Innoweb BV v Wegener ICT Media BV and Wegener Mediaventions BV.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:850
Date19 December 2013
Celex Number62012CJ0202
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑202/12
62012CJ0202

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

19 décembre 2013 ( *1 )

«Directive 96/9/CE — Protection juridique des bases de données — Article 7, paragraphes 1 et 5 — Droit sui generis du fabricant d’une base de données — Notion de ‘réutilisation’ — Partie substantielle du contenu de la base de données — Métamoteur de recherche dédié»

Dans l’affaire C‑202/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Gerechtshof te 's‑Gravenhage (Pays-Bas), par décision du 27 mars 2012, parvenue à la Cour le 30 avril 2012, dans la procédure

Innoweb BV

contre

Wegener ICT Media BV,

Wegener Mediaventions BV,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. T. von Danwitz (rapporteur), président de chambre, MM. E. Juhász, A. Rosas, D. Šváby et C. Vajda, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

pour Innoweb BV, par Mes M. H. Elferink et M. A. S. M. van Leent, advocaten,

pour Wegener ICT Media BV et Wegener Mediaventions BV, par Me J. van Manen, advocaat,

pour la Commission européenne, par Mme J. Samnada et M. F. Wilman, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 7 de la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données (JO L 77, p. 20).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Innoweb BV (ci-après «Innoweb») à Wegener ICT Media BV et Wegener Mediaventions BV (ci-après ensemble «Wegener»), au sujet de l’exploitation par Innoweb, au moyen de son site Internet, d’un «métamoteur de recherche dédié» permettant d’effectuer des recherches sur des sites Internet de tiers, et notamment sur celui proposé par Wegener, qui contiennent des recueils d’annonces de vente de voitures.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 39, 42 et 48 de la directive 96/9 sont libellés comme suit:

«(39)

[…] la présente directive a pour objectif de protéger les fabricants de bases de données contre l’appropriation des résultats obtenus de l’investissement financier et professionnel consenti par celui qui a recherché et rassemblé le contenu, en protégeant l’ensemble ou des parties substantielles de la base de données contre certains actes commis par l’utilisateur ou par un concurrent;

[…]

(42)

[…] le droit spécifique d’empêcher l’extraction et/ou la réutilisation non autorisées vise des actes de l’utilisateur qui outrepassent les droits légitimes de celui-ci et qui portent ainsi préjudice à l’investissement; que le droit d’interdire l’extraction et/ou la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu vise non seulement la fabrication d’un produit concurrent parasite, mais aussi l’utilisateur qui, par ses actes, porte atteinte de manière substantielle, évaluée qualitativement ou quantitativement, à l’investissement;

[…]

(48)

[…] l’objectif de la présente directive […] est d’assurer un niveau de protection appropriée et homogène aux bases de données, afin de garantir la rémunération du fabricant de la base […]»

4

Cette directive a pour objet, selon son article 1er, paragraphe 1, la protection juridique des bases de données, quelles que soient leurs formes. La base de données est définie, au paragraphe 2 de cet article, comme «un recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d’une autre manière».

5

Sous le chapitre III de ladite directive, intitulé «Droit ‘sui generis’», l’article 7 de celle-ci, relatif à l’objet de la protection, dispose:

«1. Les États membres prévoient pour le fabricant d’une base de données le droit d’interdire l’extraction et/ou la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle, évaluée de façon qualitative ou quantitative, du contenu de celle-ci, lorsque l’obtention, la vérification ou la présentation de ce contenu attestent un investissement substantiel du point de vue qualitatif ou quantitatif.

2. Aux fins du présent chapitre, on entend par:

a)

‘extraction’: le transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support par quelque moyen ou sous quelque forme que ce soit;

b)

‘réutilisation’: toute forme de mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu de la base par distribution de copies, par location, par transmission en ligne ou sous d’autres formes. La première vente d’une copie d’une base de données dans la Communauté par le titulaire du droit, ou avec son consentement, épuise le droit de contrôler la revente de cette copie dans la Communauté.

Le prêt public n’est pas un acte d’extraction ou de réutilisation.

[…]

5. L’extraction et/ou la réutilisation répétées et systématiques de parties non substantielles du contenu de la base de données qui supposeraient des actes contraires à une exploitation normale de cette base, ou qui causeraient un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du fabricant de la base, ne sont pas autorisées.»

Le droit néerlandais

6

La directive 96/9 a été transposée dans l’ordre juridique néerlandais par l’adoption de la loi sur les bases de données (Databankenwet), du 8 juillet 1999 (Stb. 1999, no 303).

7

L’article 2, paragraphe 1, de cette loi dispose:

«Le producteur d’une base de données a le droit exclusif d’autoriser les actes suivants:

a.

l’extraction ou la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle, évaluée de façon qualitative ou quantitative, du contenu de la base de données;

b.

l’extraction ou la réutilisation répétées et systématiques de parties non substantielles, évaluées de façon qualitative ou quantitative, du contenu de la base de données pour autant qu’elles supposent des actes contraires à une exploitation normale de cette base, ou qu’elles causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du producteur de la base de données.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

8

Wegener donne accès, par l’intermédiaire de son site Internet www.autotrack.nl (ci-après «AutoTrack»), à un recueil en ligne d’annonces de vente de voitures. Ce recueil contient une liste de 190000 à 200000 voitures d’occasion, mise à jour quotidiennement. Environ 40000 de ces annonces ne figurent que sur le site AutoTrack. Les autres annonces peuvent également être trouvées sur d’autres sites d’annonces. À l’aide du moteur de recherche du site AutoTrack, l’internaute peut effectuer une recherche ciblée d’un véhicule sur la base de différents critères.

9

Innoweb offre, via son site Internet www.gaspedaal.nl (ci-après «GasPedaal»), un métamoteur de recherche dédié à la vente de voitures. Un métamoteur de recherche utilise les moteurs de recherche d’autres sites Internet en transférant les requêtes de ses utilisateurs vers ces autres moteurs de recherche, ce qui le distingue de moteurs de recherche généraux tels que Google. La qualification «dédié» pour un métamoteur signifie que celui-ci est spécialisé en ce qu’il a vocation à permettre des recherches sur un ou plusieurs sujets déterminés. GasPedaal constitue un tel métamoteur de recherche dédié à des recherches visant des annonces de vente de voitures, dans la mesure où, par une seule requête déposée sur GasPedaal, l’internaute peut opérer simultanément des recherches dans plusieurs recueils d’annonces de vente de voitures figurant sur des sites de tiers, parmi lesquels figure AutoTrack.

10

Le métamoteur de recherche dédié GasPedaal permet de procéder à des recherches dans le recueil d’AutoTrack, d’une part, en fonction de différents critères, parmi lesquels figurent non seulement la marque, le modèle, le kilométrage, l’année de construction et le prix, mais également d’autres caractéristiques d’un véhicule, telles que notamment la couleur, la forme de la carrosserie, le type de carburant utilisé, le nombre de portes et la transmission, et, d’autre part, «en temps réel», c’est-à-dire au moment où l’utilisateur de GasPedaal émet sa requête. GasPedaal exécute cette requête «en traduction», c’est-à-dire en la traduisant au format nécessaire pour le moteur de recherche d’AutoTrack.

11

Les résultats trouvés sur AutoTrack, à savoir les voitures répondant aux critères choisis par l’utilisateur final, qui figurent également parmi les résultats d’autres sites sont réunis en un seul élément tout en affichant les liens vers toutes les sources dans lesquelles cette voiture a été trouvée. Une page Internet est ensuite établie avec la liste des résultats ainsi obtenus et réunis, qui affiche les informations essentielles relatives à chaque voiture, en particulier l’année de construction, le prix, le kilométrage et la photographie en miniature de celle-ci. Cette page Internet est stockée pendant environ 30 minutes sur le serveur de GasPedaal et envoyée à l’utilisateur ou présentée à celui-ci sur le site Internet de GasPedaal, sous l’apparence de ce site.

12

Le nombre total d’annonces sur les sites Internet dans lesquels GasPedaal procède à une recherche s’élève à environ 300000.

13

GasPedaal exécute par jour environ 100000 requêtes de recherche dans AutoTrack. Ainsi, environ 80 % des différentes...

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