Meletis Apostolides v David Charles Orams and Linda Elizabeth Orams.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:271
Docket NumberC-420/07
Celex Number62007CJ0420
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date28 April 2009

Affaire C-420/07

Meletis Apostolides

contre

David Charles Orams
et
Linda Elizabeth Orams

(demande de décision préjudicielle, introduite par

la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division))

«Demande de décision préjudicielle — Protocole nº 10 sur Chypre — Suspension de l'application de l'acquis communautaire dans les zones échappant au contrôle effectif du gouvernement chypriote — Règlement (CE) nº 44/2001 — Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions en matière civile et commerciale — Décision rendue par une juridiction chypriote siégeant dans la zone de contrôle effectif dudit gouvernement et concernant un immeuble situé hors de cette zone — Articles 22, point 1, 34, points 1 et 2, 35, paragraphe 1, et 38, paragraphe 1, dudit règlement»

Sommaire de l'arrêt

1. Adhésion de nouveaux États membres aux Communautés — Acte d'adhésion de 2003 — Protocole nº 10 sur Chypre — Suspension de l'application de l'acquis communautaire dans la zone échappant au contrôle effectif du gouvernement de cet État membre

(Acte d'adhésion de 2003; protocole nº 10, art. 1er, § 1; règlement du Conseil nº 44/2001)

2. Coopération judiciaire en matière civile — Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale — Règlement nº 44/2001 — Compétences exclusives — Litiges en matière de droits réels immobiliers — Règle du «forum rei sitae» prévue à l'article 22, point 1, du règlement, déterminant la compétence judiciaire internationale des États membres

(Règlement du Conseil nº 44/2001, art. 22, point 1, et 35, § 1 et 3)

3. Coopération judiciaire en matière civile — Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale — Règlement nº 44/2001 — Reconnaissance et exécution des décisions — Motifs de refus — Violation de l'ordre public de l'État requis — Absence

(Règlement du Conseil nº 44/2001, art. 34, point 1, et 45, § 1)

4. Coopération judiciaire en matière civile — Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale — Règlement nº 44/2001 — Exécution — Conditions — Caractère exécutoire dans l'État membre d'origine

(Règlement du Conseil nº 44/2001, art. 38, § 1, et 54)

5. Coopération judiciaire en matière civile — Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale — Règlement nº 44/2001 — Reconnaissance et exécution des décisions — Motifs de refus — Défaut de signification ou de notification en temps utile de l'acte introductif d'instance au défendeur défaillant — Absence

(Convention du 27 septembre 1968, art. 27, point 2; règlement du Conseil nº 44/2001, art. 34, point 2, et 45, § 1)

1. La suspension de l'application de l'acquis communautaire dans les zones de la République de Chypre dans lesquelles le gouvernement de cet État membre n'exerce pas un contrôle effectif, prévue à l'article 1er, paragraphe 1, du protocole nº 10 sur Chypre de l'acte relatif aux conditions d'adhésion à l'Union européenne de la République tchèque, de la République d'Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l'Union européenne, ne s'oppose pas à l'application du règlement nº 44/2001, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, à une décision rendue par une juridiction chypriote siégeant dans la zone de l'île effectivement contrôlée par le gouvernement chypriote, mais concernant un immeuble sis dans lesdites zones.

En effet, les dispositions d'un acte d’adhésion permettant de déroger aux règles du traité sont d'interprétation stricte au regard des dispositions concernées du traité et doivent être limitées à ce qui est absolument nécessaire pour atteindre son objectif. Il découle ainsi d'une interprétation littérale de l'article 1er, paragraphe 1, dudit protocole nº 10 que la suspension qu'il prévoit est limitée à l'application de l'acquis communautaire dans la zone nord de la République de Chypre. Tel n'est pas le cas des jugements dont la reconnaissance a été sollicitée dès lors qu'ils ont été rendus par une juridiction siégeant dans la zone contrôlée par le gouvernement. La circonstance que ces jugements concernent un immeuble sis dans ladite zone nord ne s'oppose pas à cette interprétation, dans la mesure où celle-ci, d'une part, n'annihile pas l'obligation d'appliquer le règlement nº 44/2001 dans la zone contrôlée par le gouvernement et, d'autre part, n'implique pas non plus que ce règlement soit appliqué, de ce fait, dans ladite zone nord.

(cf. points 35, 37-39, disp. 1)

2. L'article 35, paragraphe 1, du règlement nº 44/2001, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, n'autorise pas une juridiction d'un État membre à refuser la reconnaissance ou l'exécution d'une décision rendue par les juridictions d'un autre État membre concernant un immeuble sis dans une zone de ce dernier État sur laquelle le gouvernement de celui-ci n'exerce pas un contrôle effectif.

À cet égard, l'article 22 du règlement nº 44/2001 contient une liste impérative et exhaustive de fors de compétence judiciaire internationale exclusive des États membres. Cet article ne fait que désigner l'État membre dont les juridictions sont compétentes ratione materiae, sans cependant répartir les compétences au sein de l'État membre concerné. Il appartient à chaque État membre de déterminer sa propre organisation juridictionnelle. En outre, le principe de l'interdiction du contrôle de la compétence des juridictions de l'État membre d'origine, prévu à l'article 35, paragraphe 3, dudit règlement, empêche qu'un contrôle de la compétence interne des juridictions de l'État membre d'origine concerné soit effectué dans l'affaire au principal. Par conséquent, la règle du forum rei sitae prévue à l'article 22, point 1, du règlement nº 44/2001 concerne la compétence judiciaire internationale des États membres et non pas la compétence judiciaire interne de ceux-ci. Il s'ensuit que, dès lors qu'un immeuble est situé sur le territoire d'un État membre et que, partant, la règle de compétence prévue à l'article 22, point 1, du règlement nº 44/2001 a été respectée, le fait que l'immeuble se trouve dans une zone de cet État membre sur laquelle le gouvernement de celui-ci n'exerce pas un contrôle effectif peut éventuellement avoir une incidence sur la compétence interne des juridictions de cet État membre, mais il ne saurait avoir aucune incidence aux fins de ce règlement.

(cf. points 48-52, disp. 2)

3. Le fait qu'une décision rendue par les juridictions d'un État membre concernant un immeuble sis dans une zone de cet État membre sur laquelle le gouvernement de celui-ci n'exerce pas un contrôle effectif ne peut pas, en pratique, être exécutée au lieu où se trouve l'immeuble ne constitue pas un motif de refus de reconnaissance ou d'exécution au titre de l'article 34, point 1, du règlement nº 44/2001, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale.

En l'absence d'un principe fondamental dans l'ordre juridique de l'État requis, auquel la reconnaissance ou l'exécution des jugements en cause pourraient porter atteinte, aucun refus de reconnaissance de ceux-ci, en vertu de l'article 34, point 1, du règlement nº 44/2001, et aucun refus d'exécution, en application de l'article 45, paragraphe 1, du même règlement, ne seraient justifiés au motif qu'une décision rendue par les juridictions d'un État membre concernant un immeuble sis dans une zone de cet État sur laquelle le gouvernement de celui-ci n'exerce pas un contrôle effectif ne peut pas, en pratique, être exécutée au lieu où se trouve l'immeuble. En effet, l'atteinte devrait constituer une violation manifeste d'une règle de droit considérée comme essentielle dans l'ordre juridique de l'État requis ou d'un droit reconnu comme fondamental dans cet ordre juridique.

(cf. points 59-62, 71, disp. 3)

4. Le fait qu'une décision rendue par les juridictions d'un État membre concernant un immeuble sis dans une zone de cet État membre sur laquelle le gouvernement de celui-ci n'exerce pas un contrôle effectif ne peut pas, en pratique, être exécutée au lieu où se trouve l'immeuble n'implique pas une absence de caractère exécutoire d'une telle décision au sens de l'article 38, paragraphe 1, du règlement nº 44/2001, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale. À cet égard, s'il est vrai que le caractère exécutoire de la décision dans l'État membre d'origine constitue une condition de l'exécution de cette décision dans l'État membre requis et que, dès lors, il n'y a aucune raison d'accorder à un jugement, lors de son exécution, des droits qui ne lui appartiennent pas dans l'État membre d'origine, toutefois, il ne ne saurait être valablement soutenu que des jugements portant sur un immeuble sis dans la zone de Chypre où le gouvernement de cet État membre n'exerce pas un contrôle effectif sont dépourvus de caractère exécutoire dans cet État. En effet, s'agissant de jugements de condamnation dont le certificat prévu à l'article 54 du règlement constate le caractère exécutoire dans l'État membre d'origine à la date de délivrance de ce certificat, la circonstance que les requérants pourraient rencontrer des difficultés pour faire exécuter les jugements en cause dans la zone nord ne saurait priver ceux-ci de leur caractère exécutoire et, partant, n'empêche pas les juridictions de l'État membre requis de déclarer l'exequatur de tels jugements.

(cf. points 66-71, disp. 3)

5. La reconnaissance ou l'exécution d'une décision prononcée par défaut ne peuvent pas être refusées...

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