Opinion of Advocate General Szpunar delivered on 2 February 2016.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:69
Date02 February 2016
Celex Number62014CC0421
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-421/14
62014CC0421

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 2 février 2016 ( 1 )

Affaire C‑421/14

Banco Primus SA

contre

Jesús Gutiérrez García

[demande de décision préjudicielle formée par le Juzgado de Primera Instancia no 2 de Santander (tribunal de première instance no 2 de Santander, Espagne)]

«Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs — Directive 93/13/CEE — Contrat de prêt hypothécaire — Disposition nationale transitoire prévoyant un délai de forclusion pour introduire un incident d’opposition à l’exécution fondé sur le caractère abusif d’une clause — Principe d’effectivité — Clause d’échéance anticipée — Clause relative au calcul des intérêts ordinaires — Obligations du juge national»

I – Introduction

1.

La Cour est, dans la présente affaire, à nouveau saisie d’une demande préjudicielle concernant l’interprétation de la directive 93/13/CEE ( 2 ) dans le cadre d’un contrat de prêt hypothécaire.

2.

Dans un litige concernant un incident extraordinaire d’opposition à la procédure de saisie d’un immeuble hypothéqué (ci-après la «procédure de saisie hypothécaire») par lequel le débiteur soulève le caractère abusif d’une clause contractuelle, les questions préjudicielles posées à la Cour par le Juzgado de Primera Instancia no 2 de Santander (tribunal de première instance no 2 de Santander) portent sur les critères d’appréciation du caractère abusif de certaines clauses du contrat et sur la portée des obligations du juge national dans le cadre de cette appréciation. La Cour se trouve donc confrontée à une problématique s’inscrivant dans une jurisprudence déjà très fournie, mais dans une configuration inédite, puisque l’incident d’opposition en cause offre à la juridiction de renvoi l’occasion de contrôler d’office d’autres clauses contractuelles qui ne font pas l’objet de l’opposition.

3.

Dans ce contexte, la Cour est appelée, notamment, à déterminer si la protection qu’assurent les articles 6 et 7 de la directive 93/13 implique que l’existence d’un premier contrôle d’office portant sur une ou plusieurs clauses contractuelles limite l’obligation du juge national d’examiner d’office le caractère abusif des autres clauses du contrat à un stade ultérieur de la procédure.

II – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

4.

Le dix-neuvième considérant de la directive 93/13 énonce:

«[C]onsidérant que, pour les besoins de la présente directive, l’appréciation du caractère abusif ne doit pas porter sur des clauses décrivant l’objet principal du contrat ou le rapport qualité/prix de la fourniture ou de la prestation; que l’objet principal du contrat et le rapport qualité/prix peuvent, néanmoins, être pris en compte dans l’appréciation du caractère abusif d’autres clauses; [...]»

5.

L’article 4 de cette directive dispose:

«1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.»

6.

L’article 6, paragraphe 1, de ladite directive prévoit:

«Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives.»

7.

Selon l’article 7, paragraphe 1, de cette même directive:

«Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.»

B – Le droit espagnol

8.

La loi 1/2013, portant mesures destinées à renforcer la protection des débiteurs hypothécaires et relative à la restructuration de la dette et au logement locatif social (Ley 1/2013 de medidas para reforzar la protección a los deudores hipotecarios, reestructuración de deuda y alquiler social), du 14 mai 2013 ( 3 ), a modifié le code de procédure civile (Ley de enjuiciamiento civil, ci‑après le «code de procédure civile»), du 7 janvier 2000 ( 4 ).

9.

La procédure de saisie hypothécaire est régie par les articles 681 à 698 du code de procédure civile. L’article 695 du code de procédure civile, également dans sa version issue de la loi 1/2013, est rédigé comme suit:

«1. Dans les procédures visées au présent chapitre, l’opposition du défendeur à l’exécution n’est accueillie que lorsqu’elle est fondée sur les motifs suivants:

[...]

(4)

le caractère abusif d’une clause contractuelle constituant le fondement de l’exécution ou ayant permis de déterminer le montant exigible.

[...]

4. La décision ordonnant le non-lieu à l’exécution ou l’inapplication d’une clause abusive est susceptible d’un recours en appel.

En dehors de ces hypothèses, les décisions statuant sur l’opposition visée au présent article ne sont susceptibles d’aucun recours et leurs effets sont exclusivement limités à la procédure d’exécution dans le cadre de laquelle elles sont rendues.»

10.

En vertu de l’article 556, paragraphe 1, du code de procédure civile, l’opposition au titre de l’article 695 du code de procédure civile, également dans sa version issue de la loi 1/2013, doit être formée dans un délai de dix jours à compter de la notification de l’acte ordonnant l’exécution. Ce délai est applicable aux saisies hypothécaires, puisqu’une référence audit délai figure à l’article 557 du code de procédure civile, également modifié par la loi 1/2013, relatif à la procédure d’opposition à l’exécution fondée sur des titres non judiciaires ou arbitraux (ce qui comprend notamment les actes authentiques en matière de prêt hypothécaire qui servent de fondement aux saisies hypothécaires).

11.

Selon l’article 693, paragraphe 2, du code de procédure civile, tel qu’il est formulé dans la loi 1/2013, relatif à l’échéance anticipée des dettes à paiement fractionné:

«2. Si le contrat prévoit qu’en cas de défaut de paiement d’au moins trois mensualités ou d’absence d’un nombre de versements tel qu’il implique que le débiteur a manqué à son obligation pour une période de trois mois au moins, et pour autant que cet accord figure dans l’acte constitutif du prêt, le bailleur pourra réclamer l’ensemble de la dette au titre du capital et des intérêts.»

12.

La première disposition transitoire de la loi 1/2013 énonce:

«La présente loi s’appliquera aux procédures judiciaires ou extra judiciaires de saisie hypothécaire en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi, pourvu que l’expulsion n’ait pas été mise à exécution.»

13.

La quatrième disposition transitoire de la loi 1/2013 (ci-après la «quatrième disposition transitoire») concerne les procédures d’exécution ouvertes avant l’entrée en vigueur de la loi 1/2013 et non encore clôturées. Cette disposition est libellée comme suit:

«1.

Les modifications du code de procédure civile introduites par la présente loi s’appliquent aux procédures d’exécution ouvertes à la date de son entrée en vigueur, uniquement vis-à-vis des mesures d’exécution restant à prendre.

2.

En tout état de cause, dans les procédures d’exécution en cours à la date d’entrée en vigueur de la présente loi dans lesquelles le délai d’opposition de dix jours prévu à l’article 556, paragraphe 1, du code de procédure civile a expiré, les parties défenderesses à l’exécution disposent d’un délai de forclusion d’un mois pour former opposition par voie incidente extraordinaire en se fondant sur les nouveaux motifs d’opposition prévus aux articles 557, paragraphe 1, point 7, et 695, paragraphe 1, point 4, du code de procédure civile.

Le délai de forclusion d’un mois est calculé à partir du jour suivant celui de l’entrée en vigueur de la présente loi, et la formation de l’opposition par voie incidente par les parties a pour effet de suspendre la procédure jusqu’à ce qu’il ait été statué sur l’opposition, conformément aux articles 558 et suivants et 695 du code de procédure civile.

La présente disposition transitoire s’applique à toute procédure d’exécution qui n’a pas abouti à la prise de possession de l’immeuble par l’acheteur conformément à l’article 675 du code de procédure civile.

3.

De même, dans les procédures d’exécution en cours dans lesquelles, à l’entrée en vigueur de la présente loi, le délai d’opposition de dix jours prévu à l’article 556, paragraphe 1, du code de procédure civile a déjà commencé à courir, les parties défenderesses à l’exécution disposent du même délai de forclusion d’un mois prévu au paragraphe précédent pour former opposition sur le fondement de l’un quelconque des motifs d’opposition prévus aux articles 557 et 695 du code de procédure civile.

4.

La publication de la présente disposition vaut communication intégrale et valable aux fins de la notification et du calcul des délais prévus aux paragraphes 2 et 3 du présent article, l’adoption d’une décision expresse à cette fin n’étant en aucun cas nécessaire.

[...]»

...

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