Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid v E.P.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:1071
Date12 December 2019
Docket NumberC-380/18
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Celex Number62018CJ0380
CourtCourt of Justice (European Union)
62018CJ0380

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

12 décembre 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Contrôles aux frontières, asile et immigration – Règlement (UE) 2016/399 – Code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) – Article 6 – Conditions d’entrée pour les ressortissants de pays tiers – Notion de “menace pour l’ordre public” – Décision de retour à l’encontre d’un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier »

Dans l’affaire C‑380/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas), par décision du 6 juin 2018, parvenue à la Cour le 11 juin 2018, dans la procédure

Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid

contre

E.P.

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente de la Cour, MM. M. Safjan, L. Bay Larsen (rapporteur) et Mme C. Toader, juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : Mme C. Strömholm, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 mai 2019,

considérant les observations présentées :

pour E.P., par Me Š. Petković, advocaat,

pour le gouvernement néerlandais, par M. J. M. Hoogveld ainsi que par Mmes M. A. M. de Ree, M. L. Noort et M. K. Bulterman, en qualité d’agents,

pour le gouvernement belge, par Mmes C. Van Lul et C. Pochet ainsi que par M. P. Cottin, en qualité d’agents, assistés de Me C. Decordier, avocate, et de Me T. Bricout, advocaat,

pour le gouvernement allemand, initialement par MM. T. Henze et R. Kanitz, puis par M. R. Kanitz, en qualité d’agents,

pour le gouvernement suisse, par M. S. Lauper, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par MM. G. Wils et J. Tomkin ainsi que par Mme C. Cattabriga, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 juillet 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 1, sous e), du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO 2016, L 77, p. 1, ci-après le « code frontières Schengen »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (secrétaire d’État à la Justice et à la Sécurité, Pays-Bas, ci-après le « secrétaire d’État ») à E.P. au sujet de la légalité d’une décision ordonnant à celui-ci de quitter le territoire de l’Union européenne.

Le cadre juridique

La convention d’application de l’accord de Schengen

3

L’article 5, paragraphe 1, de la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 (JO 2000, L 239, p. 19, ci-après la « convention d’application de l’accord de Schengen »), prévoyait :

« Pour un séjour n’excédant pas trois mois, l’entrée sur les territoires des Parties Contractantes peut être accordée à l’étranger qui remplit les conditions ci-après :

a)

posséder un document ou des documents valables permettant le franchissement de la frontière, déterminés par le Comité Exécutif ;

[...]

c)

présenter le cas échéant les documents justifiant de l’objet et des conditions du séjour envisagé et disposer des moyens de subsistance suffisants [...] ou être en mesure d’acquérir légalement ces moyens ;

d)

ne pas être signalé aux fins de non-admission ;

e)

ne pas être considéré comme pouvant compromettre l’ordre public, la sécurité nationale ou les relations internationales de l’une des Parties Contractantes. »

4

L’article 20, paragraphe 1, de la convention d’application de l’accord de Schengen, telle que modifiée par le règlement (UE) no 610/2013, du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013 (JO 2013, L 182, p. 1), dispose :

« Les étrangers non soumis à l’obligation de visa peuvent circuler librement sur les territoires des Parties Contractantes pendant une durée maximale de 90 jours sur toute période de 180 jours, pour autant qu’ils remplissent les conditions d’entrée visées à l’article 5, paragraphe 1, points a), c), d) et e). »

La directive 2004/38/CE

5

L’article 27, paragraphe 2, de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, et rectificatifs JO 2004, L 229, p. 35, et JO 2005, L 197, p. 34), énonce :

« Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné. L’existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.

Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues. »

Le règlement (CE) no 1987/2006

6

L’article 24, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) no 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JO 2006, L 381, p. 4), précise :

« 1. Les données relatives aux ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’un signalement aux fins de non-admission ou d’interdiction de séjour sont introduites sur la base d’un signalement national résultant d’une décision prise par les autorités administratives ou juridictions compétentes dans le respect des règles de procédure prévues par la législation nationale, sur la base d’une évaluation individuelle. Les recours contre cette décision sont formés conformément à la législation nationale.

2. Un signalement est introduit lorsque la décision visée au paragraphe 1 est fondée sur la menace pour l’ordre public ou la sécurité publique ou pour la sécurité nationale que peut constituer la présence d’un ressortissant d’un pays tiers sur le territoire d’un État membre. Tel peut être notamment le cas :

a)

d’un ressortissant d’un pays tiers qui a été condamné dans un État membre pour une infraction passible d’une peine privative de liberté d’au moins un an ;

b)

d’un ressortissant d’un pays tiers à l’égard duquel il existe des raisons sérieuses de croire qu’il a commis un fait punissable grave, ou à l’égard duquel il existe des indices réels qu’il envisage de commettre un tel fait sur le territoire d’un État membre. »

La directive 2008/115/CE

7

L’article 3 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98), est libellé comme suit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

2)

“séjour irrégulier” : la présence sur le territoire d’un État membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions d’entrée énoncées à l’article 5 du règlement [(CE) no 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO 2006, L 105, p. 1)], ou d’autres conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre ;

[...] »

8

L’article 6, paragraphe 1, de cette directive prévoit :

« Les États membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5. »

Le code des visas

9

L’article 21, paragraphe 1, du règlement (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, établissant un code communautaire des visas (code des visas) (JO 2009, L 243, p. 1, ci-après le « code des visas »), énonce :

« Lors de l’examen d’une demande de visa uniforme, le respect par le demandeur des conditions d’entrée énoncées à l’article 5, paragraphe 1, points a), c), d) et e), du règlement [no 562/2006] est vérifié et une attention particulière est accordée à l’évaluation du risque d’immigration illégale ou du risque pour la sécurité des États membres que présenterait le demandeur ainsi qu’à sa volonté de quitter le territoire des États membres avant la date d’expiration du visa demandé. »

Le code frontières Schengen

10

Les considérants 6 et 27 du code frontières Schengen sont ainsi rédigés :

« (6)

Le contrôle aux frontières n’existe pas seulement dans l’intérêt de l’État membre aux frontières extérieures duquel il s’exerce, mais dans l’intérêt de l’ensemble des États membres ayant aboli le contrôle aux frontières à leurs frontières...

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