Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (Spedidam) and Others v Institut national de l’audiovisuel.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:970
Date14 November 2019
Celex Number62018CJ0484
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-484/18
62018CJ0484

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

14 novembre 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Droit d’auteur et droits voisins – Directive 2001/29/CE – Droits exclusifs des artistes‑interprètes – Article 2, sous b) – Droit de reproduction – Article 3, paragraphe 2, sous a) – Mise à disposition du public – Autorisation – Présomption – Régime national dispensant un établissement public responsable de la conservation et de la mise en valeur du patrimoine audiovisuel national de l’obtention du consentement écrit de l’artiste-interprète pour l’exploitation d’archives comportant des fixations des exécutions de cet artiste‑interprète »

Dans l’affaire C‑484/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Cour de cassation (France), par décision du 11 juillet 2018, parvenue à la Cour le 20 juillet 2018, dans la procédure

Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (Spedidam),

PG,

GF

contre

Institut national de l’audiovisuel,

en présence de :

Syndicat indépendant des artistes-interprètes (SIA-UNSA),

Syndicat français des artistes-interprètes (CGT),

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. I. Jarukaitis, E. Juhász, M. Ilešič (rapporteur) et C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : Mme V. Giacobbo-Peyronnel, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 mars 2019,

considérant les observations présentées :

pour la Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (Spedidam), PG et GF, par Mes C. Waquet et H. Hazan, avocats,

pour l’Institut national de l’audiovisuel, le Syndicat indépendant des artistes-interprètes (SIA-UNSA) et le Syndicat français des artistes-interprètes (CGT), par Me C. Caron, avocat,

pour le gouvernement français, par MM. D. Colas, B. Fodda et D. Segoin ainsi que par Mmes A.-L. Desjonquères et A. Daniel, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. É. Gippini Fournier et Mme J. Samnadda, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 mai 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, sous b), de l’article 3, paragraphe 2, sous a), et de l’article 5 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (JO 2001, L 167, p. 10).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la Société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (Spedidam) ainsi que PG et GF à l’Institut national de l’audiovisuel (ci-après l’« INA »), au sujet de l’atteinte prétendument portée par l’INA aux droits d’artiste-interprète dont PG et GF sont titulaires.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 9, 10, 21, 24 et 31 de la directive 2001/29 énoncent :

« (9)

Toute harmonisation du droit d’auteur et des droits voisins doit se fonder sur un niveau de protection élevé, car ces droits sont essentiels à la création intellectuelle. Leur protection contribue au maintien et au développement de la créativité dans l’intérêt des auteurs, des interprètes ou exécutants, des producteurs, des consommateurs, de la culture, des entreprises et du public en général. La propriété intellectuelle a donc été reconnue comme faisant partie intégrante de la propriété.

(10)

Les auteurs ou les interprètes ou exécutants, pour pouvoir poursuivre leur travail créatif et artistique, doivent obtenir une rémunération appropriée pour l’utilisation de leurs œuvres, de même que les producteurs pour pouvoir financer ce travail. L’investissement nécessaire pour créer des produits, tels que des phonogrammes, des films ou des produits multimédias, et des services tels que les services à la demande, est considérable. Une protection juridique appropriée des droits de propriété intellectuelle est nécessaire pour garantir une telle rémunération et permettre un rendement satisfaisant de l’investissement.

[...]

(21)

La présente directive doit définir le champ des actes couverts par le droit de reproduction en ce qui concerne les différents bénéficiaires, et ce conformément à l’acquis communautaire. Il convient de donner à ces actes une définition large pour assurer la sécurité juridique au sein du marché intérieur.

[...]

(24)

Le droit de mettre à la disposition du public des objets protégés qui est visé à l’article 3, paragraphe 2, doit s’entendre comme couvrant tous les actes de mise à la disposition du public qui n’est pas présent à l’endroit où l’acte de mise à disposition a son origine et comme ne couvrant aucun autre acte.

[...]

(31)

Il convient de maintenir un juste équilibre en matière de droits et d’intérêts entre les différentes catégories de titulaires de droits ainsi qu’entre celles-ci et les utilisateurs d’objets protégés. [...] Pour assurer le bon fonctionnement du marché intérieur, ces exceptions et limitations doivent être définies de façon plus harmonieuse. Le degré d’harmonisation de ces exceptions doit être fonction de leur incidence sur le bon fonctionnement du marché intérieur. »

4

L’article 2 de cette directive, intitulé « Droit de reproduction », se lit comme suit :

« Les États membres prévoient le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction directe ou indirecte, provisoire ou permanente, par quelque moyen et sous quelque forme que ce soit, en tout ou en partie :

[...]

b)

pour les artistes interprètes ou exécutants, des fixations de leurs exécutions ;

[...] »

5

L’article 3 de ladite directive, intitulé « Droit de communication d’œuvres au public et droit de mettre à la disposition du public d’autres objets protégés », dispose, à son paragraphe 2, sous a) :

« Les États membres prévoient le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la mise à la disposition du public, par fil ou sans fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement :

a)

pour les artistes interprètes ou exécutants, des fixations de leurs exécutions ;

[...] »

6

L’article 5 de la directive 2001/29 énonce une série d’exceptions et de limitations aux droits exclusifs prévus aux articles 2 à 4 de cette directive, que les États membres ont la faculté ou l’obligation de prévoir dans leur droit national.

7

L’article 10 de cette directive, intitulé « Application dans le temps », prévoit :

« 1. Les dispositions de la présente directive s’appliquent à toutes les œuvres et à tous les autres objets protégés visés par la présente directive qui, le 22 décembre 2002, sont protégés par la législation des États membres dans le domaine du droit d’auteur et des droits voisins, ou qui remplissent les critères de protection en application des dispositions de la présente directive ou des directives visées à l’article 1er, paragraphe 2.

2. La présente directive s’applique sans préjudice des actes conclus et des droits acquis avant le 22 décembre 2002. »

Le droit français

8

L’article L. 212-3, premier alinéa, du code de la propriété intellectuelle énonce :

« Sont soumises à l’autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image.

Cette autorisation et les rémunérations auxquelles elle donne lieu sont régies par les dispositions des articles L. 762‑1 et L. 762‑2 du code du travail, sous réserve des dispositions de l’article L. 212‑6 du présent code. »

9

L’article L. 212-4 de ce code dispose :

« La signature du contrat conclu entre un artiste-interprète et un producteur pour la réalisation d’une œuvre audiovisuelle vaut autorisation de fixer, reproduire et communiquer au public la prestation de l’artiste-interprète.

Ce contrat fixe une rémunération distincte pour chaque mode d’exploitation de l’œuvre. »

10

Aux termes de l’article 49 de la loi no 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (JORF du 1er octobre 1986, p. 11749), dans sa rédaction issue de l’article 44 de la loi no 2006-961 du 1er août 2006 (JORF du 3 août 2006, p. 11529) (ci-après l’« article 49 modifié ») :

« L’[INA], établissement public de l’État à caractère industriel et commercial, est chargé de conserver et de mettre en valeur le patrimoine audiovisuel national.

I. – L’institut assure la conservation des archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme et contribue à leur exploitation. La nature, les tarifs, les conditions financières des prestations documentaires et les modalités d’exploitation de ces archives sont fixés par convention entre l’institut et chacune des sociétés concernées. Ces conventions sont approuvées par arrêté des ministres chargés du budget et de la communication.

II. – L’institut exploite les extraits des archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme dans les conditions prévues par les cahiers des charges. À ce titre, il bénéficie des droits d’exploitation de ces extraits à l’expiration d’un délai d’un an à compter de leur première diffusion.

L’institut demeure propriétaire des supports et matériels techniques et détenteur des droits d’exploitation des archives...

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