Association de médiation sociale v Union locale des syndicats CGT and Others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2
Date15 January 2014
Celex Number62012CJ0176
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑176/12
62012CJ0176

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

15 janvier 2014 ( *1 )

«Politique sociale — Directive 2002/14/CE — Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne — Article 27 — Subordination de la mise en place d’institutions représentatives du personnel à certains seuils de travailleurs employés — Calcul des seuils — Réglementation nationale contraire au droit de l’Union — Rôle du juge national»

Dans l’affaire C‑176/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Cour de cassation (France), par décision du 11 avril 2012, parvenue à la Cour le 16 avril 2012, dans la procédure

Association de médiation sociale

contre

Union locale des syndicats CGT,

Hichem Laboubi,

Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône,

Confédération générale du travail (CGT),

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts, vice-président, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. M. Ilešič et M. Safjan, présidents de chambre, MM. J. Malenovský, E. Levits (rapporteur), J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev, Mme C. Toader, M. D. Šváby, Mmes M. Berger et A. Prechal, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 avril 2013,

considérant les observations présentées:

pour l’Union locale des syndicats CGT, M. Laboubi, l’Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône et la Confédération générale du travail (CGT), par Mes H. Didier et F. Pinet, avocats,

pour le gouvernement français, par Mme N. Rouam ainsi que par MM. G. de Bergues et J. Rossi, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par Mme K. Petersen, en qualité d’agent,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Noort et C. Wissels, en qualité d’agents,

pour le gouvernement polonais, par Mmes J. Faldyga et A. Siwek, ainsi que par MM. B. Majczyna et M. Szpunar, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. J. Enegren, D. Martin et G. Rozet, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 juillet 2013,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 27 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte») ainsi que de la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 2002, établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne (JO L 80, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Association de médiation sociale (ci-après l’«AMS») à l’Union locale des syndicats CGT ainsi qu’à M. Laboubi, à l’Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône et à la Confédération générale du travail (CGT) au sujet de la mise en place, par l’union syndicale localement compétente, d’institutions représentatives du personnel au sein de l’AMS.

Le cadre juridique

La réglementation de l’Union

3

L’article 27 de la Charte est libellé comme suit:

«Les travailleurs ou leurs représentants doivent se voir garantir, aux niveaux appropriés, une information et une consultation en temps utile, dans les cas et conditions prévus par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales.»

4

L’article 1er de la directive 2002/14, intitulé «Objet et principes», prévoit:

«1. La présente directive a pour objectif d’établir un cadre général fixant des exigences minimales pour le droit à l’information et à la consultation des travailleurs dans les entreprises ou les établissements situés dans la Communauté.

2. Les modalités d’information et de consultation sont définies et mises en œuvre conformément à la législation nationale et aux pratiques en matière de relations entre les partenaires sociaux en vigueur dans les différents États membres, de manière à assurer l’effet utile de la démarche.

[...]»

5

L’article 2 de cette directive, relatif aux définitions, est libellé comme suit:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[...]

d)

‘travailleur’, toute personne qui, dans l’État membre concerné, est protégée en tant que travailleur dans le cadre de la législation nationale sur l’emploi et conformément aux pratiques nationales;

[...]»

6

L’article 3 de ladite directive, intitulé «Champ d’application», dispose à son paragraphe 1:

«La présente directive s’applique, selon le choix fait par les États membres:

a)

aux entreprises employant dans un État membre au moins 50 travailleurs, ou

b)

aux établissements employant dans un État membre au moins 20 travailleurs.

Les États membres déterminent le mode de calcul des seuils de travailleurs employés.»

7

L’article 4 de la directive 2002/14, intitulé «Modalités de l’information et de la consultation», énonce à son paragraphe 1:

«Dans le respect des principes énoncés à l’article 1er et sans préjudice des dispositions et/ou pratiques en vigueur plus favorables aux travailleurs, les États membres déterminent les modalités d’exercice du droit à l’information et à la consultation au niveau approprié, conformément au présent article.»

8

L’article 11 de la directive 2002/14 prévoit que les États membres doivent adopter les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux obligations de cette directive, au plus tard le 23 mars 2005, ou s’assurer que les partenaires sociaux mettent en place à cette date ces dispositions, les États membres devant alors prendre toutes les dispositions nécessaires pour leur permettre d’être toujours en mesure de garantir les résultats imposés par ladite directive.

La réglementation française

9

Conformément à l’article L. 2312‑1 du code du travail, l’élection de délégués du personnel est obligatoire pour tous les établissements comptant au moins onze salariés.

10

Dès lors que l’entreprise ou l’établissement compte cinquante salariés ou plus, les organisations syndicales désignent, en application des articles L. 2142‑1‑1 et L. 2143‑3 de ce code, un représentant syndical et créent, en application de l’article L. 2322‑1 dudit code, un comité d’entreprise.

11

L’article L. 1111‑2 du code du travail dispose:

«Pour la mise en œuvre des dispositions du présent code, les effectifs de l’entreprise sont calculés conformément aux dispositions suivantes:

1o

Les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et les travailleurs à domicile sont pris intégralement en compte dans l’effectif de l’entreprise;

2o

Les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée, les salariés titulaires d’un contrat de travail intermittent, les salariés mis à la disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins un an, ainsi que les salariés temporaires, sont pris en compte dans l’effectif de l’entreprise à due proportion de leur temps de présence au cours des douze mois précédents. Toutefois, les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée et les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure, y compris les salariés temporaires, sont exclus du décompte des effectifs lorsqu’ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu, notamment du fait d’un congé de maternité, d’un congé d’adoption ou d’un congé parental d’éducation;

3o

Les salariés à temps partiel, quelle que soit la nature de leur contrat de travail, sont pris en compte en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leurs contrats de travail par la durée légale ou la durée conventionnelle du travail».

12

L’article L. 1111‑3 du code du travail prévoit:

«Ne sont pas pris en compte dans le calcul des effectifs de l’entreprise:

1o

Les apprentis;

2o

Les titulaires d’un contrat initiative-emploi, pendant la durée de la convention prévue à l’article L. 5134‑66;

3o

(Abrogé);

4o

Les titulaires d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi pendant la durée de la convention mentionnée à l’article L. 5134‑19‑1;

5o

(Abrogé);

6o

Les titulaires d’un contrat de professionnalisation jusqu’au terme prévu par le contrat lorsque celui-ci est à durée déterminée ou jusqu’à la fin de l’action de professionnalisation lorsque le contrat est à durée indéterminée.

Toutefois, ces salariés sont pris en compte pour l’application des dispositions légales relatives à la tarification des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

13

L’AMS est une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. Cette association participe à la mise en place de dispositifs de médiation sociale et de prévention de la délinquance dans la ville de Marseille (France). Elle a également pour mission de favoriser la réinsertion professionnelle des personnes sans emploi ou rencontrant des difficultés sociales et professionnelles d’accès à l’emploi. À cet égard, l’AMS leur propose d’acquérir une formation professionnelle dans le domaine de la médiation sociale au terme d’un projet professionnel individuel.

14

Le 4 juin 2010, l’Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône a désigné M. Laboubi en qualité de représentant de la section...

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