Xellia Pharmaceuticals ApS and Alpharma, LLC, anciennement Zoetis Products LLC v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
Celex Number62016CJ0611
ECLIECLI:EU:C:2021:245
Docket NumberC-611/16
Date25 March 2021
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

25 mars 2021 (*)

« Pourvoi – Concurrence – Ententes – Produits pharmaceutiques – Marché des médicaments antidépresseurs (citalopram) – Accords de règlement amiable de litiges relatifs à des brevets de procédé conclus entre un fabricant de médicaments princeps titulaire de ces brevets et des fabricants de médicaments génériques – Article 101 TFUE – Concurrence potentielle – Restriction par objet – Qualification – Calcul du montant de l’amende – Droits de la défense – Délai raisonnable – Perte de documents par l’écoulement du temps – Devoir général de prudence – Règlement (CE) no 1/2003 – Article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa – Plafonnement de l’amende – Prise en compte de l’exercice social précédent celui de l’adoption de la décision de la Commission européenne – Dernier exercice complet d’activité économique normale »

Dans l’affaire C‑611/16 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 25 novembre 2016,

Xellia Pharmaceuticals ApS, établie à Copenhagen (Danemark),

Alpharma LLC, anciennement Zoetis Products LLC, établie à Parsippany, New Jersey (États-Unis),

représentées par M. D. W. Hull, solicitor,

parties requérantes,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par Mmes F. Castilla Contreras et T. Vecchi ainsi que par MM. B. Mongin et C. Vollrath, en qualité d’agents, assistés de MM. B. Rayment et D. Bailey, barristers, ainsi que de M. G. Peretz, QC, et de Mme S. Kingston, SC,

partie défenderesse en première instance,

soutenue par :

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté initialement par Mmes D. Guðmundsdóttir et Z. Lavery ainsi que par M. D. Robertson, en qualité d’agents, assistés de M. J. Holmes, QC, puis par Mme D. Guðmundsdóttir, en qualité d’agent, assistée de M. J. Holmes, QC,

partie intervenante au pourvoi,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. M. Vilaras, président de chambre, MM. D. Šváby (rapporteur), S. Rodin, Mme K. Jürimäe et M. P. G. Xuereb, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffiers : M. M. Aleksejev, chef d’unité, Mme C. Strömholm, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 janvier 2019,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par leur pourvoi, Xellia Pharmaceuticals ApS et Alpharma LLC demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 septembre 2016, Xellia Pharmaceuticals et Alpharma/Commission (T‑471/13, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2016:460), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant, d’une part, à l’annulation partielle de la décision C(2013) 3803 final de la Commission européenne, du 19 juin 2013, relative à une procédure d’application de l’article 101 [TFUE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT/39226 – Lundbeck) (ci-après la « décision litigieuse »), et, d’autre part, à la réduction du montant de l’amende qui leur a été infligée par cette décision.

Le cadre juridique

Le règlement (CE) no 1/2003

2 Sous l’intitulé « Enquêtes par secteur économique et par type d’accords », l’article 17, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE) nº 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 et 102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), prévoit :

« Lorsque l’évolution des échanges entre États membres, la rigidité des prix ou d’autres circonstances font présumer que la concurrence peut être restreinte ou faussée à l’intérieur du marché [intérieur], la Commission peut mener son enquête sur un secteur particulier de l’économie ou un type particulier d’accords dans différents secteurs. Dans le cadre de cette enquête, la Commission peut demander aux entreprises ou aux associations d’entreprises concernées les renseignements nécessaires à l’application des articles [101 et 102 TFUE] et effectuer les inspections nécessaires à cette fin. »

3 L’article 21, paragraphe 3, de ce règlement dispose :

« Une décision prise conformément au paragraphe 1 ne peut être exécutée sans autorisation préalable de l’autorité judiciaire nationale de l’État membre concerné. L’autorité judiciaire nationale contrôle que la décision de la Commission est authentique et que les mesures coercitives envisagées ne sont ni arbitraires ni excessives eu égard notamment à la gravité de la violation suspectée, à l’importance des éléments de preuve recherchés, à l’implication de l’entreprise concernée et à la probabilité raisonnable que les livres et documents liés à l’objet de l’inspection soient conservés dans les locaux dont l’inspection est demandée. L’autorité judiciaire nationale peut demander à la Commission, directement ou par l’intermédiaire de l’autorité de concurrence de l’État membre, des explications détaillées sur les éléments qui lui sont nécessaires pour pouvoir contrôler la proportionnalité des mesures coercitives envisagées.

Cependant, l’autorité judiciaire nationale ne peut remettre en cause la nécessité d’une inspection ni exiger la communication des informations figurant dans le dossier de la Commission. Le contrôle de la légalité de la décision de la Commission est réservé à la Cour de justice. »

4 L’article 23, paragraphe 2, dudit règlement prévoit :

« La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

a) elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [101 ou 102 TFUE], ou

[...]

Pour chaque entreprise et association d’entreprises participant à l’infraction, l’amende n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.

[...] »

Les lignes directrices sur le calcul des amendes de 2006

5 Les points 19 à 22 et 37 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement (CE) nº 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices sur le calcul des amendes de 2006 »), énoncent :

« 19. Le montant de base de l’amende sera lié à une proportion de la valeur des ventes, déterminée en fonction du degré de gravité de l’infraction, multipliée par le nombre d’années d’infraction.

20. L’appréciation de la gravité sera faite au cas par cas pour chaque type d’infraction, tenant compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce.

21. En règle générale, la proportion de la valeur des ventes prise en compte sera fixée à un niveau pouvant aller jusqu’à 30 %.

22. Afin de décider si la proportion de la valeur des ventes à prendre en considération dans un cas donné devrait être au bas ou au haut de cette échelle, la Commission tiendra compte d’un certain nombre de facteurs, tels que la nature de l’infraction, la part de marché cumulée de toutes les parties concernées, l’étendue géographique de l’infraction, et la mise en œuvre ou non de l’infraction.

[...]

37. Bien que les présentes [l]ignes directrices exposent la méthodologie générale pour la fixation d’amendes, les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier que la Commission s’écarte de cette méthodologie ou des limites fixées au point 21. »

La décision du 15 janvier 2008 ouvrant une enquête sur le secteur pharmaceutique

6 Les considérants 3 à 5 ainsi que le considérant 8 de la décision de la Commission, du 15 janvier 2008, ouvrant une enquête sur le secteur pharmaceutique conformément à l’article 17 du règlement (CE) nº 1/2003 (affaire no COMP/D 2/39.514) (ci-après la « décision du 15 janvier 2008 ouvrant une enquête sur le secteur pharmaceutique »), sont libellés dans les termes suivants :

« (3) Certaines circonstances ayant trait à la concurrence exercée par les médicaments innovants et génériques en général donnent à penser que la concurrence dans le secteur pharmaceutique en Europe peut être restreinte ou faussée, comme, par exemple, un recul de l’innovation compte tenu du nombre de médicaments nouveaux arrivant sur le marché, ainsi que des cas d’entrée tardive sur le marché de fournisseurs de médicaments génériques.

(4) Des éléments indiquent l’existence de pratiques commerciales de la part de fournisseurs pharmaceutiques, y compris, particulièrement, l’obtention de brevets ou leur exercice, qui pourraient servir non à protéger l’innovation, mais à empêcher la concurrence provenant des médicaments innovants et/ou génériques ; de procédures contentieuses qui pourraient avoir un caractère abusif, ainsi que d’accords susceptibles d’avoir un caractère collusoire.

(5) Ces pratiques peuvent donner lieu à des distorsions de concurrence lorsqu’elles protègent de manière injustifiée les fournisseurs de médicaments en place de la concurrence provenant des médicaments innovants ou génériques, par exemple en raison de l’extension, de facto, de la protection conférée par un brevet par le biais d’un comportement unilatéral ou d’accords. De telles pratiques peuvent limiter le choix des consommateurs, diminuer les incitations économiques à investir dans la recherche et le développement de nouveaux produits et porter atteinte aux budgets de santé des secteurs public et privé.

[...]

(8) Dans la mesure où l’enquête sur le secteur pharmaceutique révèlerait l’existence éventuelle d’accords ou de pratiques anticoncurrentiels ou d’abus de position dominante, la Commission ou, le cas échéant, les autorités nationales de concurrence pourraient envisager de prendre les mesures appropriées pour rétablir la concurrence dans le secteur, notamment en ouvrant des enquêtes à l’égard d’entités individuelles qui pourraient déboucher sur des décisions au titre de l’article [101] et/ou de l’article [102 TFUE] ».

Les antécédents du litige

7 Le présent pourvoi s’inscrit dans le cadre de six pourvois connexes dirigés contre six arrêts du...

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