Colloseum Holding AG v Levi Strauss & Co.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:253
Docket NumberC‑12/12
Celex Number62012CJ0012
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date18 April 2013
62012CJ0012

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

18 avril 2013 ( *1 )

«Marques — Règlement (CE) no 40/94 — Article 15, paragraphe 1 — Notion d’‘usage sérieux’ — Marque utilisée uniquement en tant qu’élément d’une marque complexe ou en combinaison avec une autre marque»

Dans l’affaire C‑12/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesgerichtshof (Allemagne), par décision du 24 novembre 2011, parvenue à la Cour le 9 janvier 2012, dans la procédure

Colloseum Holding AG

contre

Levi Strauss & Co.,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. A. Rosas, E. Juhász (rapporteur), D. Šváby et C. Vajda, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 novembre 2012,

considérant les observations présentées:

pour Colloseum Holding AG, par Me M. Klette, Rechtsanwalt,

pour Levi Strauss & Co., par Mes H. Harte-Bavendamm et M. Goldmann, Rechtsanwälte,

pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme J. Kemper, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. M. Santoro, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme C. Murrell, en qualité d’agent, assistée de Mme S. Ford, barrister,

pour la Commission européenne, par MM. F. Bulst et F. Wilman, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), disposition qui a été reprise sans modification à l’article 15, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Colloseum Holding AG (ci-après «Colloseum») à Levi Strauss & Co. (ci-après «Levi Strauss») au sujet de l’interprétation de la notion d’«usage sérieux», figurant à l’article 15, paragraphe 1, du règlement no 40/94, lorsqu’une marque enregistrée n’est utilisée que par l’intermédiaire d’une autre marque complexe dont elle constitue un des éléments, ou lorsqu’elle n’est utilisée que conjointement avec une autre marque, la combinaison des deux marques étant elle-même enregistrée comme marque.

Le cadre juridique

Le droit international

3

L’article 5, C, points 1 et 2, de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, signée à Paris le 20 mars 1883, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 et modifiée le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 828, no 11851, p. 305), stipule:

«(1) Si, dans un pays, l’utilisation de la marque enregistrée est obligatoire, l’enregistrement ne pourra être annulé qu’après un délai équitable et si l’intéressé ne justifie pas des causes de son inaction.

(2) L’emploi d’une marque de fabrique ou de commerce, par le propriétaire, sous une forme qui diffère, par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée dans l’un des pays de l’Union [créée par cette convention], n’entraînera pas l’invalidation de l’enregistrement et ne diminuera pas la protection accordée à la marque.»

Le droit de l’Union

4

Le neuvième considérant du règlement no 40/94 énonce:

«considérant qu’il n’est justifié de protéger les marques communautaires et, contre celles-ci, toute marque enregistrée qui leur est antérieure, que dans la mesure où ces marques sont effectivement utilisées».

5

L’article 7 de ce règlement, intitulé «Motifs absolus de refus», prévoit à son paragraphe 1:

«Sont refusés à l’enregistrement:

[...]

b)

les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif;

c)

les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux ci;

d)

les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce;

[...]»

6

L’article 7, paragraphe 3, du même règlement est libellé comme suit:

«Le paragraphe 1 points b), c) et d) n’est pas applicable si la marque a acquis pour les produits ou services pour lesquels est demandé l’enregistrement un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait.»

7

L’article 9 du règlement no 40/94, intitulé «Droit conféré par la marque communautaire», dispose à son paragraphe 1:

«La marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires:

[...]

b)

d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque;

[...]»

8

L’article 15 dudit règlement, intitulé «Usage de la marque communautaire», prévoit:

«1. Si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque communautaire n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque communautaire est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage.

2. Sont également considérés comme usage au sens du paragraphe 1:

a)

l’emploi de la marque communautaire sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle ci a été enregistrée;

[...]»

9

L’article 98 du règlement no 40/94 énonce à son paragraphe 1:

«Lorsqu’un tribunal des marques communautaires constate que le défendeur a contrefait ou menacé de contrefaire une marque communautaire, il rend, sauf s’il y a des raisons particulières de ne pas agir de la sorte, une ordonnance lui interdisant de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon. Il prend également, conformément à la loi nationale, les mesures propres à garantir le respect de cette interdiction.»

Le droit allemand

10

L’article 14, paragraphe 2, point 2, de la loi sur la protection des marques et autres signes (Gesetz über den Schutz von Marken und sonstigen Kennzeichen, BGBl. 1994 I, p. 3082), telle que modifiée par loi du 7 juillet 2008 (BGBl. 2008 I, p. 1191), disposition qui correspond à l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, prévoit le droit du titulaire d’une marque d’interdire l’usage:

«[...] d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public, risque comprenant celui d’association entre le signe et la marque, [...]»

11

L’article 14, paragraphe 5, de cette loi dispose:

«Quiconque utilise un signe en violation des paragraphes 2 à 4 peut être poursuivi par le titulaire de la marque dans le cadre d’une action en cessation, en cas de risque de récidive. Le droit à interdiction peut être revendiqué même lorsqu’une infraction menace de se produire pour la première fois.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

12

Levi Strauss est titulaire de plusieurs marques et, notamment, de la marque verbale communautaire LEVI’S, entre autres, pour des vêtements, et de la marque verbale et figurative allemande no DD 641 687, enregistrée le 12 janvier 1977, pour des pantalons, des chemises, des blouses, et des vestes pour hommes, femmes et enfants (ci-après la «marque no 3»). Cette dernière marque, qui comporte dans un élément rectangulaire rouge situé au bord supérieur gauche d’une poche l’élément verbal «LEVI’S», se présente comme suit:

Image

13

Levi Strauss est également titulaire de la marque figurative communautaire no 2 292 373 en couleurs, à savoir rouge et bleu, enregistrée le 10 février 2005 pour des pantalons (ci-après la «marque no 6»). Selon sa description au registre, elle constitue une marque de position et est composée d’une étiquette rectangulaire rouge, en textile, cousue dans et ressortant de la partie supérieure de la couture gauche de la poche arrière de pantalons, de shorts ou de jupes. Elle se présente comme suit:

Image

14

L’inscription au registre de la marque no 6 comporte une déclaration de renonciation, en vertu de laquelle ladite marque n’ouvre aucun droit d’exclusivité quant à la forme et à la couleur de la poche en soi. La marque no 6 a été enregistrée sur la base d’un caractère distinctif acquis par l’usage, conformément à l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 40/94.

15

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