Jean-Marie Le Pen v European Parliament.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:429
CourtCourt of Justice (European Union)
Date07 July 2005
Docket NumberC-208/03
Celex Number62003CJ0208

Affaire C-208/03 P

Jean-Marie Le Pen

contre

Parlement européen

«Pourvoi — Élections des membres du Parlement européen — Absence de procédure électorale uniforme — Application du droit national — Déchéance du mandat de membre du Parlement européen à la suite d'une condamnation pénale — Acte par lequel ce dernier 'prend acte' de cette déchéance — Recours en annulation — Acte non susceptible de recours — Irrecevabilité»

Conclusions de l'avocat général M. F. G. Jacobs, présentées le 27 janvier 2005

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 7 juillet 2005.

Sommaire de l'arrêt

1. Pourvoi — Moyens — Simple répétition des moyens et arguments présentés devant le Tribunal — Irrecevabilité — Contestation de l'interprétation ou de l'application du droit communautaire faite par le Tribunal — Recevabilité

(Art. 225 CE; statut de la Cour de justice, art. 58, al. 1; règlement de procédure de la Cour, art. 112, § 1, c))

2. Recours en annulation — Actes susceptibles de recours — Notion — Actes produisant des effets juridiques obligatoires — Déclaration du président du Parlement européen prenant acte de la vacance d'un siège à la suite de l'application de dispositions nationales par les autorités nationales — Exclusion

(Art. 230 CE; acte portant élection des représentants à l'assemblée au suffrage universel direct, art. 12, § 2)

1. En vertu des articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de cette dernière, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l'erreur de droit dont serait entaché l'arrêt attaqué, se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal. Dès lors qu'un requérant conteste en revanche l'interprétation ou l'application du droit communautaire faite par le Tribunal, les points de droit examinés en première instance peuvent être de nouveau discutés au cours de la procédure de pourvoi. En effet, si un requérant ne pouvait fonder de la sorte son pourvoi sur des moyens et arguments déjà utilisés devant le Tribunal, ladite procédure serait privée d'une partie de son sens.

(cf. points 39-40)

2. Pour déterminer si des actes peuvent faire l'objet d'un recours en annulation en vertu de l'article 230 CE, il convient de s'attacher à la substance même de ceux-ci ainsi qu'à l'intention de leur auteur, la forme dans laquelle un acte ou une décision est pris, étant, en principe, indifférente. Il ne saurait dès lors être exclu qu'une communication écrite, voire une simple déclaration orale, soit soumise au contrôle de la Cour au titre de l'article 230 CE.

Toutefois, l'appréciation d'une déclaration faite par le président du Parlement lors d'une séance plénière relative à la vacance du siège d'un membre ne saurait se faire en méconnaissance des règles et des procédures afférentes à l'élection des membres du Parlement. Aucune procédure électorale uniforme pour l'élection des membres de cette institution n'ayant été adoptée à la date des faits du litige, cette procédure restait régie, conformément à l'article 7, paragraphe 2, de l'acte de 1976, portant élection des représentants à l'assemblée au suffrage universel direct, par les dispositions en vigueur dans chaque État membre. Dès lors que, en vertu des dispositions de la législation d'un État membre, l'inéligibilité entraîne la déchéance du mandat de membre du Parlement, ce dernier n'avait d'autre choix que celui de prendre acte sans délai de la constatation de la vacance du siège, faite par les autorités nationales, laquelle constatation portait sur une situation juridique préexistante et résultait exclusivement d'une décision de ces autorités.

Il résulte en effet du libellé même de l'article 12, paragraphe 2, de l'acte de 1976, en vertu duquel il appartient au Parlement de «prendre acte» d'une vacance de siège résultant de l'application des dispositions nationales en vigueur dans un État membre, que le Parlement ne dispose d'aucune marge d'appréciation en la matière. Dans cette hypothèse particulière, le rôle du Parlement ne consiste pas à constater la vacance du siège, mais à prendre simplement acte de la vacance de siège déjà constatée par les autorités nationales, alors que, dans les autres hypothèses relatives, notamment, à la démission ou au décès de l'un de ses membres, cette institution a un rôle plus actif puisqu'elle constate elle-même la vacance du siège et informe l'État membre concerné de cette vacance. Par ailleurs, il n'appartient pas non plus au Parlement - mais aux juridictions nationales compétentes ou, le cas échéant, à la Cour européenne des droits de l'homme - de vérifier le respect de la procédure prévue par le droit national applicable ou des droits fondamentaux de l'intéressé.

(cf. points 46-50, 56)




ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

7 juillet 2005 (*)

«Pourvoi – Élections des membres du Parlement européen – Absence de procédure électorale uniforme – Application du droit national – Déchéance du mandat de membre du Parlement européen à la suite d’une condamnation pénale – Acte par lequel ce dernier ‘prend acte’ de cette déchéance – Recours en annulation – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité»

Dans l’affaire C-208/03 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 10 mai 2003,

Jean-Marie Le Pen, demeurant à Saint-Cloud (France), représenté par Me F. Wagner, avocat,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Parlement européen, représenté par MM. H. Krück et C. Karamarcos, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

République française, représentée par MM. R. Abraham et G. de Bergues, ainsi que par Mme L. Bernheim, en qualité d’agents,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans (rapporteur), président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. J. Makarczyk, P. Kūris et G. Arestis, juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 janvier 2005,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, M. Le Pen demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 10 avril 2003, Le Pen/Parlement (T-353/00, Rec. p. II‑1729, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté comme irrecevable le recours qu’il avait introduit aux fins d’obtenir l’annulation de la décision prise en la forme d’une déclaration de Mme la présidente du Parlement européen, du 23 octobre 2000, relative à la déchéance de son mandat de membre du Parlement (ci-après l’«acte litigieux»).

2 Par acte séparé, enregistré au greffe de la Cour le 10 juin 2003, M. Le Pen a également introduit, en vertu des articles 242 CE et 243 CE, une demande visant à obtenir le sursis à l’exécution de l’acte litigieux. Cette dernière demande a été rejetée par ordonnance du président de la Cour du 31 juillet 2003, Le Pen/Parlement (C‑208/03 P‑R, Rec. p. I-7939).

Le cadre juridique

Le droit communautaire

Le traité CE

3 L’article 190, paragraphe 4, CE prévoit que le Parlement élaborera un projet en vue de permettre l’élection de ses membres au suffrage universel direct selon une procédure uniforme dans tous les États membres, ou conformément à des principes communs à ces derniers, et que le Conseil de l’Union européenne, statuant à l’unanimité, après avis conforme du Parlement, qui se prononce à la majorité des membres qui le composent, arrêtera les dispositions dont il recommandera l’adoption par lesdits États, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

L’acte de 1976

4 Le 20 septembre 1976, le Conseil a adopté la décision 76/787/CECA, CEE, Euratom, relative à l’acte portant élection des représentants à l’Assemblée au suffrage universel direct (JO L 278, p. 1), acte qui figure en annexe de ladite décision (ci-après, dans sa version originelle, l’«acte de 1976»).

5 En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de l’acte de 1976, les membres du Parlement «sont élus pour une période de cinq ans».

6 L’article 6 de l’acte de 1976 énumère, à son paragraphe 1, les fonctions avec lesquelles la qualité de membre du Parlement est incompatible et prévoit, à son paragraphe 2, que «chaque État membre peut fixer les incompatibilités applicables sur le plan national, dans les conditions prévues à l’article 7, paragraphe 2». Aux termes du paragraphe 3 du même article, les membres du Parlement auxquels sont applicables, en cours de mandat, les dispositions desdits paragraphes 1 et 2 «sont remplacés conformément aux dispositions de l’article 12».

7 L’article 7, paragraphe 1, de l’acte de 1976 précise que l’élaboration du projet de procédure électorale uniforme relève de la compétence du Parlement, mais, à la date des faits du litige, aucune procédure de ce type n’avait encore été adoptée.

8 Aux termes de l’article 7, paragraphe 2, de l’acte de 1976:

«Jusqu’à l’entrée en vigueur d’une procédure électorale uniforme, et sous réserve des autres dispositions du présent acte, la procédure électorale est régie, dans chaque État membre, par les dispositions nationales.»

9 L’article 11 de l’acte de 1976 est libellé comme suit:

«Jusqu’à l’entrée en vigueur de la procédure uniforme prévue à l’article 7, paragraphe 1, [le Parlement] vérifie les pouvoirs des représentants. À cet effet, [il] prend acte des résultats proclamés officiellement par les États membres et statue sur les contestations qui pourraient être éventuellement soulevées sur la base des dispositions du présent acte, à l’exclusion...

To continue reading

Request your trial
21 practice notes
  • Technische Unie BV v Commission of the European Communities.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 8 December 2005
    ...(C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417), apartado 25. En el mismo sentido, véase también la sentencia de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento (C‑208/03 P, Rec. p. I‑0000), apartado 45. 17 – Véanse, en particular, los apartados 360, 367 y 379 de la sentencia recurrida. 18 – En el considerando 69 de la......
  • Sofiane Fahas v Council of the European Union.
    • European Union
    • General Court (European Union)
    • 7 December 2010
    ...Rec. p. II‑1729, apartado 91, confirmada en casación por sentencia del Tribunal de Justicia de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento, C‑208/03 P, Rec. p. I‑6051). 73 Por lo que se refiere a las restricciones del derecho de propiedad y del derecho a ejercer una actividad económica invocadas ......
  • Oriol Junqueras i Vies contra Parlamento Europeo.
    • European Union
    • General Court (European Union)
    • 15 December 2020
    ...du mandat électoral expressément prévue par cette législation (voir, par analogie, arrêt du 7 juillet 2005, Le Pen/Parlement, C‑208/03 P, EU:C:2005:429, point 61 Deuxièmement, dans l’arrêt du 7 juillet 2005, Le Pen/Parlement (C‑208/03 P, EU:C:2005:429), la Cour a dit pour droit que l’articl......
  • Organisation des Modjahedines du peuple d'Iran v Council of the European Union.
    • European Union
    • General Court (European Union)
    • 12 December 2006
    ...Rec. p. II‑1729, apartado 91, confirmada en casación por la sentencia del Tribunal de Justicia de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento, C‑208/03 P, Rec. p. I‑6051). 122 En el supuesto de que la medida comunitaria de congelación de fondos se adopte sobre la base de una decisión de una autor......
  • Request a trial to view additional results
19 cases
  • European Wire Rope Importers Association (EWRIA) and Others v European Commission.
    • European Union
    • General Court (European Union)
    • 17 December 2010
    ...(sentencias del Tribunal de Justicia IBM/Comisión, citada en el apartado 31 supra, apartado 9; de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento, C‑208/03 P, Rec. p. I‑6051, apartado 46, y Athinaïki Techniki/Comisión, citada en el apartado 25 supra, apartado 29). Si no fuera así, la Comisión podría ......
  • Technische Unie BV v Commission of the European Communities.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 8 December 2005
    ...(C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417), apartado 25. En el mismo sentido, véase también la sentencia de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento (C‑208/03 P, Rec. p. I‑0000), apartado 45. 17 – Véanse, en particular, los apartados 360, 367 y 379 de la sentencia recurrida. 18 – En el considerando 69 de la......
  • ViaSat, Inc. v European Commission.
    • European Union
    • General Court (European Union)
    • 10 March 2021
    ...las sentencias de 11 de noviembre de 1981, IBM/Comisión, 60/81, EU:C:1981:264, apartado 9, y de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento, C‑208/03 P, EU:C:2005:429, apartado 70 En el caso de autos, como se desprende de los apartados 58 a 60 anteriores, la Comisión, mediante sus escritos de 14 ......
  • August Storck KG v Office for Harmonisation in the Internal Market (Trade Marks and Designs) (OHIM).
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 22 June 2006
    ...4 de julio de 2000, Bergaderm y Goupil/Comisión, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, apartados 34 y 35, y de 7 de julio de 2005, Le Pen/Parlamento, C‑208/03 P, Rec. p. I‑6051, apartado 39). 48 En cambio, cuando un recurrente impugna la interpretación o la aplicación del Derecho comunitario efectuad......
  • Request a trial to view additional results
1 books & journal articles

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT