Abdoulaye Amadou Tall v Centre public d’action sociale de Huy (CPAS de Huy).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:824
Date17 December 2015
Celex Number62014CJ0239
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-239/14
62014CJ0239

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

17 décembre 2015 ( * )

«Renvoi préjudiciel — Espace de liberté, de sécurité et de justice — Directive 2005/85/CE — Normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres — Article 39 — Droit à un recours effectif — Demandes d’asile multiples — Effet non suspensif du recours contre une décision de l’autorité nationale compétente de ne pas poursuivre l’examen d’une demande d’asile ultérieure — Protection sociale — Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne — Article 19, paragraphe 2 — Article 47»

Dans l’affaire C‑239/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le tribunal du travail de Liège (Belgique), par décision du 7 mai 2014, parvenue à la Cour le 14 mai 2014, dans la procédure

Abdoulaye Amadou Tall

contre

Centre public d’action sociale de Huy,

en présence de:

Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Fedasil),

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de la troisième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, MM. J. Malenovský, M. Safjan, Mmes A. Prechal et K. Jürimäe, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 mai 2015,

considérant les observations présentées:

pour M. Tall, par Me D. Andrien, avocat,

pour le centre public d’action sociale de Huy, par Mes S. Pierre et A. Fischer, avocats,

pour l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Fedasil), par Me A. Detheux, advocaat,

pour le gouvernement belge, par Mmes M. Jacobs et C. Pochet ainsi que par M. S. Vanrie, en qualité d’agents,

pour le gouvernement hongrois, par MM. M. Fehér et G. Koós, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme M. Condou‑Durande, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 septembre 2015,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 39 de la directive 2005/85/CE du Conseil, du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (JO L 326, p. 13, et rectificatif JO 2006, L 236, p. 36), ainsi que de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la «Charte»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Tall au centre public d’action sociale de Huy (ci‑après le «CPAS»), au sujet de la décision de retrait de l’aide sociale que cet organisme a prise à son encontre.

Le cadre juridique

La CEDH

3

L’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci‑après la «CEDH»), intitulé «Interdiction de la torture», prévoit:

«Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.»

4

L’article 13 de la CEDH, intitulé «Droit à un recours effectif», est ainsi rédigé:

«Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles.»

Le droit de l’Union

La directive 2005/85

5

Le considérant 8 de la directive 2005/85 est libellé comme suit:

«La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus notamment par la [Charte].»

6

Le considérant 15 de cette directive est ainsi rédigé:

7

Selon le considérant 27 de ladite directive:

8

L’article 7 de cette même directive, intitulé «Droit de rester dans l’État membre en attendant l’examen de la demande», est libellé comme suit:

«1. Les demandeurs sont autorisés à rester dans l’État membre, aux seules fins de la procédure, jusqu’à ce que l’autorité responsable de la détermination se soit prononcée conformément aux procédures en premier ressort prévues au chapitre III. Ce droit de rester dans l’État membre ne constitue pas un droit à un titre de séjour.

2. Les États membres ne peuvent prévoir d’exception à cette règle que si, conformément aux articles 32 et 34, l’examen de la demande ultérieure n’est pas poursuivi ou si une personne est, le cas échéant, livrée à ou extradée vers, soit un autre État membre en vertu des obligations découlant d’un mandat d’arrêt européen [...] ou pour d’autres raisons, soit un pays tiers, soit une cour ou un tribunal pénal(e) international(e).»

9

L’article 24 de la directive 2005/85, intitulé «Procédures spéciales», dispose:

«1. Les États membres peuvent prévoir les procédures spéciales ci‑après, qui dérogent aux principes de base et aux garanties fondamentales visés au chapitre II:

a)

un examen préliminaire devant permettre le traitement des cas examinés dans le cadre prévu à la section IV;

[...]»

10

L’article 32 de cette directive, intitulé «Demandes ultérieures», prévoit ce qui suit:

«[...]

2. En outre, les États membres peuvent appliquer une procédure spéciale, prévue au paragraphe 3, lorsqu’une personne dépose une demande d’asile ultérieure:

[...]

b)

après qu’une décision a été prise sur la demande antérieure. Les États membres peuvent également décider d’appliquer cette procédure uniquement après qu’une décision finale a été prise.

3. Une demande d’asile ultérieure est tout d’abord soumise à un examen préliminaire visant à déterminer si, après le retrait de la demande antérieure ou après la prise d’une décision visée au paragraphe 2, point b), du présent article sur cette demande, de nouveaux éléments ou de nouvelles données se rapportant à l’examen visant à déterminer si le demandeur d’asile remplit les conditions requises pour prétendre au statut de réfugié en vertu de la directive 2004/83/CE [du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO L 304, p. 12)], sont apparus ou ont été présentés par le demandeur.

4. Si, après l’examen préliminaire visé au paragraphe 3 du présent article, des éléments ou des faits nouveaux apparaissent ou sont présentés par le demandeur et qu’ils augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre au statut de réfugié en vertu de la directive 2004/83/CE, l’examen de la demande est poursuivi conformément aux dispositions du chapitre II.

5. Les États membres peuvent, conformément à la législation nationale, poursuivre l’examen d’une demande ultérieure, à condition qu’il existe d’autres raisons motivant la réouverture d’une procédure.

6. Les États membres ne peuvent décider de poursuivre l’examen de la demande que si le demandeur concerné a été, sans faute de sa part, dans l’incapacité de faire valoir, au cours de la précédente procédure, les situations exposées aux paragraphes 3, 4 et 5 du présent article, en particulier en exerçant son droit à un recours effectif en vertu de l’article 39.

[...]»

11

L’article 34 de la directive 2005/85, intitulé «Règles de procédure», dispose, à son paragraphe 2:

«Les États membres peuvent prévoir, dans leur législation nationale, des règles sur l’examen préliminaire effectué en vertu de l’article 32. [...]

[...]

Ces règles ne doivent pas mettre le demandeur d’asile dans l’impossibilité d’engager une nouvelle procédure ni lui en interdire, de facto, l’accès ou dresser des obstacles importants sur cette voie.»

12

L’article 39 de cette directive, intitulé «Droit à un recours effectif», précise:

«1. Les États membres font en sorte que les demandeurs d’asile disposent d’un droit à un recours effectif devant une juridiction contre les actes suivants:

[...]

c)

une décision de ne pas poursuivre l’examen de la demande ultérieure en vertu des articles 32 et 34;

[...]

2. Les États membres prévoient des délais et énoncent les autres règles nécessaires pour que le demandeur puisse exercer son droit à un recours effectif en application du paragraphe 1.

3. Les États membres prévoient le cas échéant les règles découlant de leurs obligations internationales relatives:

a)

à la question de savoir si le recours prévu en application du paragraphe 1 a pour effet de permettre aux demandeurs de rester dans l’État membre concerné dans l’attente de l’issue du recours;

b)

à la possibilité d’une voie de droit ou de mesures conservatoires si le recours visé au paragraphe 1 n’a pas pour effet de permettre aux demandeurs de rester dans l’État membre concerné dans l’attente de l’issue de ce recours. Les États membres peuvent aussi prévoir une procédure d’office [...]

[...]»

La directive 2008/115/CE

13

L’article 6 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO L 348, p. 98), intitulé «Décision de retour», prévoit, à son paragraphe 1:

«Les États membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en...

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