Sergejs Buivids v Datu valsts inspekcija.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
ECLIECLI:EU:C:2019:122
Date14 February 2019
Celex Number62017CJ0345
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-345/17
62017CJ0345

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

14 février 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Traitement des données à caractère personnel – Directive 95/46/CE – Article 3 – Champ d’application – Enregistrement vidéo de membres de la police dans un commissariat de police pendant l’exécution d’actes de nature procédurale – Publication sur un site Internet de vidéos – Article 9 – Traitement de données à caractère personnel aux seules fins de journalisme – Notion – Liberté d’expression – Protection de la vie privée »

Dans l’affaire C‑345/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie), par décision du 1er juin 2017, parvenue à la Cour le 12 juin 2017, dans la procédure engagée par

Sergejs Buivids

en présence de :

Datu valsts inspekcija,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de la Cour, faisant fonction de président de la deuxième chambre, Mmes A. Prechal, C. Toader, MM. A. Rosas (rapporteur) et M. Ilešič, juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : M. M. Aleksejev, chef d’unité,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 juin 2018,

considérant les observations présentées :

pour M. Buivids, par lui-même,

pour le gouvernement letton, par Mmes I. Kucina, G. Bambāne, E. Petrocka-Petrovska et E. Plaksins, en qualité d’agents,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek, J. Vláčil et O. Serdula, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme M. Russo, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement autrichien, par M. G. Eberhard, en qualité d’agent,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes et M. Figueiredo ainsi que par Mme C. Vieira Guerra, en qualité d’agents,

pour le gouvernement suédois, par Mmes A. Falk, C. Meyer-Seitz, P. Smith, H. Shev, L. Zettergren et A. Alriksson, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. D. Nardi et Mme I. Rubene, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 27 septembre 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO 1995, L 281, p. 31), et notamment de son article 9.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Sergejs Buivids à la Datu valsts inspekcija (Autorité nationale de la protection des données, Lettonie) au sujet d’un recours visant à déclarer illégale une décision de cette autorité, selon laquelle M. Buivids aurait violé la législation nationale en publiant sur le site Internet www.youtube.com une vidéo, filmée par lui-même, de la prise de sa déposition dans les locaux du commissariat de la police nationale dans le cadre d’une procédure d’infraction administrative.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Avant son abrogation par le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO 2016, L 119, p. 1), la directive 95/46 qui, selon son article 1er, avait pour objet la protection des libertés et des droits fondamentaux des personnes physiques, notamment du droit à la vie privée, à l’égard du traitement des données à caractère personnel, ainsi que l’élimination des obstacles à la libre circulation de ces données, énonçait, à ses considérants 2, 14, 15, 17, 27 et 37 :

« (2)

considérant que les systèmes de traitement de données sont au service de l’homme ; qu’ils doivent, quelle que soit la nationalité ou la résidence des personnes physiques, respecter les libertés et droits fondamentaux de ces personnes, notamment la vie privée, et contribuer au progrès économique et social, au développement des échanges ainsi qu’au bien-être des individus ;

[...]

(14)

considérant que, compte tenu de l’importance du développement en cours, dans le cadre de la société de l’information, des techniques pour capter, transmettre, manipuler, enregistrer, conserver ou communiquer les données constituées par des sons et des images, relatives aux personnes physiques, la présente directive est appelée à s’appliquer aux traitements portant sur ces données ;

(15)

considérant que les traitements portant sur de telles données ne sont couverts par la présente directive que s’ils sont automatisés ou si les données sur lesquelles ils portent sont contenues ou sont destinées à être contenues dans un fichier structuré selon des critères spécifiques relatifs aux personnes, afin de permettre un accès aisé aux données à caractère personnel en cause ;

[...]

(17)

considérant que, pour ce qui est des traitements de sons et d’images mis en œuvre à des fins de journalisme ou d’expression littéraire ou artistique, notamment dans le domaine audiovisuel, les principes de la directive s’appliquent d’une manière restreinte selon les dispositions prévues à l’article 9 ;

[...]

(27)

considérant que la protection des personnes doit s’appliquer aussi bien au traitement de données automatisé qu’au traitement manuel ; que le champ de cette protection ne doit pas en effet dépendre des techniques utilisées, sauf à créer de graves risques de détournement ; que, toutefois, s’agissant du traitement manuel, la présente directive ne couvre que les fichiers et ne s’applique pas aux dossiers non structurés ; [...]

[...]

(37)

considérant que le traitement de données à caractère personnel à des fins de journalisme ou d’expression artistique ou littéraire, notamment dans le domaine audiovisuel, doit bénéficier de dérogations ou de limitations de certaines dispositions de la présente directive dans la mesure où elles sont nécessaires à la conciliation des droits fondamentaux de la personne avec la liberté d’expression, et notamment la liberté de recevoir ou de communiquer des informations, telle que garantie notamment à l’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales[, signée à Rome le 4 novembre 1950] ; qu’il incombe donc aux États membres, aux fins de la pondération entre les droits fondamentaux, de prévoir les dérogations et limitations nécessaires en ce qui concerne les mesures générales relatives à la légalité du traitement des données, [...] »

4

L’article 2 de la directive 95/46 disposait :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)

“données à caractère personnel” : toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable (personne concernée) ; est réputée identifiable une personne qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments spécifiques, propres à son identité physique, physiologique, psychique, économique, culturelle ou sociale ;

b)

“traitement de données à caractère personnel” (traitement) : toute opération ou ensemble d’opérations effectuées ou non à l’aide de procédés automatisés et appliquées à des données à caractère personnel, telles que la collecte, l’enregistrement, l’organisation, la conservation, l’adaptation ou la modification, l’extraction, la consultation, l’utilisation, la communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l’interconnexion, ainsi que le verrouillage, l’effacement ou la destruction ;

[...]

d)

“responsable du traitement” : la personne physique ou morale, l’autorité publique, le service ou tout autre organisme qui, seul ou conjointement avec d’autres, détermine les finalités et les moyens du traitement de données à caractère personnel ; lorsque les finalités et les moyens du traitement sont déterminés par des dispositions législatives ou réglementaires nationales ou [de l’Union], le responsable du traitement ou les critères spécifiques pour le désigner peuvent être fixés par le droit national ou [de l’Union] ;

[...] »

5

L’article 3 de cette directive, intitulé « Champ d’application », prévoyait :

« 1. La présente directive s’applique au traitement de données à caractère personnel, automatisé en tout ou en partie, ainsi qu’au traitement non automatisé de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans un fichier.

2. La présente directive ne s’applique pas au traitement de données à caractère personnel :

mis en œuvre pour l’exercice d’activités qui ne relèvent pas du champ d’application du droit communautaire, telles que celles prévues aux titres V et VI du traité sur l’Union européenne [dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne], et, en tout état de cause, aux traitements ayant pour objet la sécurité publique, la défense, la sûreté de l’État (y compris le bien-être économique de l’État lorsque ces traitements sont liés à des questions de sûreté de l’État) et les activités de l’État relatives à des domaines du droit pénal,

effectué par une personne physique pour l’exercice d’activités exclusivement personnelles ou domestiques. »

6

L’article 7 de ladite directive était libellé...

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