Commission of the European Communities v Grand Duchy of Luxemburg.
Jurisdiction | European Union |
Date | 30 November 2006 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Affaire C-32/05
Commission des Communautés européennes
contre
Grand-Duché de Luxembourg
«Manquement d'État — Environnement — Directive 2000/60/CE — Absence de communication des mesures de transposition — Obligation d'adopter une législation-cadre en droit national — Absence — Transposition incomplète ou absence de transposition des articles 2, 7, paragraphe 2, et 14»
Conclusions de l'avocat général Mme E. Sharpston, présentées le 18 mai 2006
Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 30 novembre 2006
Sommaire de l'arrêt
1. Actes des institutions — Directives — Exécution par les États membres
2. Actes des institutions — Directives — Exécution par les États membres
3. Environnement — Politique communautaire dans le domaine de l'eau — Directive 2000/60
(Directive du Parlement européen et du Conseil 2000/60, art. 1er et 2)
4. Recours en manquement — Objet du litige — Détermination au cours de la procédure précontentieuse
5. Environnement — Politique communautaire dans le domaine de l'eau — Directive 2000/60 — Obligation d'information et de consultation du public
(Directive du Parlement européen et du Conseil 2000/60, art. 13, § 6, et 14)
1. Il ressort de l'article 249, troisième alinéa, CE que la transposition en droit interne d'une directive n'exige pas nécessairement une action législative dans chaque État membre. Aussi, une reprise formelle des prescriptions d'une directive dans une disposition légale expresse et spécifique n'est pas toujours requise, la mise en oeuvre d'une directive pouvant, en fonction du contenu de celle-ci, se satisfaire d'un contexte juridique général. En particulier, l'existence de principes généraux de droit constitutionnel ou administratif peut rendre superflue la transposition par des mesures législatives ou réglementaires spécifiques à condition, toutefois, que ces principes garantissent effectivement la pleine application de la directive par l'administration nationale et que, au cas où la disposition en cause de la directive vise à créer des droits pour les particuliers, la situation juridique découlant de ces principes soit suffisamment précise et claire et que les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et, le cas échéant, de s'en prévaloir devant les juridictions nationales.
(cf. point 34)
2. Une disposition qui ne concerne que les relations entre les États membres et la Commission ne doit pas, en principe, être transposée. Toutefois, étant donné que les États membres ont l'obligation d'assurer le plein respect du droit communautaire, la Commission a la faculté de démontrer que le respect de la disposition d'une directive qui régit ces relations nécessite l'adoption de mesures de transposition spécifiques dans l'ordre juridique national.
(cf. point 35)
3. Il ne ressort ni des articles 1er et 2 de la directive 2000/60, établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, qui énoncent les objectifs qu'elle vise à atteindre et les définitions sur lesquelles elle se fonde, ni d'aucune autre disposition de celle-ci que les États membres sont obligés, afin de transposer correctement ses dispositions, d'adopter une législation-cadre afin de respecter les exigences de la directive. Certes, l'adoption d'une législation-cadre peut être une manière appropriée, voire plus simple, de transposer la directive, dès lors qu'elle peut donner aux autorités compétentes, dans un texte unique, des bases juridiques claires pour élaborer les différentes mesures prévues par la directive dans le domaine de l'eau et dont le délai prévu pour leur mise en oeuvre est échelonné dans le temps. L'adoption d'une telle législation-cadre peut également faciliter le travail de la Commission qui doit veiller à ce que les obligations incombant aux États membres en vertu de cette directive soient respectées. Toutefois, l'adoption d'une législation-cadre ne constitue pas la seule manière dont les États membres peuvent garantir la pleine application de la directive et prévoir un système organisé et articulé visant à respecter les objectifs visés par cette directive.
(cf. points 46-48)
4. Si, dans le cadre de la procédure en manquement, la procédure précontentieuse a atteint son objectif visant à protéger les droits de l'État membre en cause, ledit État membre qui n'a pas, lors de la procédure précontentieuse, indiqué à la Commission que la directive devait être considérée comme étant déjà transposée dans le droit interne en vigueur ne saurait faire grief à la Commission d'avoir étendu ou modifié l'objet du recours tel que défini par ladite procédure précontentieuse. La Commission peut, après avoir reproché à un État membre un défaut de toute transposition d'une directive, préciser, dans son mémoire en réplique, que la transposition alléguée par l'État membre concerné pour la première fois dans son mémoire en défense est, en tout état de cause, incorrecte ou incomplète en ce qui concerne certaines dispositions de cette même directive, un tel grief étant nécessairement inclus dans celui tiré de l'absence de toute transposition et revêtant un caractère subsidiaire par rapport à ce dernier.
(cf. point 56)
5. L'article 14 de la directive 2000/60, établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, vise à conférer aux particuliers et aux parties intéressées le droit de participer activement à la mise en oeuvre de la directive et, notamment, à la production, à la révision et à la mise à jour des plans de gestion de district hydrographique. L'absence en droit interne de toute mesure de transposition n'assure en rien l'obligation selon laquelle les mesures nationales de transposition devraient rendre le délai prévu à l'article 13, paragraphe 6, de la directive juridiquement obligatoire pour les autorités nationales compétentes et permettre aux particuliers de connaître bien en avance la plénitude de leurs droits dans le cadre des procédures prévues à l'article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive.
(cf. points 80-81)
ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)
30 novembre 2006 (*)
«Manquement d’État – Environnement – Directive 2000/60/CE – Absence de communication des mesures de transposition – Obligation d’adopter une législation‑cadre en droit national − Absence − Transposition incomplète ou absence de transposition des articles 2, 7, paragraphe 2, et 14»
Dans l’affaire C‑32/05,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 31 janvier 2005,
Commission des Communautés européennes, représentée par Mmes S. Pardo Quintillán et J. Hottiaux, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
Grand‑Duché de Luxembourg, représenté par M. S. Schreiner, en qualité d’agent, assisté de Me P. Kinsch, avocat,
partie défenderesse,
LA COUR (troisième chambre),
composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM A. Borg Barthet et A. Ó Caoimh (rapporteur), juges,
avocat général: Mme E. Sharpston,
greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 mars 2006,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 mai 2006,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en ne prenant pas les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2000, établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau (JO L 327, p. 1, ci‑après la «directive»), à l’exception des articles 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 7, ainsi que 7, paragraphe 3, et, en tout état de cause, en ne lui communiquant pas lesdites dispositions, le Grand‑Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
2 Le dix‑huitième considérant de la directive dispose:
«La politique communautaire de l’eau nécessite un cadre législatif transparent, efficace et cohérent. Il convient que la Communauté définisse des principes communs et un cadre global d’action. Il y a lieu que la présente directive établisse ce cadre et assure la coordination, l’intégration et, à plus long terme, le développement des principes généraux et des structures permettant la protection et une utilisation écologiquement viable de l’eau dans la Communauté, dans le respect du principe de subsidiarité.»
3 Il ressort du vingt‑neuvième considérant de la directive que les États membres, pour atteindre les objectifs fixés par celle-ci, et en élaborant un programme de mesures à cet effet, peuvent prévoir la mise en œuvre progressive du programme de mesures afin d’en étaler les coûts.
4 Selon l’article 1er de la directive, celle‑ci «a pour objet d’établir un cadre pour la protection des eaux intérieures de surface, des eaux de transition, des eaux côtières et des eaux souterraines».
5 L’article 2 de la directive définit 41 notions pertinentes aux fins de la directive. Certaines de ces notions concernent les normes de qualité de l’eau dont la directive, en particulier, son article 4, impose le respect aux États membres. Les délais dans lesquels ces normes doivent être respectés sont fixés, notamment, dans les articles 4 à 6 et 8 de la directive.
6 L’article 3 de la directive, intitulé «Coordination des mesures administratives au sein des districts hydrographiques», est libellé comme suit:
«1. Les États membres recensent les bassins hydrographiques qui se trouvent sur leur territoire national et, aux fins de la présente directive, les rattachent à des districts hydrographiques. […]
2. Les États membres prennent les dispositions administratives appropriées, y compris la désignation de l’autorité compétente adéquate, pour l’application des règles prévues par la présente directive au sein de...
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