Prysmian SpA and Prysmian Cavi e Sistemi Srl v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:751
Docket NumberC-601/18
Date24 September 2020
Celex Number62018CJ0601
CourtCourt of Justice (European Union)
62018CJ0601

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

24 septembre 2020 ( *1 )

« Pourvoi – Concurrence – Ententes – Marché européen des câbles électriques souterrains et sous-marins – Répartition du marché dans le cadre de projets – Infraction unique et continue – Succession d’entités juridiques – Imputabilité du comportement infractionnel – Principe d’égalité de traitement – Dénaturation d’éléments de preuve – Règlement (CE) no 1/2003 – Article 20 – Pouvoirs d’inspection de la Commission européenne en matière d’ententes – Pouvoir de copier des données sans examen préalable et de les examiner ensuite dans les locaux de la Commission – Amendes »

Dans l’affaire C‑601/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 septembre 2018,

Prysmian SpA, établie à Milan (Italie),

Prysmian Cavi e Sistemi Srl, établie à Milan,

représentées initialement par Mes C. Tesauro et L. Armati, avvocati, puis par M. C. Firth et Mme C. Griesenbach, solicitors,

parties requérantes,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par Mmes F. Castilla Contreras, C. Sjödin et T. Vecchi ainsi que par M. P. Rossi, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

The Goldman Sachs Group Inc., établie à New York (États-Unis), représentée par Me J. Koponen, advokat, ainsi que par Me A. Mangiaracina, avvocatessa,

Pirelli & C. SpA, établie à Milan, représentée par Mes G. Rizza et M. Siragusa, avvocati,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. P. G. Xuereb (rapporteur) et T. von Danwitz, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. M. Longar, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 octobre 2019,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Par leur pourvoi, Prysmian SpA et Prysmian Cavi e Sistemi Srl demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 juillet 2018, Prysmian et Prysmian Cavi e Sistemi/Commission (T‑475/14, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:448), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision C(2014) 2139 final de la Commission, du 2 avril 2014, relative à une procédure d’application de l’article 101 [TFUE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39610 – Câbles électriques) (ci–après la « décision litigieuse »), en tant qu’elle les concerne, et, d’autre part, à la réduction du montant des amendes qui leur ont été infligées dans la décision litigieuse.

Le cadre juridique

2

L’article 20, intitulé « Pouvoirs de la Commission en matière d’inspection », du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 et 102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), prévoit :

« 1. Pour l’accomplissement des tâches qui lui sont assignées par le présent règlement, la Commission peut procéder à toutes les inspections nécessaires auprès des entreprises et associations d’entreprises.

2. Les agents et les autres personnes les accompagnant mandatés par la Commission pour procéder à une inspection sont investis des pouvoirs suivants :

a)

accéder à tous les locaux, terrains et moyens de transport des entreprises et associations d’entreprises ;

b)

contrôler les livres ainsi que tout autre document professionnel, quel qu’en soit le support ;

c)

prendre ou obtenir sous quelque forme que ce soit copie ou extrait de ces livres ou documents ;

d)

apposer des scellés sur tous les locaux commerciaux et livres ou documents pendant la durée de l’inspection et dans la mesure où cela est nécessaire aux fins de celle-ci ;

e)

demander à tout représentant ou membre du personnel de l’entreprise ou de l’association d’entreprises des explications sur des faits ou documents en rapport avec l’objet et le but de l’inspection et enregistrer ses réponses.

[...]

4. Les entreprises et associations d’entreprises sont tenues de se soumettre aux inspections que la Commission a ordonnées par voie de décision. La décision indique l’objet et le but de l’inspection, fixe la date à laquelle elle commence et indique les sanctions prévues aux articles 23 et 24, ainsi que le recours ouvert devant la Cour de justice contre la décision. La Commission prend ces décisions après avoir entendu l’autorité de concurrence de l’État membre sur le territoire duquel l’inspection doit être effectuée.

[...] »

3

L’article 21 de ce règlement, intitulé « Inspection d’autres locaux », énonce :

« 1. S’il existe un soupçon raisonnable que des livres ou autres documents professionnels liés au domaine faisant l’objet de l’inspection qui pourraient être pertinents pour prouver une violation grave de l’article [101] ou [102 TFUE] sont conservés dans d’autres locaux, terrains et moyens de transport, y compris au domicile des chefs d’entreprises, des dirigeants et des autres membres du personnel des entreprises et associations d’entreprises concernées, la Commission peut ordonner par voie de décision qu’il soit procédé à une inspection dans ces autres locaux, terrains et moyens de transport.

[...]

4. Les agents et les autres personnes les accompagnant mandatés par la Commission pour procéder à une inspection ordonnée conformément au paragraphe 1 disposent des pouvoirs définis à l’article 20, paragraphe 2, points a), b) et c). [...] »

4

Aux termes de l’article 23, paragraphes 2 et 3, dudit règlement :

« 2. La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [101] ou [102 TFUE] [...]

[...]

3. Pour déterminer le montant de l’amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci. »

Les antécédents du litige et la décision litigieuse

5

Les antécédents du litige, qui figurent aux points 1 à 20, 39 à 44 et 131 de l’arrêt attaqué, peuvent, pour les besoins de la présente procédure, être résumés comme suit.

6

Les requérantes, Prysmian SpA et Prysmian Cavi e Sistemi Srl (ci-après « PrysmianCS »), sont deux sociétés italiennes constituant, dans leur ensemble, le groupe Prysmian. La seconde d’entre elles, détenue à 100 % par la première, est un acteur mondial présent dans le secteur des câbles électriques sous-marins et souterrains.

7

Entre le 18 février 1999 et le 28 juillet 2005, Pirelli & C. SpA (ci-après « Pirelli »), anciennement Pirelli SpA, une société italienne, était la société mère de Pirelli Cavi e Sistemi SpA (ci-après « PirelliCS »), puis de Pirelli Cavi e Sistemi Energia SpA (ci-après « PirelliCSE »), qui étaient actives dans le secteur des câbles électriques sous-marins et souterrains. Le 28 juillet 2005, Pirelli a cédé cette dernière société à une filiale de The Goldman Sachs Group Inc. (ci-après « Goldman Sachs »), une société américaine. À la suite de cette cession, PirelliCSE est devenue Prysmian Cavi e Sistemi Energia Srl (ci-après « PrysmianCSE »), puis PrysmianCS.

8

Par lettre du 17 octobre 2008, ABB AB, une société établie en Suède, a fourni à la Commission européenne, dans le cadre d’une demande d’immunité, au sens de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17), une série de déclarations et de documents relatifs à des pratiques commerciales restrictives dans ce secteur.

9

Par la suite, la Commission a procédé à une enquête.

10

Le mercredi 28 janvier 2009, les inspecteurs de la Commission (ci-après les « inspecteurs »), accompagnés d’un représentant de l’autorité italienne de la concurrence, se sont rendus dans les locaux des requérantes à Milan (Italie) afin de procéder à une inspection au titre de l’article 20, paragraphe 4, du règlement no 1/2003 (ci-après l’« inspection en cause »), sur le fondement d’une décision du 9 janvier 2009 ordonnant à Prysmian ainsi qu’aux entreprises directement ou indirectement contrôlées par elle de se soumettre à une telle inspection (ci-après la « décision d’inspection »). Selon l’article 1er, deuxième alinéa, de cette décision, « [l]’inspection [en cause pouvait] avoir lieu dans tous les locaux de l’entreprise ou de ses filiales, et en particulier dans les locaux situés à Viale Scarca 222, 20126 Milan, Italie ». Après avoir notifié cette décision aux requérantes et leur avoir remis une note explicative concernant les inspections, les inspecteurs ont contrôlé les ordinateurs de cinq employés, en présence des représentants et des avocats des requérantes.

11

Le deuxième jour de l’inspection en cause, à savoir le jeudi 29 janvier 2009, les inspecteurs ont informé les requérantes que celle-ci prendrait plus de temps que les trois jours initialement prévus. Les requérantes se sont déclarées prêtes soit à permettre l’accès à leurs locaux au cours du week-end, soit à ce que des scellés y soient apposés afin que l’inspection en cause reprenne la semaine suivante. Néanmoins, le troisième jour de celle-ci, à savoir le vendredi 30 janvier 2009, les inspecteurs ont décidé de faire une copie-image des disques durs des ordinateurs de trois des cinq employés initialement visés (ci-après les « ordinateurs en cause »), afin d’examiner l’information contenue dans ceux-ci dans les bureaux de la Commission à Bruxelles (Belgique).

12

Les requérantes ont fait observer que...

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