European Commission v Hellenic Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:346
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-98/16
Date04 May 2017
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62016CJ0098

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

4 mai 2017 (*)

« Manquement d’État – Fiscalité – Libre circulation des capitaux – Article 63 TFUE – Article 40 de l’accord EEE – Droits de succession – Legs en faveur d’organismes sans but lucratif – Application d’un taux préférentiel aux organismes qui existent ou sont légalement constitués en Grèce ainsi qu’aux organismes étrangers similaires sous réserve de réciprocité – Différence de traitement – Restriction – Justification »

Dans l’affaire C‑98/16,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 17 février 2016,

Commission européenne, représentée par MM. W. Roels et D. Triantafyllou, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mmes M. Tassopoulou et V. Karra, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (septième chambre),

composée de Mme A. Prechal, président de chambre, MM. A. Rosas (rapporteur) et E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en adoptant et en maintenant en vigueur une législation qui prévoit un taux préférentiel des droits de succession pour les legs effectués en faveur d’organismes sans but lucratif qui sont établis dans d’autres États membres de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (EEE) sous réserve de réciprocité, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 63 TFUE et de l’article 40 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3, ci-après l’« accord EEE »).

Le cadre juridique

2 L’article 25, paragraphe 3, du code grec des droits de succession prévoit :

« Les acquisitions sont soumises à une imposition distincte, conformément aux dispositions du paragraphe 5 de l’article 29, dès lors que les bénéficiaires sont :

[...]

(b) les personnes morales sans but lucratif, qui existent ou sont légalement constituées en Grèce, ainsi que les personnes morales étrangères similaires sous réserve de réciprocité et les biens visés à l’article 96 de la loi d’urgence nº 2039/1939 (FEK A’ 455), dès lors qu’ils poursuivent de manière avérée des buts d’intérêt national ou religieux ou, plus largement, des buts philanthropiques ou éducatifs ou artistiques ou d’intérêt général au sens de l’article 1er de la loi d’urgence nº 2039/1939. »

3 L’article 29, paragraphe 5, de ce code dispose :

« Les fonds acquis à cause de décès par les personnes définies au paragraphe 3 de l’article 25 sont soumis à une taxe calculée séparément par application d’un taux de 0,5 %. Les autres biens acquis par ces personnes sont soumis à une taxe calculée séparément par application d’un taux de 0,5 %. »

La procédure précontentieuse

4 Le 24 octobre 2012, à la suite d’échanges infructueux intervenus dans le cadre du système « EU Pilot », la Commission a adressé une lettre de mise en demeure à la République hellénique, par laquelle elle attirait son attention sur une éventuelle incompatibilité de l’article 25, paragraphe 3, sous b), et de l’article 29, paragraphe 5, du code des droits de succession (ci-après les « dispositions litigieuses ») avec l’article 63 TFUE et l’article 40 de l’accord EEE, en ce qui concerne le traitement fiscal des legs en faveur d’organismes sans but lucratif.

5 Par deux courriers du 4 février et du 1er octobre 2013, la République hellénique a fait valoir que les dispositions litigieuses étaient compatibles avec les articles visés par la Commission.

6 N’étant pas satisfaite de cette réponse, la Commission a émis, le 21 novembre 2013, un avis motivé auquel la République hellénique a répondu par une lettre du 21 mars 2014. Dans cette lettre, la République hellénique réaffirmait la compatibilité des dispositions litigieuses avec le droit de l’Union et indiquait que celles-ci ne seraient pas modifiées.

7 C’est dans ces conditions que la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

Sur le recours

Argumentation des parties

8 La Commission fait valoir que les dispositions litigieuses vont à l’encontre du principe de libre circulation des capitaux, tel que garanti à l’article 63 TFUE et à l’article 40 de l’accord EEE.

9 Elle fait observer, tout d’abord, que les dispositions litigieuses ont pour effet de taxer plus lourdement les legs lorsque le bénéficiaire est une personne morale sans but lucratif ayant son siège dans un État membre de l’Union ou de l’EEE, autre que la République hellénique, qui ne réserve pas le même traitement fiscal aux personnes morales sans but lucratif établies en Grèce. La valeur des biens légués à une telle personne morale serait, de ce fait, réduite, ce qui constituerait une restriction injustifiée à la libre circulation des capitaux.

10 La Commission se réfère à l’arrêt du 22 avril 2010, Mattner (C‑510/08, EU:C:2010:216, point 26), dans lequel la Cour a jugé que, en ce qui concerne les donations, les mesures interdites par l’article 63, paragraphe 1, TFUE, en tant qu’elles constituent des restrictions aux mouvements de capitaux, comprennent celles qui ont pour effet de diminuer la valeur de la donation d’un résident d’un État membre autre que celui sur le territoire duquel se trouvent les biens concernés et qui impose la donation de ceux-ci.

11 Cette institution déduit par analogie de cet arrêt que la diminution de la valeur des legs effectués en faveur des personnes morales sans but lucratif établies dans un État membre de l’Union ou de l’EEE qui ne réserve pas le même traitement fiscal aux personnes morales sans but lucratif établies en Grèce, en conséquence du taux d’imposition plus élevé appliqué à des tels legs, revêt le même caractère restrictif.

12 En outre, la Commission souligne que l’application à certains mouvements transfrontaliers de capitaux d’un taux d’imposition plus élevé que celui appliqué aux mouvements de capitaux à l’intérieur de la Grèce rend les premiers moins attractifs que les seconds, dissuadant ainsi les résidents grecs de désigner comme légataires des personnes morales sans but lucratif établies dans d’autres États membres de l’Union ou de l’EEE. À cet égard, la Commission renvoie à l’arrêt du 10 février 2011, Missionswerk Werner Heukelbach (C‑25/10, EU:C:2011:65, point 37), dans lequel la Cour a jugé que l’article 63 TFUE s’oppose à la législation d’un État membre qui réserve la possibilité de bénéficier du taux réduit des droits de succession aux organismes sans but lucratif ayant leur siège d’opération dans cet État membre ou dans l’État membre dans lequel le de cujus résidait effectivement ou avait son lieu de travail au moment de son décès, ou dans lequel il a antérieurement effectivement résidé ou eu son lieu de travail.

13 Ensuite, en ce qui concerne l’argument avancé par la République hellénique concernant la non-comparabilité des situations, la Commission souligne que celle-ci n’explique pas pour quelle raison la situation des organismes sans but lucratif établis en Grèce ne serait pas comparable à celle des organismes ayant les mêmes caractéristiques établis dans un autre État membre de l’Union ou de l’EEE.

14 En réponse aux arguments avancés par la République hellénique pour justifier le maintien de la condition de réciprocité, la Commission rappelle que, ainsi qu’il...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT