Opinion of Advocate General Rantos delivered on 4 October 2024.

JurisdictionEuropean Union
Celex Number62023CC0365
ECLIECLI:EU:C:2024:865
Date04 October 2024
CourtCourt of Justice (European Union)

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 4 octobre 2024 (1)

Affaire C365/23 [Arce] (i)

SIA "A"

contre

C,

D,

E

[demande de décision préjudicielle formée par l’Augstākā tiesa (Senāts) (Cour suprême, Lettonie)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Article 1er – Champ d’application – Article 2, sous b) – Notion de “consommateur” – Article 3, paragraphe 1 – Article 4, paragraphe 2 – Article 5 – Article 6, paragraphe 1 – Article 8 bis – Contrat d’adhésion – Contrat conclu entre un professionnel fournissant des services de développement sportif et d’aide à la carrière et un sportif, joueur “espoir”, mineur représenté par ses parents – Clause établissant l’obligation de verser à ce professionnel une rémunération égale à 10 % des revenus perçus par ce sportif au cours des quinze années suivantes – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 17 – Droit de propriété – Article 24 – Droits de l’enfant »






I. Introduction

1. La présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, sous b), de l’article 3, paragraphe 1, de l’article 4, paragraphe 2, de l’article 5, de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 8 bis de la directive 93/13/CEE (2) concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière de l’article 17, paragraphe 1, et de l’article 24 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant A, une société à responsabilité limitée de droit letton établie dans le but d’assurer le développement des sportifs en Lettonie (ci-après la « société A »), aux personnes physiques C, un joueur amateur mineur « espoir », et ses parents, D et E (ci-après les « parents »), au sujet du recouvrement par la société A de la rémunération due par C en contrepartie de la fourniture des services prévue en vertu d’un contrat de services de soutien au développement sportif et d’aide à la carrière, conclu le 14 janvier 2009 entre la société A, d’une part, et C ainsi que ses parents, d’autre part (ci-après le « contrat litigieux »).

3. Dans le cadre de la présente affaire, la Cour sera amenée à examiner l’applicabilité du droit de l’Union en matière de protection des consommateurs, notamment de la directive 93/13, à un contrat, tel que le contrat litigieux, dans le contexte particulier d’un consommateur initialement mineur, représenté par ses parents, devenu au cours du contrat majeur et joueur professionnel. L’arrêt à venir, qui dessinera les contours de l’application de cette directive, aura, de toute évidence, une incidence sur le contenu de ce type de contrats, et ce bien au-delà du seul domaine du sport.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. La directive93/13

4. Aux termes des dixième, treizième et seizième considérants de la directive 93/13 :

« considérant qu’une protection plus efficace du consommateur peut être obtenue par l’adoption de règles uniformes concernant les clauses abusives ; que ces règles doivent s’appliquer à tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur ; que, par conséquent, sont notamment exclus de la présente directive les contrats de travail, les contrats relatifs aux droits successifs, les contrats relatifs au statut familial ainsi que les contrats relatifs à la constitution et aux statuts des sociétés ;

[...]

considérant que les dispositions législatives ou réglementaires des États membres qui fixent, directement ou indirectement, les clauses de contrats avec les consommateurs sont censées ne pas contenir de clauses abusives ; que, par conséquent, il ne s’avère pas nécessaire de soumettre aux dispositions de la présente directive les clauses qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des principes ou des dispositions de conventions internationales dont les États membres ou la Communauté sont partis ; que, à cet égard, l’expression “dispositions législatives ou réglementaires impératives” figurant à l’article 1er paragraphe 2 couvre également les règles qui, selon la loi, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu ;

[...]

considérant que l’appréciation, selon les critères généraux fixés, du caractère abusif des clauses notamment dans les activités professionnelles à caractère public fournissant des services collectifs prenant en compte une solidarité entre usagers, nécessite d’être complétée par un moyen d’évaluation globale des différents intérêts impliqués ; que ceci constitue l’exigence de bonne foi ; que, dans l’appréciation de la bonne foi, il faut prêter une attention particulière à la force des positions respectives de négociation des parties, à la question de savoir si le consommateur a été encouragé par quelque moyen à donner son accord à la clause et si les biens ou services ont été vendus ou fournis sur commande spéciale du consommateur ; que l’exigence de bonne foi peut être satisfaite par le professionnel en traitant de façon loyale et équitable avec l’autre partie dont il doit prendre en compte les intérêts légitimes. »

5. L’article 1er, paragraphe 1, de cette directive énonce :

« La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur. »

6. Conformément à l’article 2, sous b), de ladite directive, la notion de « consommateur » est définie comme « toute personne physique qui [...] agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ». En vertu de l’article 2, sous c), de la même directive, le terme « professionnel » vise « toute personne physique ou morale qui [...] agit dans le cadre de son activité professionnelle, qu’elle soit publique ou privée ».

7. L’article 3 de la directive 93/13 prévoit :

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2. Une clause est toujours considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n’a, de ce fait, pas pu avoir d’influence sur son contenu, notamment dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

Le fait que certains éléments d’une clause ou qu’une clause isolée aient fait l’objet d’une négociation individuelle n’exclut pas l’application du présent article au reste d’un contrat si l’appréciation globale permet de conclure qu’il s’agit malgré tout d’un contrat d’adhésion.

Si le professionnel prétend qu’une clause standardisée a fait l’objet d’une négociation individuelle, la charge de la preuve lui incombe.

[...] »

8. L’article 4 de cette directive dispose :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

9. L’article 5 de ladite directive énonce, notamment, que « [d]ans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible ».

10. L’article 6, paragraphe 1, de la même directive prévoit :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

11. L’article 8 de la directive 93/13 dispose que « [l]es États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par cette directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur ».

12. Selon l’article 8 bis, paragraphe 1, de cette directive :

« Lorsqu’un État membre adopte des dispositions conformément à l’article 8, il informe la Commission de l’adoption desdites dispositions ainsi que de toutes modifications ultérieures, en particulier lorsque ces dispositions :

– étendent l’appréciation de leur caractère abusif aux clauses contractuelles négociées individuellement ou aux clauses relatives à l’adéquation du prix ou de la rémunération, ou

– contiennent des listes de clauses contractuelles réputées abusives. »

2. La directive2005/29/CE

13. L’article 5, paragraphe 3, de la directive 2005/29/CE (3) est libellé de la manière suivante :

« Les pratiques commerciales qui sont susceptibles d’altérer de manière substantielle le comportement économique d’un groupe clairement identifiable de consommateurs parce que ceux-ci sont particulièrement vulnérables à la pratique utilisée ou au produit qu’elle concerne en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité, alors que l’on pourrait raisonnablement attendre du professionnel qu’il prévoie cette conséquence, sont évaluées du point de vue du membre moyen de ce groupe. Cette disposition est sans...

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