Opinion of Advocate General Hogan delivered on 7 May 2019.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:369
Date07 May 2019
Celex Number62018CC0285
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-285/18

Édition provisoire


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD WILLIAM HOGAN

présentées le 7 mai 2019 (1)

Affaire C‑285/18

Kauno miesto savivaldybė,

Kauno miesto savivaldybės administracija

parties jointes :

UAB Irgita,

UAB Kauno švara

[demande de décision préjudicielle présentée par le Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie)]

« Demande de décision préjudicielle – Marchés publics – Directive 2004/18/CE – Champ d’application ratione temporis – Directive 2014/24/UE – “Opérations internes” – Conditions supplémentaires pour une “opération interne” en vertu du droit national »






I. Introduction

1. La présente demande de décision préjudicielle porte en substance sur le point de savoir si un État membre peut imposer à un pouvoir adjudicateur des conditions supplémentaires pour la conclusion d’un « contrat interne » (2) dès lors que ce contrat satisfait aux critères d’une « opération interne » aux termes de la jurisprudence de la Cour et, le cas échéant, de l’article 12 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE (3).

2. La juridiction de renvoi a également demandé des précisions sur l’applicabilité ratione temporis de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (4) et de la directive 2014/24.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

3. Aux termes des considérants 1, 2, 4, 5 et 31 de la directive 2014/24 :

« (1) La passation de marchés publics par les autorités des États membres ou en leur nom doit être conforme aux principes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment la libre circulation des marchandises, la liberté d’établissement et la libre prestation de services, ainsi qu’aux principes qui en découlent comme l’égalité de traitement, la non-discrimination, la reconnaissance mutuelle, la proportionnalité et la transparence. Toutefois, en ce qui concerne les marchés publics dépassant un certain montant, des dispositions devraient être élaborées pour coordonner les procédures nationales de passation de marchés afin de garantir que ces principes soient respectés en pratique et que la passation des marchés publics soit ouverte à la concurrence.

(2) Les marchés publics jouent un rôle essentiel dans la stratégie Europe 2020, exposée dans la communication de la Commission du 3 mars 2010 intitulée « Europe 2020, une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive » […] dans la mesure où ils constituent l’un des instruments fondés sur le marché à utiliser pour parvenir à une croissance intelligente, durable et inclusive, tout en garantissant l’utilisation optimale des fonds publics. […] Il est également nécessaire d’éclaircir certains concepts et notions fondamentaux afin de garantir la sécurité juridique et de prendre en compte certains aspects de la jurisprudence bien établie de la Cour de justice de l’Union européenne en la matière.

[…]

(4) Les formes de plus en plus diverses que prend l’action publique ont rendu nécessaire de définir plus clairement la notion même de marché public. Cette clarification ne devrait toutefois pas élargir le champ d’application de la présente directive par rapport à celui de la directive 2004/18/CE. Les règles de l’Union relatives à la passation des marchés publics ne sont pas destinées à couvrir toutes les formes de dépenses de fonds publics, mais uniquement celles qui visent l’acquisition de travaux, de fournitures ou de services à titre onéreux au moyen d’un marché public. […]

(5) Il convient de rappeler que rien dans la présente directive ne fait obligation aux États membres de confier à des tiers ou d’externaliser la fourniture de services qu’ils souhaitent fournir eux-mêmes ou organiser autrement que par la passation d’un marché public au sens de la présente directive. […]

(31) Il existe une importante insécurité juridique quant à la question de savoir dans quelle mesure les règles sur la passation des marchés publics devraient s’appliquer aux marchés conclus entre entités appartenant au secteur public. La jurisprudence applicable de la Cour de justice de l’Union européenne fait l’objet d’interprétations divergentes entre États membres et même entre pouvoirs adjudicateurs. Il est dès lors nécessaire de préciser dans quels cas les marchés conclus au sein du secteur public ne sont pas soumis à l’application des règles relatives à la passation des marchés publics.

Ces précisions devraient s’appuyer sur les principes énoncés dans la jurisprudence pertinente de la Cour de justice de l’Union européenne. La seule circonstance que les deux parties à un accord sont elles-mêmes des pouvoirs publics n’exclut pas en soi l’application des règles relatives à la passation des marchés publics. L’application de ces règles ne devrait toutefois pas interférer avec la liberté des pouvoirs publics d’exercer les missions de service public qui leur sont confiées en utilisant leurs propres ressources, ce qui inclut la possibilité de coopérer avec d’autres pouvoirs publics.

Il convient de veiller à ce qu’aucune coopération public-public ainsi exclue n’entraîne de distorsion de concurrence à l’égard des opérateurs économiques privés dans la mesure où cela place un prestataire de services privé dans une situation privilégiée par rapport à ses concurrents. »

4. L’article 1er de la directive 2014/24, intitulé « Objet et champ d’application », énonce en son paragraphe 4 :

« La présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres de définir, conformément au droit de l’Union, ce qu’ils entendent par services d’intérêt économique général, la manière dont ces services devraient être organisés et financés conformément aux règles relatives aux aides d’État et les obligations spécifiques auxquelles ils devraient être soumis. De même, la présente directive n’a pas d’incidence sur le droit qu’ont les pouvoirs publics de décider si, comment et dans quelle mesure ils souhaitent assumer eux-mêmes certaines fonctions publiques conformément à l’article 14 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et au protocole nº 26. »

5. L’article 12 de la directive 2014/24, intitulé « Contrats publics conclus entre entités dans le secteur public », dispose en son paragraphe 1 ce qui suit :

« Un marché public attribué par un pouvoir adjudicateur à une personne morale régie par le droit privé ou le droit public ne relève pas du champ d’application de la présente directive lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

(a) le pouvoir adjudicateur exerce sur la personne morale concernée un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services ;

(b) plus de 80 % des activités de cette personne morale contrôlée sont exercées dans le cadre de l’exécution des tâches qui lui sont confiées par le pouvoir adjudicateur qui la contrôle ou par d’autres personnes morales qu’il contrôle ; et

(c) la personne morale contrôlée ne comporte pas de participation directe de capitaux privés, à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par les dispositions législatives nationales, conformément aux traités, qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée.

Un pouvoir adjudicateur est réputé exercer sur une personne morale un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, au sens du premier alinéa, point a), s’il exerce une influence décisive à la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de la personne morale contrôlée. Ce contrôle peut également être exercé par une autre personne morale, qui est elle-même contrôlée de la même manière par le pouvoir adjudicateur.

6. Aux termes de l’article 91, paragraphe 1, de la directive 2002/58 :

« La directive 2004/18/CE est abrogée avec effet au 18 avril 2016 ».

B. Le droit lituanien

1. Le Lietuvos Respublikos viešųjų pirkimų įstatymas (loi lituanienne sur les marchés publics), du 12 août 1996, n° I-1491

7. L’article 3 de la loi lituanienne sur les marchés publics du 12 août 1996, n° I-1491 (ci-après la « loi sur les marchés publics ») prévoit ce qui suit :

« 1. Lors des procédures de passation de marchés et de l’attribution des marchés, le pouvoir adjudicateur assure le respect des principes d’égalité de traitement, de non-discrimination, de reconnaissance mutuelle, de proportionnalité et de transparence.

[…] »

8. L’article 10, paragraphe 5, de la loi sur les marchés publics (telle qu’applicable au 1er janvier 2016) dispose :

« Les dispositions de la présente loi ne s’appliquent pas lorsque le pouvoir adjudicateur conclut un contrat avec une entité juridiquement distincte sur laquelle il exerce un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services ou organes et qu’il détient exclusivement (ou à l’égard de laquelle il exerce les droits et obligations de l’État ou d’une collectivité territoriale en tant que détenteur exclusif) et que l’entité contrôlée a réalisé au moins 80 % de son chiffre d’affaires de l’exercice précédent (ou de la période écoulée depuis sa création si elle exerce son activité depuis moins d’un exercice) au moyen d’activités destinées à satisfaire les besoins du pouvoir adjudicateur ou à lui permettre d’exercer ses fonctions. Une passation de marché ne peut être lancée selon les modalités prévues au présent paragraphe qu’après autorisation de l’autorité des marchés publics. […] ».

9. L’article 10 de la loi sur les marchés publics (telle qu’applicable au 1er juillet 2017) prévoit notamment ce qui suit :

« 1. Les dispositions de la présente loi ne s’appliquent pas aux opérations internes que le pouvoir adjudicateur réalise avec un autre pouvoir adjudicateur, lorsqu’il est satisfait à toutes les conditions suivantes :

(1) Le pouvoir adjudicateur...

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