T. Port GmbH & Co. KG v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
CourtGeneral Court (European Union)
Date20 March 2001
EUR-Lex - 61999A0052 - FR 61999A0052

Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 20 mars 2001. - T. Port GmbH & Co. KG contre Commission des Communautés européennes. - Bananes - Importation des Etats ACP et des pays tiers - Calcul de la quantité annuelle attribuée - Recours en indemnité - Recevabilité - Règles de l'OMC - Invocabilité - Détournement de pouvoir - Principes généraux du droit communautaire. - Affaire T-52/99.

Recueil de jurisprudence 2001 page II-00981


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1. Recours en indemnité - Objet - Demande d'indemnisation d'un dommage imputable à la Communauté - Compétence exclusive du juge communautaire

[Traité CE, art. 215, alinéa 2 (devenu art. 288, alinéa 2, CE)]

2. Responsabilité non contractuelle - Conditions - Violation d'une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers - Impossibilité d'invoquer les accords de l'OMC pour contester la légalité d'un acte communautaire ou pour fonder un recours en indemnité - Exceptions - Acte communautaire visant à en assurer l'exécution ou s'y référant expressément et précisément

[Traité CE, art. 215, alinéa 2 (devenu art. 288, alinéa 2, CE)]

3. Agriculture - Organisation commune des marchés - Banane - Régime des importations - Contingent tarifaire - Instauration et répartition - Traitement différent des opérateurs établis en Autriche, en Finlande et en Suède - Discrimination - Absence

(Règlement du Conseil n° 404/93; règlement de la Commission n° 2362/98, art. 5, § 3 et 4)

4. Agriculture - Organisation commune des marchés - Banane - Régime des importations - Contingent tarifaire - Instauration et répartition - Attribution des certificats d'importation - Qualité d'importateur - Détermination des critères - Principe de protection de la confiance légitime - Violation - Absence

(Règlement du Conseil n° 404/93; règlement de la Commission n° 2362/98)

Sommaire

1. Lorsque, dans le cadre d'un recours en indemnité, le comportement fautif n'émane pas d'un organisme national mais d'une institution communautaire, les préjudices qui pourraient éventuellement résulter de la mise en oeuvre de la réglementation communautaire par les autorités nationales sont imputables à la Communauté. Le juge communautaire ayant compétence exclusive pour connaître, en vertu de l'article 215 du traité (devenu article 288 CE), des litiges relatifs à l'indemnisation d'un tel dommage, les voies de recours nationales ne pourraient permettre d'assurer aux particuliers qui s'estiment lésés par les actes des institutions communautaires une protection efficace de leurs droits.

( voir points 26-27 )

2. Dans le cadre de la responsabilité non contractuelle de la Communauté, un droit à réparation suppose que la règle de droit violée ait pour objet de conférer des droits aux particuliers. Tel n'est pas le cas des accords OMC. En effet, compte tenu de leur nature et de leur économie, ces accords ne figurent pas, en principe, parmi les normes au regard desquelles le juge communautaire contrôle la légalité des actes des institutions communautaires. Ce n'est que dans l'hypothèse où la Communauté a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l'OMC, ou dans le cas où l'acte communautaire renvoie expressément à des dispositions précises des accords inclus dans les annexes de l'accord OMC, qu'il appartient à la Cour et au Tribunal de contrôler la légalité de l'acte communautaire en cause au regard des règles de l'OMC.

( voir points 45-46, 50-51, 58 )

3. Le principe de non-discrimination exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente, à moins qu'une différenciation ne soit objectivement justifiée. À cet égard, une différence de traitement ne saurait être considérée comme constituant une discrimination interdite par l'article 40, paragraphe 3, du traité (devenu, après modification, article 34, paragraphe 2, CE) que si elle apparaît arbitraire, c'est-à-dire dépourvue de justification suffisante et non fondée sur des critères de nature objective.

En traitant différemment, dans le cadre de l'organisation commune des marchés de la banane, les opérateurs établis en Autriche, en Finlande et en Suède et les opérateurs traditionnels concernant l'activité en cours dans ces pays en 1994, la Commission n'a pas violé le principe de non-discrimination. En effet, ces États n'étaient pas encore soumis, à cette date, à l'organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, de sorte qu'un système spécial était nécessaire pour que les importations réalisées par les opérateurs établis dans ces pays en 1994 puissent être prises en compte dans la détermination de leur quantité de référence.

( voir points 81-83 )

4. Les institutions communautaires disposant d'une marge d'appréciation lors du choix des moyens nécessaires pour la réalisation de leur politique, les opérateurs économiques ne sont pas justifiés à placer leur confiance légitime dans le maintien d'une situation existante qui peut être modifiée par des décisions prises par ces institutions dans le cadre de leur pouvoir d'appréciation. Cela vaut spécialement dans un domaine comme celui des organisations communes des marchés, dont l'objet comporte une constante adaptation en fonction des variations de la situation économique.

La détermination des critères pris en compte en vertu du règlement n° 2362/98, portant modalités d'application du règlement n° 404/93, aux fins de reconnaître à un opérateur économique la qualité d'importateur pour l'attribution des certificats d'importation de bananes relevant du choix des moyens nécessaires à la réalisation de la politique des institutions communautaires en ce qui concerne l'organisation commune des marchés de la banane, celles-ci disposent sur ce point d'une marge d'appréciation. Par conséquent, les opérateurs économiques ne sont pas justifiés à placer une confiance légitime dans le maintien des critères prévus dans l'ancien système communautaire.

( voir points 99-101 )

Parties

Dans l'affaire T-52/99,

T. Port GmbH & Co. KG, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Me G. Meier, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. K.-D. Borchardt et H. van Vliet, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de réparation du préjudice que la requérante aurait subi du fait que la Commission a institué, dans le cadre de son règlement (CE) n° 2362/98, du 28 octobre 1998, portant modalités d'application du règlement (CEE) n° 404/93 du Conseil en ce qui concerne le régime d'importation de bananes dans la Communauté (JO L 293, p. 32), des dispositions prétendument contraires aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et à certains principes généraux du droit communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de Mme P. Lindh, président, MM. R. García-Valdecasas et J. D. Cooke, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 4 octobre 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

Cadre juridique

1 Le règlement (CEE) n° 404/93 du Conseil, du 13 février 1993, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane (JO L 47, p. 1), a mis en place, à partir du 1er juillet 1993, un système commun d'importation de bananes qui s'est substitué aux différents régimes nationaux. Une distinction a été opérée entre les «bananes communautaires», récoltées dans la Communauté, les «bananes pays tiers», en provenance de pays tiers autres que les États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), les «bananes traditionnelles ACP» et les «bananes non traditionnelles ACP». Les bananes traditionnelles ACP et les bananes non traditionnelles ACP correspondaient aux quantités de bananes exportées par les pays ACP qui, respectivement, n'excédaient pas ou dépassaient les quantités exportées traditionnellement par chacun de ces États, telles que fixées en annexe au règlement n° 404/93.

2 Pour assurer une commercialisation satisfaisante des bananes communautaires ainsi que des bananes originaires des États ACP et des autres pays tiers, le règlement n° 404/93 prévoyait l'ouverture d'un contingent tarifaire annuel de 2,2 millions de tonnes (poids net) pour les importations de bananes pays tiers et de bananes non traditionnelles ACP.

3 L'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 404/93, ancienne version, opérait une répartition de ce contingent tarifaire, l'ouvrant à concurrence de 66,5 % à la catégorie des opérateurs qui avaient commercialisé des bananes pays tiers et/ou des bananes non traditionnelles ACP (catégorie A), 30 % à la catégorie des opérateurs qui avaient commercialisé des bananes communautaires et/ou des bananes traditionnelles ACP (catégorie B) et 3,5 % à la catégorie des opérateurs établis dans la Communauté qui avaient commencé à commercialiser des bananes autres que les bananes communautaires et/ou traditionnelles ACP à partir de 1992 (catégorie C).

4 L'article 19, paragraphe 2, première phrase, du règlement n° 404/93, ancienne version, était libellé comme suit:

«Sur la base de calculs séparés pour chacune des catégories d'opérateurs visés au paragraphe 1 [...] chaque opérateur obtient des certificats d'importation en fonction des quantités moyennes de bananes qu'il a vendues dans les trois dernières années pour lesquelles des chiffres sont disponibles.»

5 Le règlement (CEE) n° 1442/93 de la Commission, du 10 juin 1993, portant modalités d'application du régime d'importation de bananes dans la Communauté (JO L 142, p. 6), définissait, notamment, les critères de détermination des types d'opérateurs des catégories A et B qui pouvaient présenter des demandes de certificats d'importation, selon l'activité que ces opérateurs avaient exercée au cours...

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