Laure Camerin contre Commission européenne.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2022:516
Docket NumberC-63/21
Date30 June 2022
Celex Number62021CJ0063
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

30 juin 2022 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Ancien fonctionnaire – Retenues opérées sur la pension d’ancienneté – Exécution d’une décision d’une juridiction nationale – Recours en annulation et en indemnité »

Dans l’affaire C‑63/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 2 février 2021,

Laure Camerin, demeurant à Bastia (France), représentée par Me M. Casado García-Hirschfeld, avocate,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par M. T. S. Bohr et Mme D. Milanowska, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. N. Jääskinen (rapporteur), président de chambre, MM. M. Safjan et N. Piçarra, juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, la requérante demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 24 novembre 2020, Camerin/Commission (T‑367/19, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2020:569), par laquelle celui-ci a jugé, d’une part, qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur la demande de la requérante visant à l’annulation partielle de la décision de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission européenne du 17 avril 2019 relative à l’exécution d’une saisie-arrêt adoptée par une juridiction belge, en ce que ce dernier s’est réservé le droit de retenir des montants supplémentaires sur les pensions à échoir de la requérante dans les limites fixées en droit belge (ci-après la « décision litigieuse ») et a rejeté, d’autre part, la demande de la requérante tendant à la réparation du préjudice moral qu’elle aurait prétendument subi.

Les antécédents du litige

2 Le Tribunal a résumé les antécédents du litige aux points suivants de l’ordonnance attaquée :

« 1 La requérante, Mme Laure Camerin, est une ancienne fonctionnaire du Parlement européen et reçoit une pension d’ancienneté au titre du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le “statut”).

2 Saisi par une personne privée, le juge de paix d’Etterbeek (Belgique) a rendu un jugement par défaut le 21 décembre 2017, selon lequel 8 114,75 euros étaient dus par la requérante.

3 Le 13 mars 2018, un huissier de justice belge a signifié à la Commission européenne une saisie-arrêt à l’encontre de la requérante. La somme couverte par ladite saisie-arrêt était de 7 031,50 euros.

4 Le 19 avril 2018, la requérante a formé opposition à la saisie-arrêt du 13 mars 2018 et cette dernière est devenue ainsi conservatoire.

5 Sur la base de cette saisie-arrêt et en application du droit belge, l’Office “Gestion et liquidation des droits individuels” (PMO) de la Commission a saisi la partie saisissable de la pension de la requérante pendant neuf mois. À cet effet, il a retenu un montant de 3 437 euros par mois sur la pension de la requérante, lui versant seulement un montant de 1 318,32 euros, sur la période allant du mois d’avril au mois de décembre 2018. La somme ainsi retenue par le PMO a été de 30 933 euros. Ces montants ont été mis sur un compte d’attente.

6 Le 3 janvier 2019, la requérante a introduit une réclamation contre la décision du PMO de poursuivre des prélèvements sur sa pension au-delà du montant figurant dans la saisie-arrêt du 13 mars 2018.

7 Le 11 mars 2019, le secrétaire général du Parlement y a donné une suite favorable. Il a ainsi chargé le directeur général du personnel du Parlement de prendre contact avec le PMO pour que la somme prélevée sur la pension de la requérante au-delà de la somme figurant dans la saisie-arrêt lui soit restituée.

8 Le 13 mars 2019, le Parlement a communiqué cette décision à la Commission et a demandé la restitution de la somme prélevée au-delà du montant figurant dans la saisie-arrêt du 13 mars 2018.

9 Par courriel du 13 mars 2019, l’avocat de la requérante a informé le PMO que, par jugement du 28 février 2019, le tribunal de première instance de Bruxelles (Belgique) avait ordonné la mainlevée de la saisie-arrêt du 13 mars 2018.

10 Le PMO ayant par la suite contacté l’huissier de justice belge pour lui demander confirmation de la mainlevée, ce dernier a informé le PMO que, tant que le jugement ne lui avait pas été notifié formellement, le PMO ne pouvait pas en tenir compte.

11 Le 21 mars 2019, le même huissier de justice a signifié à la Commission une seconde saisie-arrêt présentée à la demande de la même créancière pour un montant de 7 245,19 euros et également fondée sur le jugement rendu par défaut à l’encontre de la requérante le 21 décembre 2017.

12 Par lettre du 29 mars 2019, l’huissier de justice a donné mainlevée de la saisie-arrêt du 13 mars 2018.

13 Par courriel du 4 avril 2019, le PMO a informé l’huissier de justice qu’il avait exécuté la seconde saisie-arrêt et qu’il attendait ses instructions à cet égard.

14 Le 5 avril 2019, la requérante a transmis au PMO une copie d’une citation en opposition de la seconde saisie-arrêt, cette dernière devenant conservatoire jusqu’au prononcé de la décision de la juridiction belge compétente.

15 Par lettre du 12 avril 2019, l’huissier de justice a informé le PMO que la dette de la requérante avait entre-temps augmenté pour atteindre un total de 9 777,59 euros.

16 Le 17 avril 2019, le PMO a adopté [la décision litigieuse].

17 Dans cette décision, le PMO explique qu’il est tenu de donner suite à une décision adoptée par une juridiction nationale valant titre exécutoire. À cet égard, il y est relevé que, sous réserve des règles d’insaisissabilité, le PMO, en tant que tiers saisi, ne peut pas se dessaisir des sommes qui faisaient l’objet de la saisie, les règles d’insaisissabilité applicables étant celles établies par le droit belge. La décision [litigieuse] indique également ce qui suit :

“[l]a situation financière se présente comme suit :

– [l]e montant versé sur un compte d’attente s’élève actuellement à 30 933,00 [euros ;]

– [l]e décompte communiqué dernièrement par [l’huissier de justice] au PMO confirme le montant restant dû [de] 9 777,59 [euros ;]

– [à la suite de] la deuxième saisie-arrêt, le PMO devra de nouveau limiter la pension à vous verser à 1 346,00 [euros].

Au vu des circonstances de votre dossier, j’ai décidé de libérer les montants au-delà de la somme de 9 777,59 [euros]. Sur votre bulletin de pension pour avril 2019, seul le montant de 1 346,00 [euros] sera indiqué pour paiement. Or vous recevrez le montant restant de votre pension d’avril 2019 (un montant de 3 839,60 [euros]) ainsi que le montant actuellement bloqué sur le compte d’attente moins le montant restant dû (30 933,00 [euros] moins 9 777,59 [euros] = 21 155,41 [euros]) par paiement séparé. Vous recevrez donc un paiement séparé pour un montant total de 24 995,01 [euros].

Cependant, dans la mesure où la saisie-arrêt reste active, le PMO se réserve le droit de bloquer des montants supplémentaires sur les pensions à échoir (dans les limites de la quotité insaisissable) dans l’hypothèse où l’huissier de justice donnerait des instructions portant sur d’autres dettes et/ou d’autres frais. Au cas où le PMO serait déclaré débiteur pour de telles sommes dans le cadre de la saisie-arrêt en cours sur votre pension d’ancienneté, je me verrais contrainte de procéder à la compensation sur votre pension ”.

18 Le 9 mai 2019, la requérante a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par laquelle elle a sollicité l’annulation partielle de la décision [litigieuse] et la réparation du préjudice moral et matériel subi du fait du comportement du PMO dans le traitement de son dossier depuis 2018, qu’elle évalue à 25 000 euros. »

Le recours devant le Tribunal, les faits postérieurs à l’introduction de celui-ci et l’ordonnance attaquée

3 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 juin 2019, la requérante a introduit un recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision litigieuse en ce que le PMO se réservait le droit de retenir des montants supplémentaires sur ses pensions à échoir dans les limites fixées en droit belge et, d’autre part, à la réparation du préjudice moral qu’elle aurait prétendument subi.

4 Postérieurement à l’introduction de ce recours, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a, par décision du 9 septembre 2019, rejeté la réclamation du 9 mai 2019, visée au point 18 de l’ordonnance attaquée, en considérant, d’une part, que la demande en annulation était non fondée et, d’autre part, que le dommage, dont la requérante demandait l’indemnisation, découlait d’un comportement antérieur du PMO, lequel avait fait objet de la réclamation du 3 janvier 2019, visée au point 6 de cette ordonnance, dans laquelle la requérante ne s’était pas prévalue d’une responsabilité extracontractuelle de l’Union européenne et n’avait pas formulé de demande indemnitaire. En outre, l’AIPN a conclu à l’absence de toute illégalité dans le chef du PMO.

5 Par ailleurs, par jugement du 10 octobre 2019, le tribunal de première instance de Bruxelles a ordonné l’exécution de la saisie-arrêt du 21 mars 2019, visée au point 11 de ladite ordonnance (ci-après la « seconde saisie-arrêt »), et rejeté l’opposition de la requérante contre cette saisie.

6 Le 25 octobre 2019, l’huissier de justice belge a signifié ce jugement au PMO et lui a demandé de verser la somme de 9 824,62 euros. Étant donné que, sur la base de la décision litigieuse, le PMO avait gardé la somme de 9 777,59 euros, le PMO a payé la différence, qui s’élevait à 47,03 euros, et retenu cette somme sur la pension de la requérante du mois de novembre 2019.

7 Le 13 novembre 2019, l’huissier de justice belge a donné mainlevée de la saisie-arrêt signifiée le 21 mars 2019. Le PMO en a informé la requérante...

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