Chafiq Ayadi v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2006:200
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-253/02
Date12 July 2006
Celex Number62002TJ0253
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

Affaire T-253/02

Chafiq Ayadi

contre

Conseil de l'Union européenne

« Politique étrangère et de sécurité commune — Mesures restrictives prises à l'encontre de personnes et d'entités liées à Oussama ben Laden, au réseau Al-Qaida et aux Taliban — Compétence de la Communauté — Gel des fonds — Principe de subsidiarité — Droits fondamentaux — Jus cogens — Contrôle juridictionnel — Recours en annulation »

Arrêt du Tribunal (deuxième chambre) du 12 juillet 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Procédure — Intervention — Requête n'ayant pas pour objet le soutien des conclusions de l'une des parties

(Statut de la Cour de justice, art. 40, al. 4; règlement de procédure du Tribunal, art. 113 et 116, § 3)

2. Recours en annulation — Recours dirigé contre un acte confirmatif d'un acte antérieur non attaqué dans les délais

(Art. 230 CE)

3. Recours en annulation — Compétence du juge communautaire

(Art. 5, al. 2, CE, 60 CE, 230 CE, 301 CE et 308 CE)

4. Droit international public — Charte des Nations unies — Décisions du Conseil de sécurité

5. Communautés européennes — Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions

(Règlement du Conseil nº 881/2002)

6. Communautés européennes — Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions

(Règlement du Conseil nº 881/2002, tel que modifié par le règlement nº 561/2003, art. 2 bis)

7. Communautés européennes — Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions

(Règlement du Conseil nº 881/2002)

8. Recours en annulation — Acte communautaire donnant effet à des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies — Règlement nº 881/2002

(Art. 230 CE; règlement du Conseil nº 881/2002)

9. Communautés européennes — Acte donnant effet à des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies — Règlement nº 881/2002

(Art. 6 UE; règlement du Conseil nº 881/2002)

10. Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée

(Art. 253 CE; règlement du Conseil nº 881/2002)

1. En vertu de l'article 40, quatrième alinéa, du statut de la Cour de justice, les conclusions de la requête en intervention ne peuvent avoir d'autre objet que le soutien des conclusions de l'une des parties. En outre, aux termes de l'article 116, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, la partie intervenante accepte le litige dans l'état dans lequel il se trouve lors de son intervention. Une partie intervenante n'a dès lors pas qualité pour soulever une fin de non-recevoir non soulevée par la partie qu'elle soutient. Toutefois, en vertu de l'article 113 du règlement de procédure du Tribunal, ce dernier peut, à tout moment, examiner d'office les fins de non-recevoir d'ordre public, y compris celles invoquées par les parties intervenantes. Une fin de non-recevoir concernant la recevabilité du recours soulève une telle question d'ordre public.

(cf. points 64, 67-68)

2. Un recours en annulation formé contre un acte purement confirmatif d'un acte antérieur non attaqué dans les délais est irrecevable. Un acte est purement confirmatif d'un acte antérieur s'il ne contient aucun élément nouveau par rapport à celui-ci et n'a pas été précédé d'un réexamen de la situation du destinataire de cet acte antérieur.

(cf. point 70)

3. Le juge communautaire contrôle la légalité des actes communautaires au regard du principe de subsidiarité, énoncé à l'article 5, deuxième alinéa, CE. Toutefois, ce principe général ne saurait être invoqué dans le domaine d'application des articles 60 CE et 301 CE, à supposer même que celui-ci ne relève pas de la compétence exclusive de la Communauté. En effet, s'agissant de l'interruption ou de la réduction des relations économiques avec les pays tiers, ces dispositions elles-mêmes prévoient une intervention de la Communauté lorsque l'action de celle-ci est « jugée nécessaire » par une position commune ou une action commune adoptées en vertu des dispositions du traité UE relatives à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Dans le domaine d'application des articles 60 CE et 301 CE, le traité CE confère ainsi à l'Union le pouvoir de déterminer qu'une action de la Communauté est nécessaire. Une telle détermination relève de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire de l'Union. Elle exclut le droit pour les particuliers de contester, au regard du principe de subsidiarité énoncé à l'article 5, deuxième alinéa, CE, la légalité de l'action subséquemment exercée par la Communauté conformément à la position commune ou à l'action commune PESC de l'Union. Par ailleurs, dès lors que le domaine d'application des articles 60 CE et 301 CE peut être étendu, par le recours à la base juridique complémentaire de l'article 308 CE, à l'adoption de sanctions économiques et financières à l'encontre de particuliers, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme international, sans établir de lien avec les pays tiers, il s'ensuit nécessairement que la légalité des mesures communautaires adoptées à ce titre, conformément à une position commune ou à une action commune PESC de l'Union, ne peut davantage être contestée par les particuliers au regard du principe de subsidiarité.

En tout état de cause, à supposer même que le principe de subsidiarité trouve à s'appliquer dans le domaine d'application des articles 60 CE et 301 CE, la mise en oeuvre uniforme dans les États membres de résolutions du Conseil de sécurité, qui s'imposent indistinctement à tous les membres de l'Organisation des Nations unies, peut être mieux réalisée au niveau communautaire qu'au niveau national.

(cf. points 107-112)

4. Du point de vue du droit international, les obligations des États membres de l'Organisation des Nations unies au titre de la charte des Nations unies l'emportent sur toute autre obligation de droit interne ou de droit international conventionnel, y compris, pour ceux d'entre eux qui sont membres du Conseil de l'Europe, sur leurs obligations au titre de la convention européenne des droits de l'homme et, pour ceux d'entre eux qui sont également membres de la Communauté, sur leurs obligations au titre du traité CE. Cette primauté s'étend aux décisions contenues dans une résolution du Conseil de sécurité, conformément à l'article 25 de la charte des Nations unies.

Bien qu'elle ne soit pas membre des Nations unies, la Communauté doit être considérée comme liée par les obligations résultant de la charte des Nations unies, de la même façon que le sont ses États membres, en vertu même du traité l'instituant. D'une part, elle ne peut violer les obligations incombant à ses États membres en vertu de cette charte ni entraver leur exécution. D'autre part, elle est tenue, en vertu même du traité par lequel elle a été instituée, d'adopter, dans l'exercice de ses compétences, toutes les dispositions nécessaires pour permettre à ses États membres de se conformer à ces obligations.

(cf. point 116)

5. Au regard du principe de primauté du droit de l'ONU sur le droit communautaire, l'affirmation d'une compétence du Tribunal pour contrôler de manière incidente la légalité des décisions du Conseil de sécurité ou du comité des sanctions à l'aune du standard de protection des droits fondamentaux tels qu'ils sont reconnus dans l'ordre juridique communautaire ne saurait se justifier ni sur la base du droit international ni sur la base du droit communautaire.

Dès lors, les résolutions du Conseil de sécurité adoptées au titre du chapitre VII de la charte des Nations unies échappent en principe au contrôle juridictionnel du Tribunal et celui-ci n'est pas autorisé à remettre en cause, fût-ce de manière incidente, leur légalité au regard du droit communautaire. Au contraire, le Tribunal est tenu, dans toute la mesure du possible, d'interpréter et d'appliquer ce droit d'une manière qui soit compatible avec les obligations des États membres au titre de la charte des Nations unies.

Le Tribunal est néanmoins habilité à contrôler, de manière incidente, la légalité de telles résolutions au regard du jus cogens, entendu comme un ordre public international qui s'impose à tous les sujets du droit international, y compris les instances de l'ONU, et auquel il est impossible de déroger.

(cf. point 116)

6. Le gel des fonds prévu par le règlement nº 881/2002, instituant certaines mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités liées à Oussama ben Laden, au réseau Al-Qaida et aux Taliban, tel que modifié par le règlement nº 561/2003, ne viole ni le droit fondamental des intéressés à disposer de leurs biens ni le principe général de proportionnalité, à l'aune du standard de protection universelle des droits fondamentaux de la personne humaine relevant du jus cogens.

Par ailleurs, le règlement nº 881/2002 et les résolutions du Conseil de sécurité que ce règlement met en oeuvre n'empêchent pas les intéressés de mener une vie personnelle, familiale et sociale satisfaisante, étant donné que l'usage à des fins strictement personnelles des ressources économiques gelées n'est pas en soi interdit par ces actes. De même, lesdits actes n'empêchent pas en soi les intéressés d'exercer une activité professionnelle salariée ou indépendante, mais affectent essentiellement la perception des revenus d'une telle activité. En particulier, l'article 2 bis du règlement concerné permet de rendre l'article 2 dudit règlement inapplicable, aux conditions que cette disposition détermine, à tout type de fonds ou de ressources économiques, y compris donc les ressources économiques nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle salariée ou indépendante et les fonds perçus ou à percevoir dans le cadre d'une telle activité. En effet, bien que l'article 2 bis constitue une disposition dérogatoire à celle de l'article 2, il ne saurait être interprété strictement au regard de l'objectif d'ordre humanitaire qu'il poursuit. C'est aux autorités nationales compétentes, qui sont les mieux placées pour prendre en compte les circonstances particulières de chaque cas...

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