Edouard Bouma and Bernard M. J. B. Beusmans v Council of the European Union and Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
Date18 September 2003
CourtCourt of Justice (European Union)
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
MME C. STIX-HACKL
présentées le 18 septembre 2003(1)



Affaires C-162/01 P et C-163/01 P

Edouard Bouma (C-162/01)
Bernhard Beusmans
contre
1. Conseil de l'Union européenne
et
2. Commission des Communautés européennes
et
1. Conseil de l'Union européenne
et
2. Commission des Communautés européennes




Edouard Bouma (C-162/01)
Bernhard Beusmans
contre
1. Conseil de l'Union européenne
et
2. Commission des Communautés européennes
et
1. Conseil de l'Union européenne
et
2. Commission des Communautés européennes


«Pourvoi – Recours en indemnité – Responsabilité non contractuelle – Conditions – Quotas laitiers – Règlement (CEE) n° 857/84 – Quantité de référence – Producteurs ayant souscrit à un engagement de non-commercialisation – De la confiance légitime – Illégalité – Lien de causalité»






I – Introduction 1. Ces deux pourvois joints aux fins de l'arrêt visent les arrêts que le Tribunal de première instance des Communautés européennes (quatrième chambre) a rendus le 31 janvier 2001 dans les affaires Bouma/Conseil et Commission (2) (ci‑après l'«arrêt Bouma») et Beusmans/Conseil et Commission (3) (ci-après l'«arrêt Beusmans»), rejetant les recours en indemnité formés par des producteurs laitiers néerlandais, MM. Edouard Bouma et Bernhard Beusmans, contre le Conseil et la Commission. 2. Ces recours s'inscrivent dans un très vaste ensemble de litiges concernant en substance les droits et obligations, dans le régime des quotas laitiers, des producteurs dits «SLOM» (4) qui sont des producteurs qui s'étaient engagés au titre du règlement (CEE) n° 1078/77 (5) à ne pas commercialiser de lait ni de produits laitiers pendant cinq ans (ci-après l'«engagement de non-commercialisation») ou à reconvertir le cheptel laitier en cheptel à viande (ci-après l'«engagement de reconversion»). 3. Cette problématique est née du fait que le régime des quotas laitiers mis en place à partir du 1er avril 1984 – limitant la production laitière en fixant des quantités de référence assorties de prélèvements en cas de dépassement – n'avait pas pris en compte le statut des producteurs SLOM. En effet, aux termes du règlement (CEE) n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, dans sa version initiale (6) , régissant le calcul de chacune des quantités de référence, les quantités de référence devaient être fixées en fonction des livraisons de lait d'une année de référence recoupant en tout ou en partie, ainsi que l'on s'en est aperçu, les périodes des engagements de non-commercialisation pris par les producteurs SLOM. Ces producteurs laitiers n'ont dès lors pas reçu de quantité de référence – faute d'avoir produit du lait au cours de l'année de référence – et ne pouvaient donc pas produire de lait exempté de prélèvement. 4. Les inconvénients que les producteurs SLOM en ont ressentis et qui se sont en partie poursuivis à la suite des «mesures correctrices» ultérieures du législateur communautaire et «enrichis» sous plusieurs aspects juridiques occupent à présent depuis plus d'une décennie les juridictions communautaires à différents titres et ont également trouvé un écho dans un ensemble d'actes de droit dérivé. Ces arrêts et ces mesures de droit dérivé qui ont pour objet tantôt – et il convient précisément de garder cette distinction à l'esprit dans les présentes affaires – les (la validité des) régimes d'attribution des quantités de référence en tant que tels, tantôt l'indemnisation des producteurs SLOM pour le préjudice né de ces régimes forment le contexte juridique, que nous décrirons plus avant ci-après, dans lequel les présentes affaires s'inscrivent. 5. Les présents pourvois demandent en particulier si c'est à juste titre, au vu de la jurisprudence pertinente, que le Tribunal de première instance a considéré dans les arrêts attaqués que la responsabilité de la Communauté ne peut être engagée que si les producteurs ont clairement manifesté leur intention de reprendre la production laitière à l'issue de leur engagement de non-commercialisation. II – Cadre juridique A – Sur la participation des producteurs SLOM au régime des quotas 6. La surproduction laitière de la Communauté a incité le Conseil à arrêter en 1977 le règlement n° 1078/77 (7) . Ce règlement permettait aux producteurs laitiers de bénéficier d'une prime en s'engageant pendant une période de cinq années à ne pas commercialiser de lait ni de produits laitiers ou à se reconvertir. 7. La surproduction ayant persisté en 1983, alors que de nombreux producteurs avaient pris ces engagements, le Conseil a arrêté le 31 mars 1984 les règlements (CEE) n° 856/84, modifiant le règlement (CEE) n° 804/68 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers (8) et n° 857/84 (9) . Ces règlements ont instauré à partir du 1er avril 1984 un régime de prélèvements supplémentaires sur le lait (ci-après le «régime de prélèvement») qui ne permettait à chaque producteur laitier de ne produire que le quota laitier qui lui avait été attribué (ci-après la «quantité de référence»); autrement il était redevable d'un prélèvement supplémentaire. La quantité de référence correspondait à la quantité de lait produite au cours d'une année de référence – l'année 1983 pour les Pays-Bas. 8. Tous les producteurs laitiers qui n'avaient pas produit de lait au cours de cette année en raison de l'engagement de non-commercialisation pris au titre du règlement n° 1078/77 ne pouvaient en conséquence pas obtenir de quantité de référence ni dès lors commercialiser des quantités de lait exemptées de prélèvement supplémentaire. 9. Dans les arrêts qu'elle a rendus le 28 avril 1988 dans les affaires Mulder (10) (ci-après l'«arrêt Mulder I») et Von Deetzen (11) , la Cour de justice a déclaré non valide le règlement n° 857/84 dans la version complétée par le règlement (CEE) n° 1371/84 (12) , pour violation du principe de la confiance légitime en ce que «dans la mesure où il ne prévoit pas l'attribution d'une quantité de référence aux producteurs n'ayant pas, en exécution d'un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77 [...], livré de lait pendant l'année de référence retenue par l'État membre concerné». 10. Le Conseil a alors adopté le règlement (CEE) n° 764/89, du 20 mars 1989, modifiant le règlement n° 857/84 (13) . Ce règlement a inséré l'article 3 bis dans le règlement n° 857/84. Cette disposition permet, à certaines conditions, d'attribuer aux producteurs laitiers qui n'ont pas livré de lait au cours de l'année de référence en raison d'un engagement de non-commercialisation et qui étaient de ce fait exclus du régime des quotas, une quantité spécifique de référence (article 3 bis, paragraphe 1) correspondant à 60 % de la quantité de lait (article 3 bis, paragraphe 2) que le producteurs avait livrée ou vendue au cours des douze mois qui ont précédé l'engagement de non-commercialisation ou de reconversion. 11. Aux termes de l'article 3 bis, paragraphe 1, ce régime ne vise toutefois que les producteurs «dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution de l'engagement pris au titre du règlement (CEE) n° 1078/77, expire après le 31 décembre 1983, ou après le 30 septembre 1983 dans les États membres où la collecte de lait des mois d'avril à septembre est au moins le double de celle des mois d'octobre à mars de l'année suivante». 12. Ce producteur reçoit à sa demande une quantité spécifique de référence provisoire s'il établit «à l'appui de sa demande, à la satisfaction de l'autorité compétente, qu'il est en mesure de produire sur son exploitation jusqu'à hauteur de la quantité de référence demandée» [article 3 bis, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 857/84 dans la version du règlement n° 764/89]. 13. Aux termes de l'article 3 bis, paragraphe 3, la quantité spécifique de référence est définitivement attribuée au producteur si, dans un délai de deux ans à compter du 29 mars 1989, il peut prouver, à la satisfaction de l'autorité compétente, qu'il a effectivement repris les ventes directes et/ou les livraisons et que ces ventes directes et/ou ces livraisons ont atteint au cours des douze derniers mois un niveau égal ou supérieur à 80 % de la quantité de référence provisoire. Dans le cas contraire, la quantité de référence provisoire retourne en totalité à la réserve communautaire (14) . 14. Dans l'arrêt qu'elle a rendu le 11 décembre 1990 dans l'affaire Spagl (15) , la Cour a déclaré non valide l'article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement n° 857/84 dans la version issue du règlement n° 764/89 pour violation du principe de la confiance légitime «dans la mesure où il exclut de l'attribution d'une quantité de référence spécifique au titre de cette disposition les producteurs dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution d'un engagement pris au titre du règlement (CEE) n° 1078/77 [...], expire avant le 31 décembre 1983 ou, le cas échéant, avant le 30 septembre 1983». Dans cet arrêt ainsi que dans l'arrêt du même jour rendu dans l'affaire Pastätter (16) , la Cour a de surcroît déclaré non valide le paragraphe 2 de cet article en ce qu'il limite la quantité spécifique de référence à 60 % de la production de référence. 15. Le Conseil a alors adopté le règlement (CEE) n° 1639/91 du 13 juin 1991, modifiant le règlement n° 857/84 (17) , par lequel il a supprimé les conditions déclarées non valides afin que les producteurs concernés puissent se voir attribuer une quantité spécifique de référence. 16. Enfin, dans l'arrêt qu'elle a rendu dans l'affaire Wehrs (18) , la Cour a déclaré non valide la règle dite «anticumul» figurant à l'article 3 bis, paragraphe 1, deuxième tiret, du...

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