Commission of the European Communities v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:74
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-503/03
Date31 January 2006
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62003CJ0503

Affaire C-503/03

Commission des Communautés européennes

contre

Royaume d'Espagne

«Libre circulation des personnes — Directive 64/221/CEE — Ressortissant d'un État tiers, conjoint d'un ressortissant d'un État membre — Droit d'entrée et de séjour — Restriction pour des raisons d'ordre public — Système d'information Schengen — Signalement aux fins de non-admission»

Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 10 mars 2005

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 31 janvier 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Union européenne — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Protocole intégrant l'acquis de Schengen — Convention d'application de l'accord de Schengen — Application par les autorités nationales

2. Libre circulation des personnes — Dérogations — Raisons d'ordre public

(Directive du Conseil 64/221, art. 1er à 3)

1. La conformité d'une pratique administrative aux dispositions de la convention d'application de l'accord de Schengen ne permet de justifier le comportement des autorités nationales compétentes que pour autant que l'application des dispositions en cause soit compatible avec les règles communautaires régissant la libre circulation des personnes.

(cf. point 35)

2. Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 1er à 3 de la directive 64/221 pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique, un État membre qui refuse l'entrée sur le territoire des États parties à l'accord de Schengen ainsi que la délivrance d'un visa aux fins d'entrer sur ce territoire à un ressortissant d'un État tiers conjoint d'un ressortissant d'un État membre, au seul motif qu'il est signalé dans le système d'information Schengen aux fins de non-admission, sans avoir au préalable vérifié si la présence de cette personne constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société.

L'inscription dans le système d'information Schengen d'un ressortissant d'un État tiers conjoint d'un ressortissant d'un État membre constitue certes un indice de l'existence d'un motif justifiant que l'entrée dans l'espace Schengen lui soit refusée. Toutefois, cet indice doit être corroboré par des informations permettant à l'État membre qui consulte le système d'information Schengen de constater, avant de refuser l'entrée dans l'espace Schengen, que la présence de l'intéressé dans ledit espace constitue une telle menace.

Dans le cadre de cette vérification, si le principe de coopération loyale qui est à la base de l'acquis de Schengen implique que l'État qui consulte le système d'information Schengen tienne dûment compte des indications fournies par l'État signalant, il implique également que ce dernier doit tenir à la disposition du premier les informations complémentaires lui permettant d'apprécier concrètement l'importance de la menace que la personne signalée est susceptible de représenter.

En tout état de cause, le délai de réponse à une demande d'informations ne saurait dépasser une durée raisonnable au regard des circonstances de l'espèce, lesquelles peuvent être appréciées différemment selon qu'il s'agit d'une demande de visa ou d'un franchissement de frontière. Dans ce dernier cas, il est impératif que les autorités nationales qui, ayant constaté qu'un ressortissant d'un État tiers, conjoint d'un ressortissant d'un État membre, a fait l'objet d'un signalement dans le système d'information Schengen aux fins de non-admission, ont demandé un complément d'information à l'État signalant reçoivent de ce dernier une information rapide.

(cf. points 53, 55-56, 58-59, disp.)




ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

31 janvier 2006 (*)

«Libre circulation des personnes – Directive 64/221/CEE – Ressortissant d’un État tiers, conjoint d’un ressortissant d’un État membre – Droit d’entrée et de séjour – Restriction pour des raisons d’ordre public – Système d’information Schengen – Signalement aux fins de non-admission»

Dans l’affaire C-503/03,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 27 novembre 2003,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme C. O’Reilly et M. L. Escobar Guerrero, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume d’Espagne, représenté par M. M. Muñoz Pérez, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann (rapporteur), C. W. A. Timmermans, A. Rosas, J. Malenovský, présidents de chambre, MM. S. von Bahr, J. N. Cunha Rodrigues, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. K. Lenaerts, E. Juhász, G. Arestis, A. Borg Barthet et M. Ilešič, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 mars 2005,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en refusant le visa ainsi que l’entrée sur le territoire espagnol à deux ressortissants de pays tiers, membres de la famille de citoyens de l’Union européenne, pour le simple fait qu’ils figurent sur la liste des personnes non admissibles du système d’information Schengen (SIS) (à l’initiative d’un État membre) et, en ne motivant pas suffisamment ces refus de visa et d’entrée, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 1er à 3 et 6 de la directive 64/221/CEE du Conseil, du 25 février 1964, pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique (JO 1964, 56, p. 850).

Le cadre juridique

La directive 64/221

2 Aux termes de l’article 1er de la directive:

«1. Les dispositions de la présente directive visent les ressortissants d’un État membre qui séjournent ou se rendent dans un autre État membre de la Communauté, soit en vue d’exercer une activité salariée ou non salariée, soit en qualité de destinataires de services.

2. Ces dispositions s’appliquent également au conjoint et aux membres de la famille qui répondent aux conditions des règlements et directives pris dans ce domaine en exécution du traité.»

3 Selon son article 2:

«1. La présente directive concerne les dispositions relatives à l’entrée sur le territoire, à la délivrance ou au renouvellement du titre de séjour, ou à l’éloignement du territoire, qui sont prises par les États membres pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique.

2. Ces raisons ne peuvent être invoquées à des fins économiques.»

4 L’article 3 de la directive dispose:

«1. Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu qui en fait l’objet.

2. La seule existence de condamnations pénales ne peut automatiquement motiver ces mesures.

[…]»

5 L’article 6 de la directive prévoit:

«Les raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique qui sont à la base d’une décision le concernant, sont portées à la connaissance de l’intéressé, à moins que des motifs intéressant la sûreté de l’État ne s’y opposent.»

L’acquis de Schengen

Les accords de Schengen

6 Les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française ont signé à Schengen (Luxembourg), le 14 juin 1985, l’accord relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, (JO 2000, L 239, p. 13, ci-après l’«accord de Schengen»).

7 Cet accord a été concrétisé par la signature à Schengen, le 19 juin 1990, d’une convention d’application (JO 2000, L 239, p. 19, ci‑après la «CAAS»), prévoyant des mesures de coopération destinées à assurer, en compensation de la suppression des frontières intérieures, la protection de l’ensemble des territoires des parties contractantes. Le Royaume d’Espagne a adhéré à l’accord de Schengen et à la CAAS le 25 juin 1991 (JO 2000, L 239, p. 69).

8 L’article 1er de la CAAS définit la notion d’«étranger» comme «toute personne autre que les ressortissants des États membres des Communautés européennes».

9 Le titre II de la CAAS contient les dispositions relatives à la suppression des contrôles aux frontières intérieures et à la circulation des personnes. L’article 5 de la CAAS régit l’entrée d’étrangers sur les territoires des États parties à l’accord Schengen (ci‑après l’«espace Schengen»). Il dispose:

«1. Pour un séjour n’excédant pas trois mois, l’entrée sur les territoires des Parties Contractantes peut être accordée à l’étranger qui remplit les conditions ci‑après:

[…]

d) ne pas être signalé aux fins de non-admission;

[…]

2. L’entrée sur les territoires des Parties Contractantes doit être refusée à l’étranger qui ne remplit pas l’ensemble de ces conditions, sauf si une Partie Contractante estime nécessaire de déroger à ce principe pour des motifs humanitaires ou d’intérêt national ou en raison d’obligations internationales. En ce cas, l’admission sera limitée au territoire de la Partie Contractante concernée qui devra en avertir les autres Parties Contractantes.

[...]»

10 Les articles 15 et 16 de la CAAS...

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