W and V v X.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:920
Docket NumberC-499/15
Celex Number62015CC0499
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date01 December 2016
62015CC0499

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 1er décembre 2016 ( 1 )

Affaire C‑499/15

W,

V

contre

X

[demande de décision préjudicielle formée par le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius, Lituanie)]

«Espace de liberté, de sécurité et de justice — Coopération judiciaire en matière civile — Règlement (CE) no 2201/2003 — Obligations alimentaires — Règlement (CE) no 4/2009 — Résidence habituelle de l’enfant — Intérêt supérieur de l’enfant — Compétence des juridictions de l’État membre de résidence d’un parent pour examiner des questions relatives au droit de garde, au droit de visite, ainsi qu’aux obligations alimentaires concernant un enfant mineur — Modification d’une décision devenue définitive»

1.

L’affaire qui est présentement soumise à la Cour trouve son origine dans un litige concernant le droit de garde, le droit de visite ainsi que la fixation des obligations alimentaires concernant un enfant mineur.

2.

Le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius, Lituanie) cherche, de la part de la Cour, des éclaircissements concernant l’application concrète du règlement (CE) no 2201/2003 ( 2 ) et du règlement (CE) no 4/2009 ( 3 ), afin de déterminer quelle est la juridiction compétente pour statuer sur ces questions. En effet, dans l’affaire au principal, les juridictions lituaniennes avaient rendu une décision, devenue définitive, sur le droit de garde, le droit de visite ainsi que les obligations alimentaires concernant un enfant mineur. Le père de cet enfant a présenté, par la suite, une nouvelle demande devant les juridictions lituaniennes tendant à modifier cette décision. Cependant, l’enfant concerné ayant sa résidence habituelle sur le territoire néerlandais, auprès de sa mère, la question se pose de savoir si la compétence des juridictions lituaniennes pour statuer sur cette demande peut encore être fondée.

3.

Dans les présentes conclusions, nous expliquerons les raisons pour lesquelles nous estimons que l’article 8 du règlement no 2201/2003 et l’article 3, sous d), du règlement no 4/2009 doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’une juridiction d’un État membre a rendu une décision, devenue définitive, relative au droit de garde, au droit de visite ainsi qu’aux obligations alimentaires concernant un enfant mineur, cette juridiction n’est plus compétente pour statuer sur une demande de modification de cette décision, dans la mesure où cet enfant n’a pas sa résidence habituelle sur le territoire de cet État membre. Nous préciserons pourquoi, selon nous, la juridiction compétente pour statuer sur une telle demande est, conformément à ces dispositions ainsi qu’au principe visant à préserver l’intérêt supérieur de l’enfant, la juridiction de l’État membre sur le territoire duquel l’enfant a sa résidence habituelle.

I –Le cadre juridique

A –Le règlement no 2201/2003

4.

Le règlement no 2201/2003 a pour objet d’uniformiser, au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, les règles de compétence judiciaire internationale en matière de divorce, de séparation de corps ou d’annulation de mariage ainsi qu’en matière de responsabilité parentale.

5.

Le considérant 12 de ce règlement indique ce qui suit :

« Les règles de compétence établies par le présent règlement en matière de responsabilité parentale sont conçues en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant et en particulier du critère de proximité. Ce sont donc en premier lieu les juridictions de l’État membre dans lequel l’enfant a sa résidence habituelle qui devraient être compétentes, sauf dans certains cas de changement de résidence de l’enfant ou suite à un accord conclu entre les titulaires de la responsabilité parentale. »

6.

L’article 3 dudit règlement établit la compétence générale en matière de divorce, de séparation de corps et d’annulation de mariage. Cet article est rédigé de la manière suivante :

« 1. Sont compétentes pour statuer sur les questions relatives au divorce, à la séparation de corps et à l’annulation du mariage des époux, les juridictions de l’État membre :

a)

sur le territoire duquel se trouve :

la résidence habituelle des époux, ou

la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l’un d’eux y réside encore, ou

la résidence habituelle du défendeur, ou

en cas de demande conjointe, la résidence habituelle de l’un ou l’autre époux, ou

la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins une année immédiatement avant l’introduction de la demande, ou

la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins six mois immédiatement avant l’introduction de la demande et s’il est soit ressortissant de l’État membre en question, soit, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, s’il y a son “domicile” ;

b)

de la nationalité des deux époux ou, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, du “domicile” commun.

[...] »

7.

Concernant la compétence des juridictions en matière de responsabilité parentale, l’article 8 du règlement no 2201/2003 établit la règle de compétence générale suivante :

« 1. Les juridictions d’un État membre sont compétentes en matière de responsabilité parentale à l’égard d’un enfant qui réside habituellement dans cet État membre au moment où la juridiction est saisie.

2. Le paragraphe 1 s’applique sous réserve des dispositions des articles 9, 10 et 12. »

8.

L’article 12 du règlement no 2201/2003 est rédigé de la manière suivante :

« 1. Les juridictions de l’État membre où la compétence est exercée en vertu de l’article 3 pour statuer sur une demande en divorce, en séparation de corps ou en annulation du mariage des époux sont compétentes pour toute question relative à la responsabilité parentale liée à cette demande lorsque

a)

au moins l’un des deux époux exerce la responsabilité parentale à l’égard de l’enfant

et

b)

la compétence de ces juridictions a été acceptée expressément ou de toute autre manière non équivoque par les époux et par les titulaires de la responsabilité parentale, à la date à laquelle la juridiction est saisie, et qu’elle est dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

2. La compétence exercée conformément au paragraphe 1 prend fin dès que

a)

soit la décision faisant droit à la demande en divorce, en séparation de corps ou en annulation du mariage ou la rejetant est passée en force de chose jugée ;

b)

soit, dans le cas où une procédure relative à la responsabilité parentale est encore en instance à la date visée au point a), dès qu’une décision relative à la responsabilité parentale est passée en force de chose jugée ;

c)

soit, dans les cas visés aux points a) et b), dès qu’il a été mis fin à la procédure pour une autre raison.

[...] »

9.

Conformément à l’article 14 de ce règlement, « [l]orsqu’aucune juridiction d’un État membre n’est compétente en vertu des articles 8 à 13, la compétence est, dans chaque État membre, réglée par la loi de cet État ».

10.

L’article 19 dudit règlement prévoit :

« [...]

2. Lorsque des actions relatives à la responsabilité parentale à l’égard d’un enfant, ayant le même objet et la même cause, sont introduites auprès de juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence de la juridiction première soit établie.

3. Lorsque la compétence de la juridiction première saisie est établie, la juridiction saisie en second lieu se dessaisit en faveur de celle-ci.

Dans ce cas, la partie ayant introduit l’action auprès de la juridiction saisie en second lieu peut porter cette action devant la juridiction première saisie. »

11.

En vertu de l’article 21, paragraphe 1, du règlement no 2201/2003, « [l]es décisions rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure ».

12.

Il existe, par ailleurs, une liste des motifs de non-reconnaissance des décisions rendues en matière de responsabilité parentale. Notamment, en vertu de l’article 23, sous a), de ce règlement, une telle décision n’est pas reconnue « si la reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public de l’État membre requis eu égard aux intérêts supérieurs de l’enfant ».

B –Le règlement no 4/2009

13.

Le règlement no 4/2009 vise à faciliter l’obtention d’une décision dans un autre État membre concernant une créance d’aliments, sans aucune autre formalité ( 4 ).

14.

Ce règlement s’applique, en vertu de son article 1er, paragraphe 1, « aux obligations alimentaires découlant de relations de famille, de parenté, de mariage ou d’alliance ».

15.

À cette fin, ledit règlement met en place un système de règles communes, notamment en ce qui concerne les conflits de juridictions, en établissant des règles de compétence générale en matière d’obligations alimentaires.

16.

Ainsi, l’article 3, du règlement no 4/2009 indique ce qui suit :

« Sont compétentes pour statuer en matière d’obligations alimentaires dans les États membres :

a)

la juridiction du lieu où le défendeur a sa résidence habituelle, ou

b)

la juridiction du lieu où le créancier a sa résidence habituelle, ou

c)

la juridiction qui est compétente selon la loi du for pour connaître d’une action relative à l’état des personnes lorsque la...

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