Quelle AG v Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:682
Date15 November 2007
Celex Number62006CC0404
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-404/06

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme VERICA Trstenjak

présentées le 15 novembre 2007 (1)

Affaire C‑404/06

Quelle AG

contre

Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Allemagne)]

«Protection des consommateurs – Directive 1999/44/CE – Vente et garanties des biens de consommation – Droit du vendeur, en cas de remplacement d’un bien défectueux, d’exiger du consommateur le paiement d’une indemnité pour l’utilisation de ce bien – Gratuité du remplacement»





I – Introduction

1. Dans la présente affaire, la juridiction de renvoi demande si les dispositions du code civil allemand qui permettent au vendeur, en cas de remplacement d’un bien défectueux, d’exiger de l’acheteur le paiement d’une indemnité financière pour l’utilisation de ce bien sont conformes à la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation (2). La Cour interprétera ainsi pour la première fois dans le cadre d’une demande de décision préjudicielle la directive 1999/44.

2. Cette question s’est posée devant le Bundesgerichtshof, saisi d’un litige entre la société Quelle AG (ci-après «Quelle») et une association allemande de consommateurs, le Bundesverband der Verbraucherzentralen und Verbraucherverbände (ci-après le «Bundesverband»), dans lequel le Bundesverband exige que Quelle s’abstienne de réclamer le paiement d’une indemnité pour l’utilisation de biens défectueux et qu’elle restitue l’indemnité payée dans la présente affaire.

II – Cadre juridique

A – Le droit communautaire

1. Le droit primaire

3. L’article 3, paragraphe 1, sous t), CE dispose que «l’action de la Communauté comporte, dans les conditions et selon les rythmes prévus par le présent traité […] une contribution au renforcement de la protection des consommateurs».

4. Aux termes de l’article 153, paragraphe 1, CE:

«Afin de promouvoir les intérêts des consommateurs et d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, la Communauté contribue à la protection de la santé, de la sécurité et des intérêts économiques des consommateurs ainsi qu’à la promotion de leur droit à l’information, à l’éducation et à s’organiser afin de préserver leurs intérêts.»

5. Aux termes de l’article 95 CE:

«1. […] Le Conseil […] arrête les mesures relatives au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres qui ont pour objet l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur.

[…]

3. La Commission, dans ses propositions prévues au paragraphe 1 en matière de […] protection des consommateurs, prend pour base un niveau de protection élevé en tenant compte notamment de toute nouvelle évolution basée sur des faits scientifiques. Dans le cadre de leurs compétences respectives, le Parlement européen et le Conseil s’efforcent également d’atteindre cet objectif.

[…]»

2. La directive 1999/44

6. Le deuxième considérant de la directive 1999/44 souligne que «le marché intérieur comporte un espace sans frontières dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée»; et que la libre circulation des marchandises implique également «que les consommateurs résidant dans un État membre puissent s’approvisionner librement sur le territoire d’un autre État membre sur la base d’un solde minimal commun de règles équitables régissant la vente de biens de consommation».

7. D’après le quatrième considérant de cette directive, «le consommateur qui cherche à bénéficier du grand marché, en se procurant des biens dans un État membre autre que celui de sa résidence, joue un rôle fondamental dans l’accomplissement du marché intérieur».

8. Le cinquième considérant indique que «la création d’un socle minimal commun de règles de droit de la consommation, valables indépendamment du lieu de vente des biens dans la Communauté, renforcera la confiance des consommateurs et permettra à ceux-ci de profiter au mieux du marché intérieur».

9. Le quinzième considérant permet aux «États membres [de prévoir] que tout remboursement au consommateur peut être réduit pour tenir compte de l’usage que le consommateur a eu du bien depuis que celui-ci lui a été livré», et que «les modalités de résolution du contrat peuvent être fixées par le droit national».

10. D’après le vingt-quatrième considérant, «il importe que les États membres aient la faculté d’adopter ou de maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes en vue d’assurer un niveau de protection encore plus élevé du consommateur».

11. L’article 3 de la directive 1999/44 régit les droits du consommateur:

«1. Le vendeur répond vis-à-vis du consommateur de tout défaut de conformité qui existe lors de la délivrance du bien.

2. En cas de défaut de conformité, le consommateur a droit soit à la mise du bien dans un état conforme, sans frais, par réparation ou remplacement, conformément au paragraphe 3, soit à une réduction adéquate du prix ou à la résolution du contrat en ce qui concerne ce bien, conformément aux paragraphes 5 et 6.

3. Dans un premier temps, le consommateur a le droit d’exiger du vendeur la réparation du bien ou son remplacement, dans les deux cas sans frais, à moins que cela ne soit impossible ou disproportionné.

Un mode de dédommagement est considéré comme disproportionné s’il impose au vendeur des coûts qui, par rapport à l’autre mode, sont déraisonnables compte tenu:

– de la valeur qu’aurait le bien s’il n’y avait pas défaut de conformité,

– de l’importance du défaut de conformité

– et de la question de savoir si l’autre mode de dédommagement peut être mis en œuvre sans inconvénient majeur pour le consommateur.

Toute réparation ou tout remplacement est effectué dans un délai raisonnable et sans inconvénient majeur pour le consommateur, compte tenu de la nature du bien et de l’usage recherché par le consommateur.

4. L’expression ‘sans frais’ figurant aux paragraphes 2 et 3 désigne les frais nécessaires exposés pour la mise des biens dans un état conforme, notamment les frais d’envoi du bien et les frais associés au travail et au matériel.

5. Le consommateur peut exiger une réduction adéquate du prix ou la résolution du contrat:

– s’il n’a droit ni à la réparation ni au remplacement du bien

ou

– si le vendeur n’a pas mis en œuvre le mode de dédommagement dans un délai raisonnable

ou

– si le vendeur n’a pas mis en œuvre le mode de dédommagement sans inconvénient majeur pour le consommateur.

[…]»

12. L’article 5, paragraphe 1, de la directive 1999/44 précise que la responsabilité du vendeur «prévue à l’article 3 est engagée lorsque le défaut de conformité apparaît dans un délai de deux ans à compter de la délivrance du bien».

13. L’article 8, paragraphe 2, de la directive 1999/44 autorise «[l]es États membres [à] adopter ou [à] maintenir en vigueur, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes compatibles avec le traité pour assurer un niveau de protection plus élevé du consommateur».

B – Le droit allemand

14. La directive 1999/44 a été transposée en droit allemand dans le cadre de la réforme du code civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch, ci-après le «BGB») (3).

15. L’article 439 du BGB, intitulé «Exécution a posteriori», dispose:

«1) L’acheteur peut à son gré demander, à titre d’exécution a posteriori, soit la réparation, soit la livraison d’un bien exempt de défaut.

2) Le vendeur doit supporter les dépenses nécessaires à l’exécution a posteriori, notamment les frais de transport, d’acheminement, de main‑d’œuvre et de matériaux.

3) Sans préjudice de l’article 275, paragraphes 2 et 3, le vendeur ne peut refuser le type d’exécution a posteriori choisi par l’acheteur que s’il entraîne obligatoirement des coûts disproportionnés. À cet égard sont à prendre en considération notamment la valeur qu’aurait le bien s’il n’y avait pas de défaut de conformité, l’importance du défaut et la question de savoir si on pourrait recourir à l’autre mode d’exécution a posteriori sans grand inconvénient pour l’acheteur. Le droit de l’acheteur se limite dans ce cas à l’autre mode d’exécution a posteriori; il n’est pas porté atteinte au droit du vendeur de refuser également celui-ci dans les conditions de la première phrase.

4) Si, aux fins d’exécution a posteriori, le vendeur livre un article conforme, il peut exiger de l’acheteur la restitution de l’article défectueux conformément aux articles 346 à 348.»

16. L’article 346 du BGB, qui régit les effets de la résolution du contrat, se lit comme suit:

«1) Si une partie au contrat se prévaut d’une clause résolutoire contractuelle ou légale, les prestations reçues doivent, en cas de résolution, être reversées et les fruits effectivement perçus, restitués.

2) En lieu et place du reversement ou de la restitution, le débiteur est tenu de verser une indemnité dans la mesure où:

1. le reversement ou la restitution sont exclus en raison de la nature de l’acquisition;

2. il a dégradé, cédé, aliéné, transformé ou restructuré le bien reçu,

3. le bien reçu s’est détérioré ou a disparu; l’usure correspondant à une utilisation normale n’entre toutefois pas en ligne de compte.

Si le contrat stipule une contre‑prestation, celle-ci doit être prise en compte dans le calcul de l’indemnité; si une indemnité est due pour l’avantage tiré d’un prêt, la preuve peut être apportée que la valeur de l’avantage était inférieure.

3) L’obligation d’indemnité est exclue:

1. si le défaut justifiant la résolution n’est apparu qu’au cours de la transformation ou de la restructuration du bien,

2. dans la mesure où le créancier est responsable de la détérioration ou de la disparition, ou si le dommage était aussi intervenu chez lui,

3. si, en cas de condition résolutoire légale, la détérioration ou la disparition est...

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