher une enquête, d’un délai de redressement plus long lorsque ces avoirs sont détenus dans un autre État membre que lorsqu’ils sont détenus dans le premier État membre. La circonstance que cet autre État membre applique le secret bancaire n’est pas pertinente à cet égard.

Certes, une telle réglementation constitue une restriction à la fois à la libre prestation des services et à la libre circulation des capitaux, prohibée, en principe, par les articles 49 CE et 56 CE, respectivement, en ce que l’application aux contribuables résidant dans l'État membre concerné d’un délai de redressement prolongé pour ce qui concerne les avoirs détenus en dehors de cet État membre et les revenus qu’ils en tirent est de nature à rendre moins attrayant pour ces contribuables de transférer des avoirs vers un autre État membre afin de bénéficier des services financiers y offerts que de détenir lesdits avoirs et d’obtenir des services financiers dans le premier État membre.

Toutefois, ladite restriction peut être justifiée par la nécessité de garantir l'efficacité des contrôles fiscaux ainsi que par la lutte contre la fraude fiscale, sous réserve du respect du principe de proportionnalité, en ce sens qu'elle doit être propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre.

À cet égard, une telle réglementation contribue à assurer l'efficacité des contrôles fiscaux et à lutter contre la fraude fiscale. En effet, si l’extension d’un délai de redressement ne renforce pas, en tant que telle, les pouvoirs d’enquête dont disposent les autorités fiscales d’un État membre, elle permet néanmoins à celles-ci, en cas de découverte d’éléments imposables détenus dans un autre État membre et dont elles n’avaient pas connaissance, de déclencher une enquête et, lorsqu’il s’avère que ces éléments n’ont pas été soumis à l’impôt, ou l’ont été trop faiblement, d’émettre un avis de redressement. Il en va de même lorsque les autorités fiscales d’un État membre sont informées de l’existence d’éléments imposables détenus dans un autre État membre qui applique le secret bancaire. En outre, l’application par un État membre d’un délai de redressement prolongé dans le cas d’éléments imposables détenus ou apparus dans un autre État membre peut dissuader les contribuables détenant de tels avoirs de dissimuler au fisc ces avoirs ou les revenus qu’ils en tirent, afin de ne pas s’exposer ultérieurement à un redressement ainsi que, le cas échéant, à une amende, déterminés, l’un et l’autre, sur la base d’une période pouvant aller jusqu’à douze ans.

S'agissant d'apprécier si la réglementation en cause ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer l’efficacité des contrôles fiscaux et pour lutter contre la fraude fiscale, le délai supplémentaire offert aux autorités fiscales de l’État membre concerné pour procéder à un redressement concernant des éléments imposables détenus ou apparus dans un autre État membre ne correspond certes pas nécessairement à celui dont lesdites autorités ont besoin pour vérifier certaines informations auprès de cet autre État membre en ayant recours à l’assistance mutuelle prévue par la directive 77/799, concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et indirects, ou au système d’échange de renseignements instauré par une convention bilatérale. Toutefois, il n'en découle pas pour autant que, de manière générale, l’extension de la période pendant laquelle ces autorités peuvent émettre un avis de redressement dans le cas d’avoirs ou de revenus provenant d’un autre État membre soit disproportionnée par rapport à l’objectif de garantir le respect des dispositions fiscales nationales. À cet égard, sans préjudice des dispositions communautaires d’harmonisation le cas échéant applicables, il ne saurait être imposé à un État membre d’aménager sa réglementation en matière de contrôles fiscaux en fonction de la situation spécifique prévalant dans chaque autre État membre ou État tiers.

Dans une situation où des éléments qui sont imposables dans un État membre et se situent dans un autre État membre ont été dissimulés aux autorités fiscales du premier État membre et que celles-ci ne disposent d’aucun indice quant à l’existence desdits éléments permettant de déclencher une enquête, le fait de soumettre des éléments imposables dissimulés au fisc à un délai de redressement prolongé ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir l’efficacité des contrôles fiscaux et lutter contre la fraude fiscale. Dans cette hypothèse, ce premier État membre se trouve dans l’impossibilité de s’adresser aux autorités compétentes de l’autre État membre afin que ces dernières lui communiquent les renseignements nécessaires pour établir correctement le montant de l’impôt. En l’absence d’élément permettant de déclencher une enquête, le recours à un mécanisme d’échange d’informations étant exclu, l’octroi aux autorités fiscales d’un État membre d’un délai plus long pour établir l’impôt lorsqu’il s’agit d’éléments imposables situés dans un autre État membre doit être considéré comme visant non pas à procurer auxdites autorités le temps nécessaire pour obtenir de cet autre État membre des renseignements sur des éléments imposables qui y sont situés, mais uniquement à prévoir une période plus longue au cours de laquelle une éventuelle découverte de ces éléments imposables peut encore donner lieu à un redressement dans la mesure où l’enquête déclenchée par suite d’une telle découverte peut aboutir à ce redressement avant l’expiration de cette période. Par ailleurs, dès lors que l'application par un État membre d'un délai de redressement prolongé dans ces circonstances n'est pas fonction de la possibilité d'obtenir des renseignements de cet autre État membre, il n'est pas non plus pertinent de savoir si ce dernier applique le secret bancaire. En outre, le choix d’un État membre de limiter ce délai dans le temps et de déterminer cette limite en fonction du délai applicable pour les poursuites en matière de délit de fraude fiscale ne paraît pas disproportionné. En plus, il ne saurait être reproché à un État membre de limiter le champ d’application du délai de redressement, plus long dans le cas d’éléments imposables dont les autorités fiscales n’avaient pas connaissance, aux éléments imposables qui ne se situent pas sur son territoire.

Par contre, lorsque les autorités fiscales d’un État membre disposaient d’indices qui leur auraient permis de s’adresser aux autorités compétentes d’autres États membres, que ce soit au moyen de l’assistance mutuelle prévue par la directive 77/799, ou de celle prévue par des conventions bilatérales, afin que ces dernières autorités leur communiquent les renseignements nécessaires pour établir le montant correct de l’impôt, le simple fait que les éléments imposables concernés se situent dans un autre État membre ne justifie pas l’application générale d’un délai de redressement supplémentaire qui n’est aucunement fonction du laps de temps nécessaire pour recourir utilement à ces mécanismes d’assistance mutuelle.

(cf. points 39-40, 45, 47, 49-52, 59-61, 63, 67-70, 73, 75-76, disp. 1)

2. Les articles 49 CE et 56 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que, lorsqu’un État membre applique un délai de redressement plus long dans le cas d’avoirs détenus dans un autre État membre que dans celui d’avoirs détenus dans ce premier État membre et que ces avoirs étrangers ainsi que les revenus tirés de ceux-ci étaient dissimulés aux autorités fiscales du premier État membre qui ne disposaient d’aucun indice quant à leur existence permettant de déclencher une enquête, l’amende infligée en raison de la dissimulation desdits avoirs et revenus étrangers soit calculée proportionnellement au montant du redressement et sur cette période plus longue.

En effet, le risque qu’un contribuable résident se voie imposer une amende plus élevée en rapport avec des avoirs et revenus situés dans un autre État membre que lorsqu’il s’agit d’avoirs et de revenus nationaux n’est que la conséquence du fait que la période pouvant être prise en compte pour la détermination du redressement et, partant, pour l’assiette de l’amende est susceptible d’être plus longue dans le cas d’avoirs et de revenus non nationaux que dans celui d’avoirs et de revenus nationaux, dans la mesure où ces derniers ne sont pas concernés par le délai de redressement prolongé. Dès lors que les articles 49 CE et 56 CE ne s’opposent pas à l’application par...

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