Eva Glawischnig-Piesczek v Facebook Ireland Limited.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:821
Date03 October 2019
Celex Number62018CJ0018
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-18/18
62018CJ0018

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

3 octobre 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Société de l’information – Libre circulation des services – Directive 2000/31/CE – Responsabilité des prestataires intermédiaires – Article 14, paragraphes 1 et 3 – Prestataire de services d’hébergement – Possibilité d’exiger du prestataire qu’il mette un terme à une violation ou qu’il prévienne une violation – Article 18, paragraphe 1 – Limites personnelle, matérielle et territoriale à la portée d’une injonction – Article 15, paragraphe 1 – Absence d’obligation générale en matière de surveillance »

Dans l’affaire C‑18/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), par décision du 25 octobre 2017, parvenue à la Cour le 10 janvier 2018, dans la procédure

Eva Glawischnig-Piesczek

contre

Facebook Ireland Limited,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, MM. F. Biltgen, J. Malenovský (rapporteur), C. G. Fernlund et Mme L. S. Rossi, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. D. Dittert, chef d’unité,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 février 2019,

considérant les observations présentées :

pour Mme Glawischnig-Piesczek, par Mes M. Windhager et W. Niklfeld, Rechtsanwälte,

pour Facebook Ireland Limited, par Mes G. Kresbach, K. Struckmann et A. Tauchen, Rechtsanwälte,

pour le gouvernement autrichien, par MM. G. Hesse et G. Kunnert ainsi que par Mme A. Jurgutyte-Ruez, en qualité d’agents,

pour le gouvernement letton, par Mmes I. Kucina, E. Petrocka-Petrovska et V. Soņeca, en qualité d’agents,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes et M. Figueiredo, en qualité d’agents, assistés de M. T. Rendas, conseiller juridique,

pour le gouvernement finlandais, par M. J. Heliskoski, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par MM. G. Braun, F. Wilman et S. L. Kalėda ainsi que par Mme P. Costa de Oliveira, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 juin 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique ») (JO 2000, L 178, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Eva Glawischnig-Piesczek à Facebook Ireland Limited, dont le siège social se trouve en Irlande, au sujet de la publication, sur la page d’un utilisateur hébergée sur le site du réseau social Facebook, d’un message contenant des déclarations portant atteinte à l’honneur de Mme Glawischnig-Piesczek.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 6, 7, 9, 10, 40, 41, 45 à 48, 52, 58 et 60 de la directive 2000/31 énoncent :

« (6)

[...] La présente directive, en ne traitant que certaines questions spécifiques qui soulèvent des problèmes pour le marché intérieur, est pleinement cohérente avec la nécessité de respecter le principe de subsidiarité tel qu’énoncé à l’article 5 du traité.

(7)

Pour garantir la sécurité juridique et la confiance du consommateur, il y a lieu que la présente directive établisse un cadre général clair pour couvrir certains aspects juridiques du commerce électronique dans le marché intérieur.

[...]

(9)

Dans bien des cas, la libre circulation des services de la société de l’information peut refléter spécifiquement, dans la législation communautaire, un principe plus général, à savoir la liberté d’expression, consacrée par l’article 10, paragraphe 1, de la convention [européenne] de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, [signée à Rome le 4 novembre 1950,] qui a été ratifiée par tous les États membres. Pour cette raison, les directives couvrant la fourniture de services de la société de l’information doivent assurer que cette activité peut être exercée librement en vertu de l’article précité, sous réserve uniquement des restrictions prévues au paragraphe 2 du même article et à l’article 46, paragraphe 1, du traité. La présente directive n’entend pas porter atteinte aux règles et principes fondamentaux nationaux en matière de liberté d’expression.

(10)

Conformément au principe de proportionnalité, les mesures prévues par la présente directive se limitent strictement au minimum requis pour atteindre l’objectif du bon fonctionnement du marché intérieur. Là où il est nécessaire d’intervenir au niveau communautaire, et afin de garantir un espace qui soit réellement sans frontières intérieures pour le commerce électronique, la directive doit assurer un haut niveau de protection des objectifs d’intérêt général, en particulier la protection des mineurs, de la dignité humaine, du consommateur et de la santé publique. [...]

[...]

(40)

Les divergences existantes et émergentes entre les législations et les jurisprudences des États membres dans le domaine de la responsabilité des prestataires de services agissant en qualité d’intermédiaires empêchent le bon fonctionnement du marché intérieur, en particulier en gênant le développement des services transfrontaliers et en produisant des distorsions de concurrence. Les prestataires des services ont, dans certains cas, le devoir d’agir pour éviter les activités illégales ou pour y mettre fin. La présente directive doit constituer la base adéquate pour l’élaboration de mécanismes rapides et fiables permettant de retirer les informations illicites et de rendre l’accès à celles-ci impossible. [...]

(41)

La présente directive instaure un équilibre entre les différents intérêts en jeu et établit des principes qui peuvent servir de base aux normes et aux accords adoptés par les entreprises.

[...]

(45)

Les limitations de responsabilité des prestataires de services intermédiaires prévues dans la présente directive sont sans préjudice de la possibilité d’actions en cessation de différents types. Ces actions en cessation peuvent notamment revêtir la forme de décisions de tribunaux ou d’autorités administratives exigeant qu’il soit mis un terme à toute violation ou que l’on prévienne toute violation, y compris en retirant les informations illicites ou en rendant l’accès à ces dernières impossible.

(46)

Afin de bénéficier d’une limitation de responsabilité, le prestataire d’un service de la société de l’information consistant dans le stockage d’informations doit, dès qu’il prend effectivement connaissance ou conscience du caractère illicite des activités, agir promptement pour retirer les informations concernées ou rendre l’accès à celles-ci impossible. Il y a lieu de procéder à leur retrait ou de rendre leur accès impossible dans le respect du principe de la liberté d’expression et des procédures établies à cet effet au niveau national. La présente directive n’affecte pas la possibilité qu’ont les États membres de définir des exigences spécifiques auxquelles il doit être satisfait promptement avant de retirer des informations ou d’en rendre l’accès impossible.

(47)

L’interdiction pour les États membres d’imposer aux prestataires de services une obligation de surveillance ne vaut que pour les obligations à caractère général. Elle ne concerne pas les obligations de surveillance applicables à un cas spécifique et, notamment, elle ne fait pas obstacle aux décisions des autorités nationales prises conformément à la législation nationale.

(48)

La présente directive n’affecte en rien la possibilité qu’ont les États membres d’exiger des prestataires de services qui stockent des informations fournies par des destinataires de leurs services qu’ils agissent avec les précautions que l’on peut raisonnablement attendre d’eux et qui sont définies dans la législation nationale, et ce afin de détecter et d’empêcher certains types d’activités illicites.

[...]

(52)

L’exercice effectif des libertés du marché intérieur nécessite de garantir aux victimes un accès efficace aux règlements des litiges. Les dommages qui peuvent se produire dans le cadre des services de la société de l’information se caractérisent à la fois par leur rapidité et leur étendue géographique. En raison de cette spécificité et de la nécessité de veiller à ce que les autorités nationales ne mettent pas en cause la confiance qu’elles doivent s’accorder mutuellement, la présente directive invite les États membres à faire en sorte que les recours juridictionnels appropriés soient disponibles. Les États membres doivent évaluer la nécessité de fournir un accès aux procédures juridictionnelles par les moyens électroniques appropriés.

[...]

(58)

La présente directive ne doit pas s’appliquer aux services fournis par des prestataires établis dans un pays tiers. Compte tenu de la dimension mondiale du service électronique, il convient toutefois d’assurer la cohérence des règles communautaires avec les règles internationales. La présente directive est sans préjudice des résultats des discussions en cours sur les aspects juridiques dans les organisations internationales (entre autres, OMC, OCDE, Cnudci).

[...]

(60)

Pour permettre un développement sans entrave du commerce électronique, le cadre juridique doit être clair et simple, prévisible et cohérent avec les règles applicables au niveau international...

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