Opinion of Advocate General Hogan delivered on 21 March 2019.

JurisdictionEuropean Union
Celex Number62018CC0034
ECLIECLI:EU:C:2019:245
Date21 March 2019
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-34/18
62018CC0034

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 21 mars 2019 ( 1 )

Affaire C‑34/18

Ottília Lovasné Tóth

contre

ERSTE Bank Hungary Zrt.

[demande de décision préjudicielle formée par la Fővárosi Ítélőtábla (cour d’appel régionale de Budapest-Capitale, Hongrie)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Clauses abusives – Directive 93/13/CEE – Champ d’application – Clause reflétant le droit – Annexe – Valeur juridique – Article 3, paragraphe 1 – Appréciation du caractère abusif d’une clause – Impression produite par une clause sur le consommateur moyen – Compréhensibilité des clauses – Existence de jugements nationaux contradictoires »

1.

La présente affaire concerne une procédure opposant ERSTE Bank Hungary Zrt. (ci-après la « banque ») et Mme Ottília Lovasné Tóth au sujet du caractère abusif d’une clause spécifique contenue dans un contrat de prêt relatif à un logement. La clause litigieuse figure dans une convention hypothécaire et prévoit, d’une part, que chaque partie s’engage à accepter la force probante d’un acte notarié rédigé conformément aux comptes du débiteur et aux livres et documents comptables de la banque, et, d’autre part, que chaque partie accepte qu’un tel acte fasse foi aux fins d’une exécution forcée en cas de défaillance.

2.

En l’occurrence, la Kúria (Cour suprême, Hongrie) a déjà rendu plusieurs arrêts concernant une clause similaire à celle en cause au principal. Dans ces arrêts, elle a conclu qu’une telle clause ne faisait que renvoyer à une procédure notariale d’exécution nationale existante et que, par conséquent, d’un point de vue juridique, elle n’affectait ni le droit de l’une des parties d’intenter une action en justice ni la charge de la preuve.

3.

Dans ce contexte, la juridiction de renvoi se demande notamment si cette clause peut néanmoins être déclarée abusive au sens de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29, ci-après la « directive de 1993 ») en raison essentiellement de l’impression erronée qu’une telle clause peut produire sur le consommateur moyen.

4.

Avant d’examiner cette question, il est tout d’abord nécessaire de rappeler les dispositions pertinentes de la directive de 1993.

I. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. La directive de 1993

5.

Les seizième, dix-septième et vingtième considérants de la directive de 1993 indiquent :

« [16]

considérant que l’appréciation, selon les critères généraux fixés, du caractère abusif des clauses notamment dans les activités professionnelles à caractère public fournissant des services collectifs prenant en compte une solidarité entre usagers, nécessite d’être complétée par un moyen d’évaluation globale des différents intérêts impliqués ; que cela constitue l’exigence de bonne foi ; que, dans l’appréciation de la bonne foi, il faut prêter une attention particulière à la force des positions respectives de négociation des parties, à la question de savoir si le consommateur a été encouragé par quelque moyen à donner son accord à la clause et si les biens ou services ont été vendus ou fournis sur commande spéciale du consommateur ; que l’exigence de bonne foi peut être satisfaite par le professionnel en traitant de façon loyale et équitable avec l’autre partie dont il doit prendre en compte les intérêts légitimes ;

[17]

considérant que, pour les besoins de la présente directive, la liste des clauses figurant en annexe ne saurait avoir qu’un caractère indicatif et que, en conséquence du caractère minimal, elle peut faire l’objet d’ajouts ou de formulations plus limitatives notamment en ce qui concerne la portée de ces clauses, par les États membres dans le cadre de leur législation ;

[…]

[20]

considérant que les contrats doivent être rédigés en termes clairs et compréhensibles ; que le consommateur doit avoir effectivement l’occasion de prendre connaissance de toutes les clauses, et que, en cas de doute, doit prévaloir l’interprétation la plus favorable au consommateur ».

6.

L’article 1er, paragraphe 2, de la directive de 1993 dispose :

« Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des dispositions ou principes des conventions internationales, dont les États membres ou la Communauté sont partis, notamment dans le domaine des transports, ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

7.

Aux termes de l’article 3 de la directive de 1993 :

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

[…]

3. L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives. »

8.

L’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive de 1993 est libellé comme suit :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

9.

L’article 5 de la directive de 1993 dispose :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. […] »

10.

Conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive de 1993 :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

11.

Selon l’article 7, paragraphes 1 et 2, de la directive de 1993 :

« 1. Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.

2. Les moyens visés au paragraphe 1 comprennent des dispositions permettant à des personnes ou à des organisations ayant, selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger les consommateurs de saisir, selon le droit national, les tribunaux ou les organes administratifs compétents afin qu’ils déterminent si des clauses contractuelles, rédigées en vue d’une utilisation généralisée, ont un caractère abusif et appliquent des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’utilisation de telles clauses. »

12.

Aux termes de l’article 8 de la directive de 1993 :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

13.

Le point 1 de l’annexe de la directive de 1993 précise :

« Clauses ayant pour objet ou pour effet :

[…]

m)

d’accorder au professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou le service fourni est conforme aux stipulations du contrat ou de lui conférer le droit exclusif d’interpréter une quelconque clause du contrat ;

[…]

q)

de supprimer ou d’entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d’arbitrage non couverte par des dispositions légales, en limitant indûment les moyens de preuves à la disposition du consommateur ou en imposant à celui‑ci une charge de preuve qui, en vertu du droit applicable, devrait revenir normalement à une autre partie au contrat. »

2. La directive 2005/29/CE

14.

L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales ») (JO 2005, L 149, p. 22), intitulé « Actions trompeuses », dispose :

« 1. Une pratique commerciale est réputée trompeuse si elle contient des informations fausses et qu’elle est donc mensongère ou que, d’une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, elle induit ou est susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen, même si les informations présentées sont factuellement correctes, en ce qui concerne un ou plusieurs des aspects ci-après et que, dans un cas comme dans l’autre, elle l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision...

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