Theodor Jäger v Finanzamt Kusel-Landstuhl.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:20
Docket NumberC-256/06
Celex Number62006CJ0256
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date17 January 2008

Affaire C-256/06

Theodor Jäger

contre

Finanzamt Kusel-Landstuhl

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesfinanzhof)

«Libre circulation des capitaux — Articles 73 B et 73 D du traité CE (devenus articles 56 CE et 58 CE) — Impôts sur les successions — Évaluation des biens compris dans la succession — Bien agricole et forestier situé dans un autre État membre — Méthode moins favorable d’évaluation du bien et de calcul de l’impôt dû»

Sommaire de l'arrêt

Libre circulation des capitaux — Restrictions — Impôt sur les successions

(Traité CE, art. 73 B, § 1, et 73 D (devenus art. 56, § 1, CE et 58 CE)

L’article 73 B, paragraphe 1, du traité (devenu article 56, paragraphe 1, CE), lu en combinaison avec l’article 73 D du traité (devenu article 58 CE), doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation d’un État membre qui, aux fins du calcul de l’impôt sur une succession se composant de biens situés sur le territoire dudit État et d’un bien agricole et forestier situé dans un autre État membre,

- prévoit que le bien situé dans cet autre État membre est pris en considération à hauteur de sa valeur vénale, alors qu’un bien identique situé sur le territoire national se voit appliquer une procédure particulière d’évaluation dont les résultats ne correspondent en moyenne qu’à 10 % de ladite valeur vénale, et

- réserve aux biens agricoles et forestiers situés sur le territoire national l’application d’un abattement octroyé en fonction de ces biens ainsi que la prise en compte de leur valeur résiduelle à concurrence de 60 % seulement de son montant.

En effet, une telle réglementation, en tant qu’elle aboutit à ce qu’une succession comprenant un bien agricole et forestier situé dans un autre État membre soit soumise, dans le premier État membre, à des droits de succession plus élevés que ceux qui seraient dus si les biens constituant la succession étaient exclusivement situés sur le territoire de ce dernier État, ont pour effet de restreindre les mouvements de capitaux en diminuant la valeur d’une succession comprenant un tel bien situé hors du territoire national.

Une telle réglementation nationale ne saurait être justifiée au motif qu'elle se rapporte à des situations qui ne sont pas objectivement comparables, dès lors que le calcul des droits de succession est, en application de ladite réglementation, directement lié à la valeur des biens inclus dans la succession, et que, partant, il n'existe objectivement aucune différence de situation de nature à justifier une inégalité de traitement fiscal en ce qui concerne le niveau des droits de succession dus au titre, respectivement, d'un bien situé sur le territoire national et d'un bien situé dans un autre État membre.

Par ailleurs, l’objectif consistant à éviter que la charge de l’impôt sur les successions mette en péril la continuation de l’activité des exploitations agricoles et forestières et, ainsi, le maintien de la fonction sociale de ces dernières n'est pas susceptible de justifier la réglementation en cause, vu qu’aucun élément ne permet de constater que les exploitations établies dans d’autres États membres ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle des exploitations situées sur le territoire national.

Il en va de même pour d’éventuelles difficultés rencontrées lors de la détermination de la valeur d’un bien situé sur le territoire d’un autre État membre selon une procédure nationale particulière, ces difficultés ne pouvant suffire à justifier un refus catégorique d’accorder l’avantage fiscal tel qu’il découle de la réglementation en cause laquelle, hormis ladite procédure d’évaluation, réserve également l’application de deux autres avantages fiscaux aux biens situés sur le territoire national.

(cf. points 32, 43-44, 52, 54-55, 57 et disp.)







ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

17 janvier 2008 (*)

«Libre circulation des capitaux – Articles 73 B et 73 D du traité CE (devenus articles 56 CE et 58 CE) – Impôts sur les successions – Évaluation des biens compris dans la succession – Bien agricole et forestier situé dans un autre État membre – Méthode moins favorable d’évaluation du bien et de calcul de l’impôt dû»

Dans l’affaire C-256/06,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Bundesfinanzhof (Allemagne), par décision du 11 avril 2006, parvenue à la Cour le 8 juin 2006, dans la procédure

Theodor Jäger

contre

Finanzamt Kusel-Landstuhl,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. L. Bay Larsen (rapporteur), K. Schiemann, J. Makarczyk et Mme C. Toader, juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

– pour M. Jäger, par Me K. Cronauer, Rechtsanwältin,

– pour le Finanzamt Kusel-Landstuhl, par M. M. Trauten, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement allemand, par MM. M. Lumma et U. Forsthoff, en qualité d’agents,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. R. Lyal et W. Mölls, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 septembre 2007,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 73 B et 73 D du traité CE (devenus, respectivement, articles 56 CE et 58 CE).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Jäger au Finanzamt Kusel-Landstuhl (ci-après le «Finanzamt») au sujet du calcul des droits dus sur une succession se composant de biens situés en Allemagne et d’une propriété à vocation agricole et forestière située en France, et, en particulier, des règles relatives à l’évaluation de ces biens.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3 L’annexe I de la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en œuvre de l’article 67 du traité [article abrogé par le traité d’Amsterdam] (JO L 178, p. 5), intitulée «Nomenclature des mouvements de capitaux visés à l’article 1er de la directive», comprend treize catégories de mouvements de capitaux.

4 La onzième de ces catégories, consacrée aux «Mouvements de capitaux à caractère personnel», comprend, notamment, une rubrique intitulée «Successions et legs».

La réglementation nationale

L’application des droits de succession aux biens situés dans un autre État membre

5 En vertu de l’article 2, paragraphe 1, point 1, de la loi sur les droits de succession et de donation (Erbschaftsteuer- und Schenkungsteuergesetz), dans sa version publiée au BGBl. 1997 I, p. 378 (ci-après l’«ErbStG»), la totalité de la dévolution patrimoniale d’une personne domiciliée en Allemagne est soumise aux droits de succession à la date à laquelle l’impôt a pris naissance. Les biens situés à l’étranger y sont également soumis.

6 L’article 21 de l’ErbStG régit, aux fins du calcul des droits de succession en Allemagne, l’imputation des droits de succession acquittés dans un autre État en l’absence de convention fiscale préventive de la double imposition. Son paragraphe 1, première phrase, dispose:

«Lorsque des acquéreurs dont le patrimoine étranger est soumis, dans un pays étranger, à une imposition – étrangère – correspondant aux droits de succession allemands, les droits étrangers fixés et dus par l’acquéreur, acquittés et non susceptibles de bénéficier d’une réduction, sont, dans les cas visés à l’article 2, paragraphe 1, point 1, et dans la mesure où les dispositions d’une convention [fiscale] préventive de [la] double imposition ne sont pas applicables, imputés, si une demande est faite en ce sens, sur les droits de succession allemands dans la mesure où le patrimoine étranger est également soumis aux droits de succession allemands.»

7 La deuxième phrase de cette disposition prévoit:

«Si le patrimoine dévolu n’est composé qu’en partie d’un patrimoine étranger, la part des droits de succession allemands correspondant à ce patrimoine doit être déterminée de telle manière que les droits de succession qui en découlent pour l’ensemble du patrimoine imposable, y compris le patrimoine étranger imposable, soient divisés proportionnellement selon le rapport entre le patrimoine étranger imposable et l’ensemble du patrimoine imposable.»

Les règles d’évaluation des biens agricoles et forestiers

8 Aux termes de l’article 12, paragraphe 6, de l’ErbStG, lu en combinaison avec les articles 9 et 31 de la loi d’évaluation (Bewertungsgesetz, BGBl. 1991 I, p. 230, ci-après le «BewG»), un patrimoine agricole et forestier situé à l’étranger est évalué à sa valeur vénale. Celle-ci se définit, en vertu de l’article 9, paragraphe 2, du BewG, par le prix auquel ce bien pourrait être vendu dans le cadre de transactions commerciales normales.

9 En revanche, un patrimoine agricole et forestier situé en Allemagne est évalué conformément à l’article 12, paragraphe 3, de l’ErbStG, selon une procédure particulière prévue aux articles 140 à 144 du BewG. Les évaluations réalisées suivant cette procédure ne correspondent, en moyenne, qu’à 10 % de la valeur vénale des patrimoines concernés.

10 Ces dispositions du BewG, qui ont été insérées...

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