Sumitomo Chemical Co. Ltd and Sumika Fine Chemicals Co. Ltd v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2005:349
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-23/02,T-22/02
Date06 October 2005
Celex Number62002TJ0022
Procedure TypeRecours en annulation - fondé

Affaires jointes T-22/02 et T-23/02

Sumitomo Chemical Co. Ltd et Sumika Fine Chemicals Co. Ltd

contre

Commission des Communautés européennes

« Concurrence — Ententes dans le secteur des produits vitaminiques — Décision de la Commission constatant des infractions ayant cessé et n’infligeant pas d’amendes — Règlement (CEE) nº 2988/74 — Prescription du pouvoir de la Commission d’infliger des amendes ou sanctions — Principe de sécurité juridique — Présomption d’innocence — Intérêt légitime à procéder à la constatation des infractions »

Arrêt du Tribunal (quatrième chambre élargie) du 6 octobre 2005

Sommaire de l’arrêt

1. Concurrence — Procédure administrative — Pouvoirs de la Commission — Constatation d’une infraction ayant pris fin — Condition — Intérêt légitime

(Règlement du Conseil nº 17)

2. Droit communautaire — Interprétation — Textes plurilingues — Interprétation uniforme — Divergences entre les différentes versions linguistiques — Économie générale et finalité de la réglementation en cause comme base de référence

3. Concurrence — Procédure administrative — Prescription en matière de poursuites — Notion de « sanction » au sens du règlement nº 2988/74 — Sanctions pécuniaires — Inclusion — Décision de constatation d’infraction — Exclusion

(Règlement du Conseil nº 2988/74, art. 1er, § 1)

4. Concurrence — Procédure administrative — Pouvoirs de la Commission — Autonomie du pouvoir de constater une infraction par rapport à celui d’ordonner la cessation de l’infraction et d’infliger une amende — Incidence de la prescription du pouvoir d’imposer une amende sur le pouvoir de constater une infraction — Absence

(Règlements du Conseil nº 17 et nº 2988/74, art. 1er, § 1)

5. Droit communautaire — Principes généraux du droit — Sécurité juridique — Absence de règle édictant une prescription relativement à l’exercice des compétences de la Commission — Violation du principe de sécurité juridique par le législateur communautaire — Absence

6. Recours en annulation — Décision de la Commission dans une matière caractérisée par l’absence de règle édictant une prescription relativement à l’exercice de ses compétences — Respect des exigences de la sécurité juridique — Contrôle juridictionnel — Limites

(Art. 230 CE)

7. Droit communautaire — Principes généraux — Reconnaissance — Règle présente dans l’ordre juridique de tous les États membres — Caractère insuffisant pour une reconnaissance

8. Droit communautaire — Interprétation — Principes — Interprétation autonome — Limites — Renvoi, dans certains cas, au droit des États membres

9. Droit communautaire — Principes — Droits fondamentaux — Présomption d’innocence — Procédure en matière de concurrence — Applicabilité — Constatation, au terme d’une procédure régulière, de la responsabilité de l’auteur d’une infraction ne pouvant se voir infliger une amende du fait d’une prescription — Violation — Absence

(Art. 6 UE)

10. Concurrence — Procédure administrative — Pouvoirs de la Commission — Constatation d’une infraction ayant pris fin — Modalités d’exercice — Démonstration, par les circonstances propres au cas d’espèce, de son intérêt légitime

(Règlement du Conseil nº 17)

1. Le règlement n° 17 a habilité la Commission à obliger les entreprises à mettre fin à l’infraction constatée ainsi qu’à infliger des amendes et des astreintes en cas d’infraction aux règles de concurrence. Le pouvoir de prendre des décisions à cet effet implique nécessairement celui de constater l’infraction dont il s’agit.

La cessation d’une infraction avant l’adoption d’une décision par la Commission ne constitue pas en tant que telle une circonstance faisant obstacle à l’exercice des pouvoirs de la Commission de constater et de sanctionner une infraction aux règles de concurrence. À cet égard, d’une part, le pouvoir de la Commission d’infliger des sanctions n’est nullement affecté par le fait que le comportement constitutif de l’infraction et ses effets nuisibles ont cessé ; d’autre part, la Commission peut prendre une décision constatant une infraction à laquelle l’entreprise concernée a déjà mis fin, à la condition néanmoins que l’institution ait un intérêt légitime à le faire.

(cf. points 36-37, 130)

2. Dans le cadre d’une interprétation littérale d’une disposition de droit communautaire, il convient de tenir compte du fait que les textes de droit communautaire sont rédigés en plusieurs langues et que les diverses versions linguistiques font également foi ; une interprétation d’une telle disposition implique ainsi une comparaison des versions linguistiques.

Si la nécessité d’une interprétation uniforme des règlements communautaires exclut de considérer isolément un texte déterminé, mais exige, en cas de doute, qu’il soit interprété et appliqué à la lumière des versions établies dans les autres langues, en cas de divergence entre ces versions, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément.

D’une manière plus générale, d’ailleurs, pour l’interprétation d’une disposition de droit communautaire, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie, ainsi que de l’ensemble des dispositions du droit communautaire.

(cf. points 42, 46-47)

3. Le terme « sanctions » figurant dans l’article 1er, paragraphe 1, du règlement nº 2988/74, relatif à la prescription en matière de poursuites et d’exécution dans les domaines du droit des transports et de la concurrence de la Communauté économique européenne, ne vise qu’à soumettre à un seul et même régime de prescription le pouvoir de la Commission d’infliger des sanctions pécuniaires pour des infractions aux dispositions du droit des transports et de la concurrence des Communautés européennes, quelle que soit la dénomination retenue pour ces sanctions dans les textes qui les instituent.

Une décision de constatation d’infraction ne constitue pas une sanction au sens de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement nº 2988/74 et n’est donc pas visée par la prescription prévue par cette disposition.

(cf. points 60-61)

4. Si, dans le cadre du régime instauré par le règlement nº 17, le pouvoir de la Commission de constater une infraction ne ressort qu’implicitement, c’est-à-dire dans la mesure où les pouvoirs explicites d’enjoindre la cessation de l’infraction et d’infliger des amendes l’impliquent nécessairement, un tel pouvoir implicite n’est pas pour autant asservi uniquement à l’exercice par l’institution de ces pouvoirs explicites. L’autonomie d’un tel pouvoir ne saurait donc être niée, pas plus qu’elle ne saurait être affectée par le fait que l’exercice de ce pouvoir a été subordonné à l’existence d’un intérêt légitime dans le chef de l’institution.

Dès lors, le fait que la Commission n’ait plus le pouvoir d’infliger des amendes aux auteurs d’une infraction du fait de l’écoulement du délai de prescription visé à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement nº 2988/74, relatif à la prescription en matière de poursuites et d’exécution dans les domaines du droit des transports et de la concurrence de la Communauté économique européenne, ne fait pas en soi obstacle à l’adoption d’une décision constatant que cette infraction révolue a été commise.

(cf. points 63, 131)

5. Pour remplir sa fonction d’assurer la sécurité juridique, un délai de prescription doit être fixé d’avance et la fixation de sa durée ainsi que de ses modalités d’application relève de la compétence du législateur communautaire.

En effet, la prescription, en empêchant que soient remises en cause indéfiniment des situations consolidées par l’écoulement du temps, tend à conforter la sécurité juridique mais peut également permettre la consolidation de situations qui étaient, à l’origine au moins, contraires à la loi. La mesure dans laquelle il y est fait recours résulte par conséquent d’un arbitrage entre les exigences de la sécurité juridique et celles de la légalité en fonction des circonstances historiques et sociales qui prévalent dans la société à une époque donnée. Elle relève pour cette raison du choix du seul législateur.

Le législateur communautaire ne saurait donc encourir la censure du juge communautaire en raison des choix qu’il opère concernant l’introduction de règles de prescription et la fixation des délais correspondants. Le fait de ne pas avoir prévu de délai de prescription pour l’exercice des pouvoirs permettant à la Commission de constater les infractions au droit communautaire n’est donc pas susceptible de constituer en lui-même une illégalité au regard du respect du principe de sécurité juridique.

(cf. points 81-83)

6. Il n’appartient pas au juge communautaire de fixer les délais, la portée ou les modalités d’application de la prescription en rapport avec un comportement infractionnel, que ce soit d’une manière générale ou à l’égard du cas d’espèce qui lui est soumis. Néanmoins, l’absence de prescription législative n’exclut pas que l’action de la Commission, dans un cas concret, puisse être censurée au regard du principe de sécurité juridique. En effet, en l’absence de texte prévoyant un délai de prescription, l’exigence fondamentale de la sécurité juridique s’oppose à ce que la Commission puisse retarder indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs.

Dès lors, le juge communautaire, lors de l’examen d’un grief tiré de l’action tardive de la Commission, ne doit pas se limiter à constater qu’aucun délai de prescription n’existe, mais doit vérifier si la Commission n’a pas agi de manière excessivement tardive.

Cependant, le caractère excessivement tardif de l’action de la Commission ne doit pas être apprécié uniquement en fonction du temps s’étant écoulé entre les faits qui forment l’objet de l’action et l’engagement de celle-ci. Au contraire, l’action de la Commission ne saurait être qualifiée d’excessivement tardive en...

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