European Commission v Kronoply GmbH & Co. KG and Kronotex GmbH & Co. KG.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:341
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-83/09
Date24 May 2011
Celex Number62009CJ0083

Affaire C-83/09 P

Commission européenne

contre

Kronoply GmbH & Co. KG
et
Kronotex GmbH & Co. KG

«Pourvoi — Aides d’État — Article 88, paragraphes 2 et 3, CERèglement (CE) nº 659/1999 — Décision de ne pas soulever d’objections — Recours en annulation — Conditions de recevabilité — Moyens d’annulation invocables — Notion de ‘partie intéressée’ — Lien de concurrence — Affectation — Marché de l’approvisionnement»

Sommaire de l'arrêt

1. Recours en annulation — Personnes physiques ou morales — Actes les concernant directement et individuellement — Décision de la Commission constatant la compatibilité d'une aide étatique avec le marché commun sans ouverture de la procédure formelle d'examen — Recours des intéressés au sens de l'article 88, paragraphe 2, CE — Recevabilité — Conditions

(Art. 88, § 2, CE et 230, al. 4, CE; règlement du Conseil nº 659/1999, art. 1er, h), 4, § 3, et 6, § 1)

2. Recours en annulation — Personnes physiques ou morales — Actes les concernant directement et individuellement — Décision de la Commission constatant la compatibilité d'une aide étatique avec le marché commun sans ouverture de la procédure formelle d'examen — Recours des intéressés au sens de l'article 88, paragraphe 2, CE — Identification de l'objet du recours — Recours visant à sauvegarder les droits procéduraux des intéressés — Moyens pouvant être invoqués

(Art. 88, § 2, CE et 230, al. 4, CE; règlement de procédure du Tribunal, art. 44, § 1, c); règlement du Conseil nº 659/1999, art. 1er, h), 4, § 3, et 6, § 1)

3. Aides accordées par les États — Examen par la Commission — Procédure administrative — Intéressé au sens de l'article 88, paragraphe 2, CE — Entreprise utilisant la même matière première que l'entreprise bénéficiaire de l'aide

(Art. 88, § 2, CE et 230, al. 4, CE; règlement du Conseil nº 659/1999, art. 1er, h))

1. Dans le domaine des aides d'État, la légalité d'une décision de la Commission de ne pas soulever d’objections fondée sur l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 659/1999 dépend du point de savoir s’il existe des doutes quant à la compatibilité de l’aide avec le marché commun. Dès lors que de tels doutes doivent donner lieu à l’ouverture d’une procédure formelle d’examen à laquelle peuvent participer les parties intéressées visées à l’article 1er, sous h), dudit règlement, il doit être considéré que toute partie intéressée au sens de cette dernière disposition est directement et individuellement concernée par une telle décision. En effet, les bénéficiaires des garanties de procédure prévues à l’article 88, paragraphe 2, CE et à l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 659/1999 ne peuvent en obtenir le respect que s’ils ont la possibilité de contester la décision de ne pas soulever d’objections devant le juge de l’Union.

Partant, dans le cadre d'un recours en annulation, la qualité particulière de partie intéressée au sens de l’article 1er, sous h), du règlement nº 659/1999, liée à l’objet spécifique du recours, suffit pour individualiser, selon l’article 230, quatrième alinéa, CE, le requérant qui conteste une décision de ne pas soulever d’objections.

(cf. points 47-48)

2. Dans le domaine des aides d'État, un requérant qui conteste la décision de la Commission de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen doit définir l’objet de son recours dans sa requête, conformément à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal. Cette exigence est remplie à suffisance de droit lorsque le requérant identifie la décision dont il demande l’annulation. Il importe peu que la requête indique qu’elle vise à l’annulation d’une décision de ne pas soulever d’objections - expression figurant à l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 659/1999 - ou d’une décision de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen, dès lors que c’est par une décision unique que la Commission statue sur les deux aspects de la question.

En effet, lorsqu’un requérant demande l’annulation d’une décision de ne pas soulever d’objections, il met en cause essentiellement le fait que la décision prise par la Commission à l’égard de l’aide en cause a été adoptée sans que cette institution ouvre la procédure formelle d’examen, violant ce faisant ses droits procéduraux. Afin qu’il soit fait droit à sa demande d’annulation, le requérant peut invoquer tout moyen de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait, lors de la phase préliminaire d’examen de la mesure notifiée aurait dû susciter des doutes quant à sa compatibilité avec le marché commun. L’utilisation de tels arguments ne saurait pour autant avoir pour conséquence de transformer l’objet du recours ni d’en modifier les conditions de recevabilité. Au contraire, l’existence de doutes sur cette compatibilité est précisément la preuve qui doit être apportée pour démontrer que la Commission était tenue d’ouvrir la procédure formelle d’examen visée à l’article 88, paragraphe 2, CE ainsi qu’à l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 659/1999.

(cf. points 51-52, 59)

3. Aux termes de l’article 1er, sous h), du règlement nº 659/1999, il faut entendre par partie intéressée notamment toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, c’est-à-dire en particulier les entreprises concurrentes du bénéficiaire de cette aide. Il s’agit, en d’autres termes, d’un ensemble indéterminé de destinataires. Partant, cette disposition n’exclut pas qu’une entreprise qui n’est pas une concurrente directe du bénéficiaire de l’aide, mais a besoin pour son processus de production de la même matière première que celui-ci, soit qualifiée de partie intéressée, pour autant qu’elle fasse valoir que ses intérêts pourraient être affectés par l’octroi de l’aide. Pour ce faire, il importe que cette entreprise démontre, à suffisance de droit, que l’aide risque d’avoir une incidence concrète sur sa situation.

(cf. points 63-65)







ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

24 mai 2011 (*)

«Pourvoi – Aides d’État – Article 88, paragraphes 2 et 3, CERèglement (CE) n° 659/1999 – Décision de ne pas soulever d’objections – Recours en annulation – Conditions de recevabilité – Moyens d’annulation invocables – Notion de ‘partie intéressée’ – Lien de concurrence – Affectation – Marché de l’approvisionnement»

Dans l’affaire C‑83/09 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 23 février 2009,

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. K. Gross et V. Kreuschitz, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Kronoply GmbH & Co. KG, établie à Heiligengrabe (Allemagne),

Kronotex GmbH & Co. KG, établie à Heiligengrabe (Allemagne),

représentées par Mes R. Nierer et L. Gordalla, Rechtsanwälte,

parties demanderesses en première instance,

Zellstoff Stendal GmbH, établie à Arneburg (Allemagne), représentée par Mes T. Müller-Ibold et K. Karl, Rechtsanwälte,

République fédérale d’Allemagne,

Land Sachsen-Anhalt,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. A. Tizzano, J. N. Cunha Rodrigues, K. Lenaerts et J.-C. Bonichot, présidents de chambre, M. A. Rosas, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. J. Malenovský, U. Lõhmus, E. Levits (rapporteur), A. Ó Caoimh, M. Safjan et Mme M. Berger, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 novembre 2010,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, la Commission des Communautés européennes demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 10 décembre 2008, Kronoply et Kronotex/Commission (T‑388/02, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a déclaré recevable le recours en annulation formé par Kronoply GmbH & Co. KG et Kronotex GmbH & Co. KG (ci-après, ensemble, «Kronoply et Kronotex») contre la décision C (2002) 2018 final de la Commission, du 19 juin 2002, de ne pas soulever d’objections à l’encontre des mesures d’aide d’État octroyée à Zellstoff Stendal GmbH par les autorités allemandes (ci-après la «décision litigieuse»).

Le cadre juridique

2 Il résulte du deuxième considérant du règlement (CE) nº 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88] du traité CE (JO L 83, p. 1), que ce règlement vise à codifier et à étayer la pratique constante développée et établie par la Commission, en conformité avec la jurisprudence de la Cour’, dans l’application de l’article 88 CE.

3 L’article 1er dudit règlement prévoit:

«Aux fins du présent règlement, on entend par:

[...]

h) ‘parties intéressées’: tout État membre et toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, en particulier le bénéficiaire de celle-ci, les entreprises concurrentes et les associations professionnelles.»

4 L’article 4 du même règlement, intitulé «Examen préliminaire de la notification et décisions de la Commission», dispose à ses paragraphes 2 à 4:

«2. Si la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure notifiée ne constitue pas une aide, elle le fait savoir par voie de décision.

3. Si la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure notifiée, pour autant qu’elle entre dans le champ de l’article 87, paragraphe 1, CE, ne suscite pas de doutes quant à sa compatibilité avec le marché commun, elle décide que cette mesure est compatible avec le marché commun (ci-après dénommée ‘décision de ne pas soulever d’objections’). Cette décision précise quelle dérogation prévue par le traité a été appliquée.

4. Si la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure notifiée suscite des doutes quant à sa...

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