PAO Rosneft Oil Company, anciennement NK Rosneft OAO and Others v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
Date17 September 2020
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

17 septembre 2020 (*)

« Pourvoi – Mesures restrictives prises eu égard aux actions de la Fédération de Russie déstabilisant la situation en Ukraine – Liste des personnes, entités et organismes auxquels s’applique le gel des fonds et des ressources économiques – Inscription du nom des requérantes sur la liste des entités auxquelles s’appliquent des mesures restrictives »

Dans l’affaire C‑732/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 23 novembre 2018,

Rosneft Oil Company PAO, anciennement NK Rosneft OAO, établie à Moscou (Russie),

RN-Shelf-Arctic OOO, établie à Moscou,

RN-Shelf-Far East AO, anciennement RN-Shelf-Dalniy Vostok ZAO, établie à Yuzhno-Sakhalinsk (Russie),

RN-Exploration OOO, établie à Moscou,

Tagulskoe OOO, établie à Krasnoyarsk (Russie),

représentées par Me L. Van den Hende, advocaat,

parties requérantes,

les autres parties à la procédure étant :

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme M.-M. Joséphidès et M. B. Driessen, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord,

Commission européenne, représentée initialement par M. L. Havas ainsi que par Mmes J. Norris et A. Tizzano, puis par M. L. Havas et Mme J. Norris, en qualité d’agents,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. P. G. Xuereb (rapporteur), président de chambre, MM. T. von Danwitz et A. Kumin, juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par leur pourvoi, Rosneft Oil Company PAO, anciennement NK Rosneft OAO, RN-Shelf-Arctic OOO, RN-Shelf-Far East AO, anciennement RN-Shelf-Dalniy Vostok ZAO, RN-Exploration OOO et Tagulskoe OOO demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 13 septembre 2018, Rosneft e.a./Conseil (T‑715/14, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:544), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant à l’annulation, d’une part, de l’article 1er, paragraphe 2, sous b) à d), et paragraphe 3, et de l’annexe III de la décision 2014/512/PESC du Conseil, du 31 juillet 2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine (JO 2014, L 229, p. 13), telle que modifiée par la décision (PESC) 2016/2315 du Conseil, du 19 décembre 2016 (JO 2016, L 345, p. 65) (ci-après la « décision litigieuse »), et, d’autre part, des articles 3 et 3 bis, de l’article 4, paragraphes 3 et 4, de l’article 5, paragraphe 2, sous b) à d), et paragraphe 3, de l’article 11 ainsi que des annexes II et VI du règlement (UE) nº 833/2014 du Conseil, du 31 juillet 2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine (JO 2014, L 229, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) nº 1290/2014 du Conseil, du 4 décembre 2014 (JO 2014, L 349, p. 20, et rectificatifs JO 2014, L 246, p. 59, et JO 2014, L 369, p. 79) (ci-après le « règlement litigieux ») (ci-après, ensemble, les « actes litigieux »).

Le cadre juridique

Le droit international

L’accord de partenariat Union européenne-Russie

2 L’accord de partenariat et de coopération établissant un partenariat entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la Fédération de Russie, d’autre part, signé à Corfou le 24 juin 1994, a été approuvé au nom des Communautés européennes par la décision 97/800/CECA, CE, Euratom du Conseil et de la Commission, du 30 octobre 1997 (JO 1997, L 327, p. 1, ci-après l’« accord de partenariat Union européenne‑Russie »). Sous le titre XI de cet accord, intitulé « Dispositions institutionnelles, générales et finales », l’article 99 de ce dernier dispose :

« Aucune disposition du présent accord n’empêche une partie de prendre les mesures :

1) qu’elle estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité :

[...]

– d) en cas de troubles internes graves susceptibles de porter atteinte à la paix publique, en cas de guerre ou de grave tension internationale menaçant de déboucher sur un conflit armé ou afin de satisfaire à des obligations qu’elle a acceptées en vue d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationale

[...] »

La réglementation de l’Organisation mondiale du commerce (OMC)

3 L’article XXI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) dispose :

« Aucune disposition du présent Accord ne sera interprétée

a) comme imposant à une partie contractante l’obligation de fournir des renseignements dont la divulgation serait, à son avis, contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité ;

b) ou comme empêchant une partie contractante de prendre toutes mesures qu’elle estimera nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité :

i) se rapportant aux matières fissiles ou aux matières qui servent à leur fabrication ;

ii) se rapportant au trafic d’armes, de munitions et de matériel de guerre et à tout commerce d’autres articles et matériel destinés directement ou indirectement à assurer l’approvisionnement des forces armées ;

iii) appliquées en temps de guerre ou en cas de grave tension internationale ;

c) ou comme empêchant une partie contractante de prendre des mesures en application de ses engagements au titre de la Charte des Nations unies, en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationales. »

Les actes litigieux

La décision litigieuse

4 Les considérants 1 à 8 de la décision litigieuse énoncent les circonstances ayant précédé l’adoption des mesures restrictives prévues par celle‑ci.

5 Aux termes de l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de cette décision :

« 2. Sont interdits l’achat direct ou indirect ou la vente directe ou indirecte, la fourniture directe ou indirecte de services d’investissement ou l’aide à l’émission ou toute autre opération portant sur des obligations, actions ou instruments financiers similaires dont l’échéance est supérieure à 30 jours, émis après le 12 septembre 2014 par :

[...]

b) des entités établies en Russie qui sont contrôlées par l’État ou détenues à plus de 50 % par l’État, dont l’actif total est estimé à plus de 1 000 milliards de roubles russes et dont au moins 50 % des revenus estimés proviennent de la vente ou du transport de pétrole brut ou de produits pétroliers à la date du 12 septembre 2014, qui figurent à l’annexe III ;

c) toute personne morale, toute entité ou tout organisme établi en dehors de l’Union détenu à plus de 50 % par une entité visée [au point] [...] b) ; ou

d) toute personne morale, toute entité ou tout organisme agissant pour le compte ou sur les instructions d’une entité d’une catégorie visée au point c) ou figurant à l’annexe [...] III.

3. Il est interdit de conclure un accord ou d’en faire partie, directement ou indirectement, en vue d’accorder de nouveaux prêts ou crédits dont l’échéance est supérieure à 30 jours à toute personne morale, toute entité ou tout organisme visé au paragraphe [...] 2, après le 12 septembre 2014, à l’exception des prêts ou des crédits ayant pour objectif spécifique et justifié de fournir un financement pour des importations ou des exportations directes ou indirectes non soumises à interdiction de biens et de services non financiers entre l’Union et la Russie ou tout autre État tiers ou des prêts ayant pour objectif spécifique et justifié de fournir un financement d’urgence, visant à répondre aux critères de solvabilité et de liquidité, à des personnes morales établies dans l’Union, dont les droits de propriété sont détenus à plus de 50 % par une entité visée à l’annexe I. »

6 L’annexe III de la décision litigieuse contient la liste des personnes morales, des entités et des organismes visés à l’article 1er, paragraphe 2, sous b), de cette décision, parmi lesquels figure Rosneft.

Le règlement litigieux

7 Le considérant 2 du règlement litigieux énonce :

« Le 22 juillet 2014, le Conseil [de l’Union européenne] a conclu que, si la Russie ne répondait pas aux demandes formulées dans les conclusions du Conseil européen du 27 juin 2014 et dans ses propres conclusions du 22 juillet, il serait résolu à introduire sans délai un ensemble de nouvelles mesures restrictives substantielles. Il est donc jugé approprié d’appliquer des mesures restrictives supplémentaires dans le but d’accroître le coût des actions de la Russie visant à compromettre l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine et de promouvoir un règlement pacifique de la crise. [...] »

8 L’article 1er, sous f), i), de ce règlement définit les « valeurs mobilières » comme visant « les actions de sociétés et autres titres équivalents à des actions de sociétés, de sociétés de type partnership ou d’autres entités ainsi que les certificats de titres en dépôt représentatifs d’actions ».

9 Aux termes de l’article 3 dudit règlement :

« 1. Une autorisation préalable est nécessaire pour vendre, fournir, transférer ou exporter, directement ou indirectement, les articles énumérés à l’annexe II, originaires ou non de l’Union, à toute personne physique ou morale, toute entité ou tout organisme en Russie, y compris dans sa zone économique exclusive et sur son plateau continental, ou dans tout autre État, si de tels articles sont destinés à être utilisés en Russie, y compris dans sa zone économique exclusive et sur son plateau continental.

2. Pour l’ensemble des ventes, fournitures, transferts ou exportations soumis à autorisation en vertu du présent article, l’autorisation est accordée par les autorités compétentes de l’État membre où l’exportateur est établi et conformément aux modalités prévues à l’article 11 du règlement (CE) nº 428/2009 [du Conseil, du 5 mai 2009, instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du...

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