Firma Brita GmbH v Hauptzollamt Hamburg-Hafen.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:91
Date25 February 2010
Celex Number62008CJ0386
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-386/08

Affaire C-386/08

Firma Brita GmbH

contre

Hauptzollamt Hamburg-Hafen

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Finanzgericht Hamburg)

«Accord d’association CE-Israël — Champ d’application territorial — Accord d’association CE-OLP — Refus d’application du régime tarifaire préférentiel accordé en faveur des produits originaires d’Israël aux produits originaires de Cisjordanie — Doutes quant à l’origine des produits — Exportateur agréé — Contrôle a posteriori des déclarations sur facture par les autorités douanières de l’État d’importation — Convention de Vienne sur le droit des traités — Principe de l’effet relatif des traités»

Sommaire de l'arrêt

1. Accords internationaux — Accord d'association CE-Israël — Régime tarifaire préférentiel en faveur des produits originaires d’Israël

(Accord d'association CE-Israël, art. 83; accord d’association CE-OLP, protocole nº 3, art. 16, § 4)

2. Accords internationaux — Accord d'association CE-Israël — Régime tarifaire préférentiel en faveur des produits originaires d’Israël

(Accord d'association CE-Israël, protocole nº 4, art. 32, § 6, et 39)

1. Les autorités douanières de l’État membre d’importation peuvent refuser d’accorder le bénéfice du traitement préférentiel instauré par l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et l’État d’Israël, d’autre part, dès lors que les marchandises concernées sont originaires de Cisjordanie.

En effet, l’article 16, paragraphe 4, du protocole nº 3 annexé à l’accord d’association euro-méditerranéen intérimaire relatif aux échanges commerciaux et à la coopération entre la Communauté européenne, d’une part, et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), agissant pour le compte de l’Autorité palestinienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, d'autre part, implique que seules les autorités douanières de Cisjordanie et de la bande de Gaza sont habilitées à délivrer un certificat de circulation des marchandises EUR.1 si les produits concernés peuvent être considérés comme des produits originaires de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Dès lors, interpréter l’article 83 de l’accord d’association CE-Israël de telle sorte que les autorités israéliennes seraient investies de compétences douanières à l’égard des produits originaires de Cisjordanie reviendrait à imposer aux autorités douanières palestiniennes l’obligation de ne pas exercer les compétences qui leur sont pourtant dévolues par les dispositions dudit protocole. Une telle interprétation, ayant pour effet de créer une obligation pour un sujet tiers sans son consentement, irait ainsi à l’encontre du principe de droit international général «pacta tertiis nec nocent nec prosunt», tel que codifié à l’article 34 de la convention de Vienne sur le droit des traités.

En outre, les autorités douanières de l’État membre d’importation ne peuvent pas procéder à un concours de qualifications en laissant ouverte la question de savoir lequel, parmi les accords entrant en ligne de compte, à savoir l’accord d’association CE-Israël et l’accord d’association CE-OLP, est d’application dans un cas d’espèce et si la preuve de l’origine devrait émaner des autorités israéliennes ou des autorités palestiniennes.

(cf. points 50, 52, 58, disp. 1)

2. Dans le cadre de la procédure prévue à l’article 32 du protocole nº 4 annexé à l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et l’État d’Israël, d’autre part, les autorités douanières de l’État d’importation ne sont pas liées par la preuve d’origine présentée et par la réponse des autorités douanières de l’État d’exportation lorsque ladite réponse ne comporte pas de renseignements suffisants au sens de l’article 32, paragraphe 6, de ce protocole pour déterminer l’origine réelle des produits.

En outre, les autorités douanières de l’État d’importation ne sont pas dans l’obligation de soumettre au comité de coopération douanière instauré par l’article 39 dudit protocole un différend portant sur l’interprétation du champ d’application territorial dudit accord.

(cf. point 73, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

25 février 2010 (*)

«Accord d’association CE-Israël – Champ d’application territorial – Accord d’association CE-OLP – Refus d’application du régime tarifaire préférentiel accordé en faveur des produits originaires d’Israël aux produits originaires de Cisjordanie – Doutes quant à l’origine des produits – Exportateur agréé – Contrôle a posteriori des déclarations sur facture par les autorités douanières de l’État d’importation – Convention de Vienne sur le droit des traités – Principe de l’effet relatif des traités»

Dans l’affaire C‑386/08,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Finanzgericht Hamburg (Allemagne), par décision du 30 juillet 2008, parvenue à la Cour le 1er septembre 2008, dans la procédure

Firma Brita GmbH

contre

Hauptzollamt Hamburg-Hafen,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de la troisième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. E. Juhász, J. Malenovský (rapporteur) et T. von Danwitz, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 septembre 2009,

considérant les observations présentées:

– pour Firma Brita GmbH, par Me D. Ehle, Rechtsanwalt,

– pour la Commission européenne, par Mme C. Tufvesson, M. F. Hoffmeister et Mme L. Bouyon, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 29 octobre 2009,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et l’État d’Israël, d’autre part, signé à Bruxelles le 20 novembre 1995 (JO 2000, L 147, p. 3, ci-après l’«accord d’association CE-Israël»), en tenant compte de l’accord d’association euro-méditerranéen intérimaire relatif aux échanges commerciaux et à la coopération entre la Communauté européenne, d’une part, et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), agissant pour le compte de l’Autorité palestinienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, d’autre part, signé à Bruxelles le 24 février 1997 (JO 1997, L 187, p. 3, ci-après l’«accord d’association CE-OLP»).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige douanier opposant Firma Brita GmbH, société de droit allemand, au Hauptzollamt Hamburg-Hafen (administration douanière du port de Hambourg), au sujet de la décision de celui-ci de refuser d’accorder à la requérante au principal l’importation en traitement préférentiel de biens fabriqués en Cisjordanie.

Le cadre juridique

La convention de Vienne

3 Aux termes de l’article 1er de la convention de Vienne sur le droit des traités, du 23 mai 1969 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1155, p. 331, ci-après la «convention de Vienne»), intitulé «Portée de la présente convention», celle-ci s’applique aux traités entre États.

4 L’article 3 de la convention de Vienne, intitulé «Accords internationaux n’entrant pas dans le cadre de la présente convention», dispose:

«Le fait que la présente Convention ne s’applique ni aux accords internationaux conclus entre des États et d’autres sujets du droit international ou entre ces autres sujets du droit international ni aux accords internationaux qui n’ont pas été conclus par écrit ne porte pas atteinte:

[…]

b) À l’application à ces accords de toutes règles énoncées dans la présente convention auxquelles ils seraient soumis en vertu du droit international indépendamment de ladite convention;

[…]»

5 Aux termes de l’article 31 de la convention de Vienne, intitulé «Règle générale d’interprétation»:

«1. Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but.

2. Aux fins de l’interprétation d’un traité, […]

3. Il sera tenu compte, en même temps que du contexte:

[…]

c) De toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties.

[…]»

6 L’article 34 de cette convention, intitulé «Règle générale concernant les États tiers», énonce:

«Un traité ne crée ni obligations ni droits pour un État tiers sans son consentement.»

L’accord d’association CE-Israël

7 L’accord d’association CE-Israël, approuvé par la décision 2000/384/CE, CECA du Conseil et de la Commission, du 19 avril 2000 (JO L 147, p. 1), est entré en vigueur le 1er juin 2000.

8 Inséré dans le titre II de cet accord, relatif à la libre circulation des marchandises, l’article 6, paragraphe 1, de ce dernier dispose:

«La Communauté et Israël renforcent la zone de libre-échange selon les modalités énoncées dans le présent accord et en conformité avec les dispositions de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 et des autres accords multilatéraux sur le commerce de marchandises annexés à l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) […]»

9 Aux termes de l’article 8 dudit accord, en ce qui concerne les produits industriels au sens de cet accord et sous réserve des dérogations qui y sont prévues, «[l]es droits de douane à l’importation et à l’exportation ainsi que les taxes d’effet équivalent sont interdits entre la Communauté et Israël. […]»

10 L’article 75, paragraphe 1, de l’accord d’association CE-Israël dispose:

«Chacune des parties peut saisir le Conseil d’association de tout différend relatif à l’application ou à l’interprétation du présent accord.»

11 Le champ d’application territorial de l’accord d’association CE-Israël est défini à l’article 83 de ce dernier comme suit:

«Le présent accord...

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